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Pédiatrie

Parler aux parents pour alléger les urgences

Trois appels au Samu sur 4 pour un jeune enfant relèvent d’un conseil médical plutôt que d’une urgence réelle. Une expérimentation lyonnaise réussie de conseils aux parents est menacée faute de financement pérenne.

Parler aux parents pour alléger les urgences Le nouveau ministre de la Santé, Marisol Touraine, en visite dans le service d\'urgence d\'un hôpital de la région parisienne. DURAND FLORENCE/SIPA




« Nous sommes le seul département à noter une baisse du nombre de consultations aux urgences pédiatriques et chez les pédiatres de garde alors que partout ailleurs, l’augmentation est constante et tous les services sont débordés. C’est bien la preuve que ça marche cette éducation à la santé des parents ! ». Pour le Dr Gilles Bagou, urgentiste au SAMU du Rhône, ce ne sont pas les arguments qui manquent pour justifier la présence d’une puéricultrice ou d’une infirmière au Samu pour conseiller les parents appelant pour une pathologie bénigne.
Au Samu 69, comme partout ailleurs en France, un tiers des appels concernent des enfants de moins de 6 ans. Fièvre, diarrhée, chute sur la tête sans gravité, la majorité de ces appels se terminent par un conseil médical plutôt que par l’envoi d’une équipe de secours. « C’est toute la différence entre l’urgence ressentie par le parent affolé et l’urgence réelle analysée par le médecin », explique le Dr Gilles Bagou. Avec plus de 1000 appels au 15 par jour de semaine et 1300 le week-end pour le seul département du Rhône, limiter ces appels inappropriés aurait un impact important sur le Samu lui-même mais aussi en cascade sur l’engorgement des urgences et des cabinets médicaux de garde.

Prendre le temps de la pédagogie

Sous l’impulsion de l’association Courlygones qui réunit des médecins et des paramédicaux spécialistes de l’urgence pédiatrique, le Samu 69 a donc mis en place en 2009 un relais téléphonique assuré par des puéricultrices ou des infirmières spécifiquement formées.
L’appel au 15 est pris en charge classiquement par un assistant de régulation médicale puis par un médecin qui évaluent le degré d’urgence. Et s’il s’agit seulement d’une urgence ressentie, le médecin propose au parent de lui passer la puéricultrice pour approfondir et expliciter les conseils qu’il vient de lui énoncer rapidement.
« Nous médecins régulateurs, nous n’avons que quelques minutes par appel, explique le Dr Bagou. La puéricultrice peut prendre le temps de la pédagogie et faire une véritable éducation sanitaire qui aujourd’hui n’est plus transmise de génération en génération. » La fièvre du nourrisson est l’exemple typique de situation qui inquiète les parents trop rapidement. Sauf chez un nourrisson de moins de 3 mois, sans autre signe pendant 48h, la fièvre ne constitue pas un motif de consultation.


Dr Gilles Bagou
, urgentiste du SAMU du Rhône : « La puéricultrice apprend aux parents de ne s’affoler qu’à bon escient ».



Preuve que les conseil délivrés sont les bons, les fiches-conseils de l'association Courlygones sont désormais intégrées au carnet de santé de chaque nouveau-né. Et sur le terrain, les résultats ne se sont pas faits attendre. Le département du Rhône est le seul de France à enregistrer une baisse parmi les nombres de consultations aux urgences pédiatriques ou chez les pédiatres de garde.
Pourtant, la période d’expérimentation touchant à sa fin, l’Assurance Maladie a interrompu son financement il y a quelques mois tout en reconnaissant l’intérêt du dispositif. Pour Christophe Prudhomme, porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF), l’argument économique ne tient pas.


Dr Christophe Prudhomme
, urgentiste du SAMU de Seine Saint-Denis et porte parole de l’AMUF : « Eviter des consultations inutiles aux urgences, c’est la seule priorité qui vaille ! » 


Une solution temporaire devrait être trouvée pour 6 mois à compter de septembre mais le relais téléphonique ne sera possible qu’en journée le week-end et pas pendant les pics d’appels entre 18h et 22h en semaine. Les départements voisins de l’Ain et de l’Isère seraient très intéressés par un dispositif élargi qui leur permettrait de transmettre leurs appels aux puéricultrices lyonnaises.
Tous les Samu sont en effet confrontés à ce type d’urgences ressenties. « Mais il n’y a pas forcément besoin d’une puéricultrice 24h/24 dans chaque SAMU, souligne le Dr Jean Stagnara, pédiatre à Lyon et secrétaire de l’association Courlygones. On peut imaginer de couper la France en 4 grandes régions, chaque SAMU transférerait ses appels de façon sécurisée à la puéricultrice de garde de sa région ». Reste à convaincre l'Assurance Maladie ou d'autres financeurs au plan national. 

L’AMUF va encore plus loin. Après la pédiatrie, les appels non urgents les plus fréquents au Samu proviennent de personnes ayant des troubles psychiatriques. Et Christophe Prudhomme de proposer : « Un système de relais téléphonique qui permettrait de garder ces patients en ligne pour les rassurer sans encombrer le 15 désengorgerait considérablement les services d’urgences ... qui payent quotidiennement la situation dramatique dans laquelle on laisse s'enfoncer la psychiatrie dans notre pays. »

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