Les députés Jean Leonetti (UMP) et Alain Claeys (PS) ont remis ce matin leur rapport sur la fin de vie au président de la République. Peu de surprises : la plupart des mesures avaient fuité dans la presse. Le contenu du rapport se veut consensuel et dans « un esprit de rassemblement ». Ni suicide assisté ni euthanasie, mais un nouveau « droit des malades » : celui de mourir dans la dignité et l’absence de douleur.
Le souhait devient une volonté contraignante
Désormais, les patients pourront exiger des médecins l’arrêt des soins et la sédation « profonde et continue jusqu’au décès ». « Il s’agit ici d’une volonté et non d’un souhait », a expliqué Jean Leonetti au cours de la conférence de presse. Les médecins auront l’obligation légale de s’exécuter – alors que jusqu’ici, ils étaient les seuls aptes à prendre cette décision. La demande pourra être faite par des patients « atteints d’une infection incurable en phase terminale, lorsque la souffrance est réfractaire au traitement ». Les personnes en état végétatif et pauci-relationnel, maintenues artificiellement en vie, sont également concernées.
De plus, les « directives anticipées » - sorte de testament écrit par les patients, qui permet d’exprimer son opposition à l’écharnement thérapeutique - auront un caractère contraignant. Jusqu’ici, elles étaient simplement indicatives. Si le patient n’est pas en mesure de s’exprimer, c’est à elles qu’il faudra se référer. Elles figureront sur la carte Vitale, « mais seront révocables à tout moment », a insisté le député Alain Claeys. Ainsi, il sera toujours possible de changer d’avis au cours de sa vie.
En l’absence de directives anticipées, la décision d’arrêter les soins et de sédater un patient se prendra en collégialité avec la famille et le corps médical. Le CCNE avait préconisé une révision de la procédure collégiale, avec la mise en place d’une médiation en cas de désaccord, comme sur le cas Vincent Lambert. Aucune mention n’est faite à cette médiation dans le texte. « Chacun sait que tout le droit n’est pas dans la loi, et que toute la vie n’est pas dans le droit », a souligné Jean Leonetti, qui estime que ces situations restent marginales.
Une formation obligatoire dès septembre
Enfin, les députés ont pointé l’existence d’une grande « inégalité territoriale, et selon les établissements », d’accès aux soins palliatifs. Pour que ce droit soit effectif partout, et notamment dans les EHPAD (maisons de retraites médicalisées) et au domicile des patients, le texte prévoit de créer une formation spécifique à l’accompagnement de fin de vie. Elle sera obligatoire dès la prochaine rentrée universitaire pour tous les étudiants en médecine ainsi que pour tous les diplômes d’Etat en Santé.
« Ces avancées sont majeures car elles correspondent à un changement de culture », a commenté Jean Leonetti. « Jusqu’ici, on considérait que la loi sur la fin de vie était faite pour les médecins. Celle-ci a été créée pour les patients », a complété Alain Claeys. Pour autant, les députés se refusent de parler d’euthanasie. « L’euthanasie est un acte violent qui consiste à donner la mort, a expliqué Jean Leonetti. Le but de la sédation n’est pas de tuer, mais de soulager, même si l’on sait que les doses administrées et l’arrêt des soins mèneront au décès. De plus, en cas d’euthanasie, on n’administre pas les mêmes substances qu’en cas de sédation. Et le rapport au patient n’est pas le même ».
François Hollande a montré sa volonté d’accélerer le calendrier, pour éviter, probablement, que le débat ne s’enlise. Ainsi, l’examen parlementaire commencera dès le mois prochain à l’Assemblée nationale « sur la base d'une déclaration du gouvernement ». Et si le président a tout fait pour éviter que ce nouveau texte ne clive la société, il sait que l’exercice risque d’être périlleux. Des députés ont déjà promis de déposer des amendements.