Quand le Dr. Kate Granger, 31 ans, est tombée malade, elle a découvert l’envers du décor. Un cancer incurable a forcé cette praticienne hospitalière à s’immerger dans le monde angoissant des patients, à partager leurs frustrations, leurs interrogations. Et ce qu’elle a vu ne lui a pas plu du tout.
« L’impression de n’être qu’un corps malade...»
« J’ai bien observé les attitudes du personnel soignant, raconte-t-elle dans une interview à la BBC. Et j’ai réalisé que la plupart des membres de l'équipe ne se présentaient pas lorsqu’ils rencontraient un patient ». Pendant tout son traitement, des infirmiers anonymes et des médecins sans nom se sont succédés. Celui qui lui a annoncé son diagnostic n’a pas pris la peine de dire « bonjour » ni de la regarder dans les yeux.
« J’avais l’impression de n’être qu’un corps malade dans un lit d’hôpital, et non pas une personne, déplore-t-elle. Pourtant, quand certains professionnels de santé se présentaient, cela faisait toute la différence ! Je me sentais beaucoup plus à l’aise, et moins seule à l’hôpital ».
Humaniser la relation soignant-patient
Forte de ce constat, et portée par l’indignation, Kate Granger a lancé il y a deux ans une campagne baptisée : « Hello, my name is… » (Bonjour, je m’appelle…), où les participants se photographient avec leur prénom inscrit sur une pancarte. La campagne incite tous les professionnels de santé à adopter une attitude plus compatissante avec les patients.
Très vite, le mouvement, né sur les réseaux sociaux avec le hashtag #hellomynameis, a fait tâche d’huile au sein du système de santé anglais, écossais et gallois. Plus de 400 000 infirmiers, médecins, thérapeutes, réceptionnistes ou encore brancardiers y ont ainsi participé, issus d’une centaine de centres publics de soins du Royaume-Uni (rattachés au NHS, le National Health Center). Tous s’engagent à « humaniser » les relations soignant-patient.
David Cameron, Bob Geldof...
Des personnalités emblématiques ont également apporté leur soutien à cette campagne devenue nationale, comme David Cameron, le premier ministre britannique, Jeremy Hunt, ministre de la Santé, ou encore le chanteur Bob Geldof. Le gouvernement écossais a annoncé ce lundi qu’il allait verser £40 000 (53 000€) au NHS afin de développer la campagne à travers le pays.
« Je suis convaincue qu’il ne s’agit pas seulement de connaître le nom de quelqu’un. C’est beaucoup plus profond. Il s’agit de créer une contact humain, de commencer une relation thérapeutique fondée sur la confiance », écrit Kate Granger sur son blog. Aujourd’hui, la jeune femme est en phase terminale et sans espoir de rémission. « J’espère que mon témoignage permettra de mettre la question de la compassion au cœur des soins de santé », conclut-elle.