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Humbert, Lambert...

Fin de vie : les grandes affaires qui ont fait la loi

La loi sur la fin de vie, en pleine révision, s’est construite au fil des procès et des affaires médiatiques. Retour sur trois cas emblématiques.

Fin de vie : les grandes affaires qui ont fait la loi Francois Lambert, le neveu de Vincent Lambert, face aux caméras et micros - Remy de la Mauviniere/AP/SIPA




François Hollande a reçu ce matin la proposition de loi sur la fin de vie rédigée par deux parlementaires. Il a approuvé ce texte dans son intégralité, il servira donc de base pour une nouvelle loi. Pourquoidocteur revient sur les grandes affaires qui ont façonné la législation.

Vincent Humbert
En septembre 2000, ce jeune sapeur-pompier de 19 ans est victime d'un accident de la route. Après six mois de coma, il se réveille paralysé des quatre membres, muet, presque aveugle, mais avec toutes ses facultés intellectuelles. Il rédige deux ans plus tard, une lettre au président de la République, qui commence par ces mots : « Monsieur le Président, je vous demande le droit de mourir ». Jacques Chirac lui répond, impuissant : « Je ne peux vous apporter ce que vous attendez ».

C’est sa mère qui devra donc l’aider à partir. Trois ans jour pour jour après l’accident, elle injecte dans sa sonde gastrique une dose de barbituriques qui plonge son fils dans le coma. Le soir même, elle est placée en garde-à-vue pour tentative d’assassinat, puis relâchée le lendemain. Vincent Humbert meurt le 26 septembre 2003.

Son médecin a immédiatement et publiquement assumé son geste. Il a débranché l’appareil respiratoire du jeune homme, et lui a injecté une dose de chlorure de potassium. Une information judiciaire est ouverte. Elle vise Marie Humbert pour « administration de substances toxiques commise avec préméditation et sur personne vulnérable » et le Dr Chaussoy pour « empoisonnement avec préméditation ». Ils bénéficieront finalement d’un non-lieu.

Les trois protagonistes étaient loin de se douter qu’ils deviendraient les icônes d’un nouveau droit à mourir. En effet, le jour de la mort de Vincent Humbert, et face à l’immense retentissement de l’affaire, les députés ont ouvert une mission d'information sur « l'accompagnement de la fin de vie », qui accouchera de la loi Leonetti. Elle qui permet d'arrêter un traitement et proscrit l'acharnement thérapeutique, sans légaliser l'euthanasie.


Marie Humbert accompagnée de son fils Laurent à la sortie de l'église, lors des funérailles de Vincent HUMBERT. MICHEL SPINGLER/AP/SIPA


Chantal Sébire
Atteinte d’une tumeur incurable des sinus lui déformant le visage, Chantal Sébire demande à la justice « d’autoriser l’un de ses médecins à se faire délivrer et à lui remettre les substances nécessaires à une fin de vie digne et sereine ». En contradiction avec la loi Leonetti, la requête de suicide assisté de cette enseignante de 52 ans est rejetée le 17 mars 2008 par le tribunal de Dijon. Chantal Sébire met donc fin à ses jours par elle-même en ingérant des barbituriques deux jours plus tard.

Plusieurs personnalités médicales ou politiques plaident alors pour l’instauration dans la loi d’une « exception d’euthanasie » pour les personnes atteintes de maladies incurables sans être en phase terminale, une position déjà prônée par le Comité d’éthique en mars 2000. La mission d’évaluation de la loi sur la fin de vie écarte finalement toute légalisation d’une aide à mourir mais instaure un Observatoire des pratiques de la fin de vie pour avoir un aperçu chiffré de ces pratiques généralement peu ébruitées par le corps médical.


Chantal Sébire explique son choix.


Vincent Lambert
A 32 ans, cet infirmier est victime d’un accident de la route en septembre 2008. Tétraplégique, il est au fil du temps passé d’une phase de coma profond à celle d’état de conscience minimale. Un état que les médecins décrivent comme « pauci-relationnel » et qui, contrairement à l’état végétatif se caractérise par l’existence de quelques signes de conscience (mouvement des yeux, ressenti probable de la douleur...).

En 2011, les médecins laissent entendre à sa famille que son état ne s’améliorera probablement jamais. Avec l’accord de sa femme Rachel, les médecins du CHU de Reims décident l’arrêt de l’alimentation artificielle et le maintien d’une hydratation faible. Malgré l'absence de directives anticipées de la part du patient, Rachel insiste sur le fait qu'avant l’accident, Vincent avait souvent répété qu'il ne souhaitait pas être maintenu artificiellement en vie si un drame de ce type lui arrivait.

Mais ses parents ne l’entendent pas ainsi. Opposés depuis le début à la décision des médecins d'arrêter les traitements, ils déposent une requête en mai 2013 afin que la sonde d'alimentation soit rétablie. Ils reprochent au CHU de ne pas les avoir informés de la démarche et donc ne pas avoir pris compte de leur avis. La justice leur donne raison.

Depuis, la famille de Vincent se déchire sur la question de poursuivre ou arrêter les soins. Les commissions d’experts se succèdent. Saisi, le conseil d’Etat a préconisé la fin de vie, mais la Cour Européenne, elle, a annulé sa décision. Elle devra se prononcer le 7 janvier prochain. En attendant, Vincent Lambert est toujours en état de coma chronique. Son affaire a montré les limites de la loi Leonetti, et notamment de la procédure collégiale en cas de conflit.


Vincent Lambert avec sa mère, PhotoPQR/L'Union de Reims/Maxppp

Et les autres…
Moins spectaculaires, moins médiatisés, ils n’ont pas révolutionné le droit mais ont tous montré les limites et les contradictions de la loi française sur la fin de vie. Parmi eux, les « vieux époux du Lutetia », morts main dans la main dans le célèbre hôtel parisien. Ils se sont donné la mort un soir de novembre, en 2013, en laissant derrière eux une lettre adressée au procureur de la République. Ils réclamaient le droit à mourir dans la dignité.

Le mois dernier, un octogénaire s'est donné la mort à l'hôpital Ambroise-Paré de Boulogne-Billancourt après avoir tué d'une balle son épouse. Cette dernière, âgée de 82 ans, était hospitalisée pour un cancer incurable. Les époux, mariés depuis de nombreuses années, avaient déjà tenté de se suicider deux semaines avant, en absorbant des médicaments.

 

Et puis il y a tous ces médecins, poursuivis pour homicides, car ils ont donné la mort à des patients qui, jurent-ils, le réclamaient. L’urgentiste Nicolas Bonnemaison est le cas le plus connu. Ils sont nombreux à s’auto-dénoncer. Et à montrer que la loi sur la fin de vie a encore besoin d’évoluer.

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