"Don de sang, c'est urgent". Le slogan que martèle en ce moment l'Etablissement français du sang pourrait tout aussi bien s'appliquer aux ovules. Car si la France autorise ce don de gamètes, il n'y a qu'un peu plus de 400 femmes par an qui font la démarche. En comparaison des 2 110 couples qui sont en attente c'est dérisoire.
Face à des délais totalement incompatibles avec les contraintes qu'impose l'horloge biologique des femmes en attente d'ovules (la plupart a entre 35 et 45 ans), un certain nombre d'entre elles sautent le pas, et partent à l'étranger pour bénéficier d'un don. Elles seraient ainsi 765 à être allées se faire inséminer en Espagne en 2014, selon le Parisien.
Mais avant de débuter la grossesse tant désirée, encore faut-il trouver un gynécologue français qui accepte de prendre part au projet, en prescrivant examens et traitements avant l'insémination, et qui assure ensuite le suivi de grossesse. Il faut également financer les voyages, les frais d'hospitalisation, de soins, et il n'est pas rare que les femmes s'endettent pour mener à bien leur projet.
Si cette situation n'est pas nouvelle, ce qui l'est plus, c'est la prise de position de l'Académie de médecine, pourtant loin d'être réputée pour ruer dans les brancards. En décernant au professeur Antonio Pellicer le prix Jacques Salat-Baroux, qui récompense des avancées dans le domaine de la reproduction humaine, les académiciens ont émis un message clair. En effet, ce médecin espagnol, sommité mondiale de la fertilité, est très critique face à la position de la France en matière de don d'ovules.
Antonio Pellicer avance des solutions simples pour que la France rattrape son retard dans le domaine. En premier lieu, explique-t-il dans les colonnes du Parisien, la loi française devrait évoluer afin de permettre aux couples, mais aussi aux célibataires, d'accéder à la procréation assistée ainsi qu'à la congélation des gamètes. Mais surtout, pour augmenter le nombre de donneuses d'ovules, il lui paraît incontournable de rémunérer ces femmes. Il est hypocrite selon lui d'autoriser le don sans dédommager les femmes à qui cela "demande beaucoup, en temps et en traitement éprouvant". C'est selon lui parce que le don est financièrement compensé qu'il n'y a pas de délai d'attente en Espagne.
Le don d'ovule y est rémunéré à hauteur de 900 à 1000 euros, chaque donneuse ne peut donner que deux fois par année et six fois en tout. "On est loin du business", souligne Antonio Pellicer. L'autre condition sine qua none est l'anonymat. La Grande-Bretagne, qui rétribue les donneuses, mais ne garantie pas leur anonymat, connaît la même pénurie que la France.
Première publication le : 29 janvier 2015