C‘est un principe désormais gravé dans le marbre. Les patients victimes de pathologies nosocomiales seront intégralement dédommagés, même en cas de refus de soins. Dans un arrêt, la cour de cassation a tranché en faveur des malades.
E.coli, staphylocoque doré...
Les pathologies nosocomiales se réfèrent aux infections contractées au sein d’un établissement de santé (hôpital, clinique, cabinet libéral), à la suite d’un soin. Les micro-organismes les plus fréquemment impliqués sont les bactéries E.coli (25 %), le Staphylocoque doré (19 %) et le bacille pyocyanique (10 %). Un patient sur vingt est concerné.
La législation protège déjà les victimes d’infections nosocomiales, indemnisées dans l’intégralité du préjudice subi. Ainsi, la loi du 4 mars 2002 stipule que « les établissements, services et organismes sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ». Cette nuance, la « cause étrangère », était précisément au cœur du procès qui s’est déroulé pendant près de dix ans, et dont la cour de cassation vient de relancer le cours.
Les faits
La juridiction suprême devait se prononcer sur le cas d’un homme ayant subi en 2005 deux interventions chirurgicales dans le service d’urologie d’une clinique bordelaise. Après la seconde, le patient présentait un état d’hyperthermie suggérant un état infectieux. Il décidait, malgré tout, de rentrer chez lui et refusait de prolonger les soins. Un mois plus tard, il était admis dans un autre établissement, avec une septicémie par streptocoque et des atteintes secondaires à l'épaule, au foie et au cœur. Dans la foulée, il portait plainte contre la première clinique.
Selon la version de l’établissement de santé incriminé, le patient est entièrement responsable de l’aggravation de son état. S’il n’avait pas refusé les soins, l’infection aurait pu être traitée en moins d’un mois, a-t-il fait savoir tout au long de la procédure. Mais le patient aurait préféré se tourner vers les médecines naturelles, avec un succès tout relatif. La clinique affirme qu’en outre, les soins en question n’avaient rien d’une thérapie invasive, puisqu’ils consistaient en une simple prise d’antibiotiques.
A Bordeaux, les juges lui ont d’ailleurs donné raison. La cour d’appel a décidé de ne condamner qu’en partie la clinique, et donc, de limiter les indemnisations versées au patient. Mais la cour de cassation, elle, l’a entendu autrement.
Refuser des soins, un droit inaliénable
Dans son arrêt, elle explique que la question du traitement ne s'est posée qu'à cause de l'infection nosocomiale, à l'origine du préjudice, puis de la procédure judiciaire. En d’autres termes : pas d’infection, pas de procès. De plus, le refus des soins est un droit inaliénable du patient, qui aurait dû être capable de l’exercer sans en subir les conséquences.
Elle conclut sur un principe, qui fera désormais jurisprudence : en cas d’infection nosocomiale, un refus de soin ne justifie en aucun cas la réduction de l’indemnisation. L’affaire est renvoyée devant la cour d’appel de Toulouse.