Nouveau carton rouge pour les boissons sucrées. En consommer trop est déjà connu pour provoquer surpoids et obésité. Cela pourrait aussi conduire à des règles précoces. Des chercheurs américains ont publié ces résultats mercredi dans la revue Human Reproduction. Le Pr Carwile, de la Harvard School of Public Health à Boston, et ses collègues ont suivi pendant cinq ans 5583 filles âgées de 9 à 14 ans et qui n’étaient pas encore pubères.
Ils ont montré que celles qui consommaient le plus de boissons sucrées (1,5 verre ou canette par jour) avaient leurs premières règles 2,7 mois plus tôt que celles qui en buvaient le moins (2 verres ou canettes par semaine).
L'index glycémique en cause
Seule la consommation de boissons contenant du sucre ajouté, telles que les sodas serait en cause. Les résultats n'ont montré aucun effet des jus de fruits ni des boissons "sans sucre". Ceci pourrait s'expliquer par une différence d'index glycémique. Celui des boissons avec du sucre ajouté est supérieur à celui des boissons naturellement sucrées, ce qui entraîne plus rapidement une hausse du taux d’insuline dans le sang. Or l'insuline a elle-même un impact sur les hormones sexuelles, expliquent les chercheurs.
Ces résultats sont importants. « La puberté précoce(*) existe depuis la nuit des temps, mais ces dernières années le nombre de nouveaux cas a augmenté », indique le Dr Monique Jesuran-Perelroizen, pédiatre endocrinologue à Toulouse, interrogée par Pourquoi Docteur.
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Selon le Dr Jesuran-Perelroizen, les seules données actuellement disponibles sont danoises, avec 0,2% de nouveaux cas par an de puberté précoce chez les filles. Soit 1000 cas par an, un chiffre absolu identique à la France, selon les premières estimations de l'Institut de veille sanitaire (InVS).
Si les praticiens sont inquiets c'est que la puberté précoce est associée à un risque accru de développer un cancer du sein plus tard dans la vie. Les auteurs de l'étude précisent cependant qu' «il faut avoir des règles un an plus tôt que la normale pour observer une augmentation de 5% du risque de cancer du sein ». Donc avoir ses règles 2,7 mois plus tôt n'aurait probablement qu’un « impact modeste sur le risque de cancer du sein », reconnaissent-ils.
Des causes encore incertaines
« On ne connaît pas exactement la cause de la puberté précoce. Mais des études chez l’animal et chez l’enfant ont montré de fortes suspicions de l’implication des perturbateurs endocriniens présents dans l’environnement », indique Monique Jesuran-Perelroizen. Pendant l’enfance, la partie de hypophyse -une glande du cerveau- qui régule les hormones sexuelles est en sommeil. Les perturbateurs endocriniens viennent perturber l’horloge biologique en réveillant l'hypophyse plus tôt. La prise de poids et l’obésité, ainsi que la résistance à l’insuline sont aussi associées à une puberté précoce. Mais pour le Pr Jesuran-Perelroizen, le sucre n’aurait lui qu’un rôle indirect. Et ce n'est pas étonnant pour elle s'il a un impact dans l'étude indépendamment de la prise de poids.
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(*) La puberté précoce est définie d'abord par l'apparition des seins avant 8 ans. Et comme en général, les règles surviennent deux ans après, la puberté précoce peut être définie en second lieu par de premières règles avant l'âge de 10 ans.