Des images choquantes liées à l’attentat à Charlie Hebdo tournent en boucle à la télévision, sur internet et les réseaux sociaux. Face à ce flot de vidéos ou de photos, il existe des risques pour les personnes fragiles. « On peut avoir des réactions de stress aigu assez importantes », en particulier chez les enfants et chez les adolescents, confirme le Dr Gilbert Vila, chef du service « psychopathologie et centre de victimologie pour mineurs » à l’hôpital Trousseau à Paris. Et pour le pédopsychiatre, le problème, face à cette répétition, c'est « la fascination » dont peut faire l'objet le jeune « dans un climat assez dissociatif, c’est-à-dire un état second ou hypnotique qui va augmenter sa sensibilité et sa vulnérabilité, le fragiliser encore plus ».
Ecoutez le Dr Gilbert Vila, chef du service « psychopathologie et centre de victimologie pour mineurs » à l’hôpital Trousseau à Paris : « Devant le net, les jeunes peuvent vivre une sorte de fascination, être dans un état hypnotique, ce qui les rend plus vulnérables. »
Des symptômes non spécifiques
Les symptômes de ce stress aigu ne sont pas spécifiques : troubles du sommeil, difficultés d’endormissement, ruminations, crises aiguës d’angoisse, petits problèmes d’appétit, inquiétudes ou peurs sur différents objets, somatisations diverses comme des maux de ventre… « Dans la grande majorité des cas, cela dure quelques heures ou un ou deux jours et cela se résout spontanément », ajoute l’expert. Dans de rares cas, cela peut se prolonger anormalement et évoluer alors vers un état de stress post-traumatique.
Ne pas rester inactif
Quels conseils donner aux parents ? « Le mot clef, c’est le dialogue, l’échange et la communication. Il faut tendre la main, garder le contact, rester disponible au maximum », résume le Dr Vila. Cela repose sur un difficile travail d’équilibriste, selon le praticien. Les parents doivent savoir jouer entre l’excès et l’absence d’interventionnisme.
Etre absent ou inactif risque de laisser l’adolescent seul face à ses sensations et ses émotions qui sont assez brutes. Intervenir trop risque d’exaspérer l’adolescent, de le faire fuir et se replier sur lui-même.
Ecoutez le Dr Gilbert Vila : « Les parents peuvent échanger entre eux sur le sujet devant lui afin qu’il ait au moins la possibilité d’entendre »
La médiation avec le médecin
Pour ce spécialiste, l’intervention d’un médecin généraliste ou d’un pédiatre peut être une excellente solution si l’enfant ou l’adolescent est régulièrement suivi par le praticien. Cette médiation par un tiers à l’extérieur de la famille peut trouver un écho auprès du jeune. Et les examens physiques ou somatiques, comme la prise de la tension, peuvent représenter des « gestes rassurants » permettant « d’ouvrir une porte ».
Dire les choses basiquement
Le Pr Catherine Jousselme, pédopsychiatre à la Fondation Vallée à Gentilly (Val-de-Marne), estime aussi que les parents doivent veiller à ce que leurs enfants et leurs adolescents ne regardent pas les images en boucle. Interrogée jeudi sur France 5 dans le Magazine de la santé, elle préconise de bien encadrer les petits pour qu’ils ne les voient qu’une fois et de discuter avec les plus grands sur le fait que ce n’est pas la peine de regarder tout le temps la même chose, que cela ne va rien leur apporter.
Pour les petits, elle recommande aussi « de dire les choses basiquement », et, au-delà de l’encadrement, de les protéger en leur donnant confiance dans les adultes et les institutions qui se chargent de régler la situation.