Le débat sur l'Aide Médicale de l'Etat (AME), qui garantit l'accès aux soins des étrangers en situation irrégulière, refait surface. Le Sénat, à majorité de droite, a en effet de réduit samedi dernier le budget de l’AME à son niveau de 2008, soit 475 millions d’euros, alors que le gouvernement voulait l’augmenter à 760 millions.
Une progression de 50 % entre 2008 2013
Comme le révèle Le Généraliste, à l’occasion du débat sur le budget 2015, sénateurs UMP et centristes ont adopté contre l’avis du gouvernement socialiste un amendement en ce sens de Francis Delattre (UMP). Selon ces parlmentaires, il s’agit de « traduire une volonté de rénovation profonde du dispositif, sans pour autant nier la nécessité du maintien d’un accès aux soins urgents pour les étrangers en situation irrégulière. »
Le coût de l’AME « progresse à un rythme insoutenable : 50 % entre 2008 et 2013 », précisent-ils.
Pour inverser cette tendance, le sénateur du Val-d'Oise (Ile-de-France) a plaidé pour le recentrage de l’accès gratuit aux soins sur les publics vulnérables, « c’est-à-dire les femmes enceintes et les mineurs, et pour les autres catégories de demandeurs "l’instauration d’une participation annuelle ou mensuelle d’un montant significatif (...) ou encore le paiement du reste à charge de certains frais médicaux". »
L'AME pour soins urgents maintenue
Et pour rassurer sénateurs socialistes, Francis Delattre a assuré que « dans tous les cas, l’AME pour soins urgents serait maintenue. De plus, un dispositif spécifique de prise en charge intégrale des soins de prophylaxie pourrait être introduit, afin de prévenir l’apparition ou la propagation des maladies infectieuses. »
« Le débat sur l’AME est aussi récurrent que malsain », s’est indigné Yves Daudigny (PS) dans des propos rapportés par Le Quotidien du Médecin. « Restreindre l’accès aux soins pour les personnes défavorisées, c’est participer à une surenchère médiatique. Comment peut-on se dire prêts à laisser sans soins des étrangers qu’il faudra in fine hospitaliser quand ils seront au plus mal ? C’est une absurdité, pis, une honte », a-t-il conclu.
L’examen du budget à la Haute Assemblée doit durer jusqu’au 9 décembre. Le texte fera ensuite l’objet d’une commission mixte paritaire (sept députés, sept sénateurs) qui tentera de trouver une version commune aux deux chambres. En cas d’échec, c’est l’Assemblée nationale qui aura le dernier mot.
Un dispostif utile mais pas surveillé par l'Etat
Cette nouvelle polémique sur l'AME intervient après que Le Parisien a révélé au mois de juin dernier que le budget alloué à cette prestation s’était envolé, passant de 588 à 744 millions d’euros entre 2012 et 2013. Marisol Touraine avait, elle même, reconnue le 3 juin dernier devant les sénateurs, des fraudes dans ce système et qu’elle comptait y mettre bon ordre.
Pour mieux détecter les abus, la ministre de la Santé avait déclaré qu'elle souhaitait, par exemple, poursuivre les contrôles engagés dans les différentes caisses primaires. « A partir de 2015, nous disposerons de statistiques permettant de comparer les taux d'acceptation ou de refus de l'aide médicale de l'Etat caisse par caisse », afin de savoir s'il existe ou non un recours excessif à ce disposif. Autre possibilité évoquée par la ministre de la Santé : mieux coopérer avec les pays d'origine pour que ces personnes étrangères aient un meilleur accès aux soins dans leur pays.