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Contraception

Pourquoi la pilule passe moins bien chez les jeunes femmes

Selon l'étude FECOND, l'utilisation de la pilule a baissé de 10% en 10 ans chez les jeunes femmes de 20 à 24 ans. Outre le problème économique, la pilule est vécue comme une contrainte.

Pourquoi la pilule passe moins bien chez les jeunes femmes AIMO-KOIVISTO/LEHTIKUVA OY/SIPA

  • Publié le 13.09.2012 à 08h31
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C’est inédit, depuis quelques années, les femmes utilisent moins la pilule conctraceptive. Selon l’enquête FECOND de l’Inserm et de l’Ined (1), son utilisation a diminué de 4,6% entre 2000 et 2010. C'est la première fois depuis la légalisation de la contraception en 1967 que les chercheurs constatent une telle baisse. Celle-ci est en partie compensée par l’utilisation d’autres méthodes : implant (+2%), anneau vaginal (+1%), patch contraceptif (+0,4%).
Mais, ce n’est pas le cas pour toutes les tranches d’âge ! Pour les femmes de 20 à 24 ans, nous constatons une baisse de 10% de la pilule et une augmentation de seulement 5% des autres méthodes », s’inquiète Caroline Moreau, co-responsable de l’étude FECOND à l’Ined. La précarité serait une des explications. « Le recours à la pilule peut représenter un budget important lorsque les femmes se voient prescrire des marques non remboursées, ce qui est le cas de 42% d'entre elles aujourd'hui. Et seules 43% des jeunes utilisatrices de pilule en situation financière difficile sont totalement remboursées pour leur contraception », indique Nathalie Bajos, de l’Inserm. 
Autre point inquiétant, le suivi gynécologique a diminué chez ces jeunes femmes entre 20 et 24 ans. « 12,2% d'entre elles n'ont pas de suivi habituel chez un médecin en 2010, contre 6,9% en 2000 », soulignent les auteurs.

Ecouter Caroline Moreau, chercheur à l'INED :« Une des hypothèses c’est la précarité sociale »
 

« Ces chiffres sont préoccupants, estime le gynécologue Christian Jamin,  et il ne serait pas étonnant de voir monter le taux d’IVG chez les jeunes femmes ». Un taux d’IVG qui est déjà en hausse chez les moins de 25 ans, selon les derniers chiffres de l’Ined.
Pour ce clinicien, qui voit tous les jours des femmes en consultation, il n’y a pas qu’un problème économique. « Les femmes me font part d’une certaine lassitude à l’égard de la contraception, elles n’en perçoivent aujourd’hui que les contraintes. Selon lui, la contraception n’est plus perçue comme une forme de liberté. » Autre argument relevé par ce médecin, « on assiste à une méfiance généraliseé à l’égard des médicaments et en particulier vis-à-vis des hormones. Une méfiance injustifiée mais j’entends régulièrement en consultation : la pilule c’est mauvais pour mon corps, c’est artificiel. 

Ecouter Christian Jamin, gynécologue : « Une distortion de l’image de la pilule tout à fait néfaste ».
 

Une image de la pilule aussi écornée par les débats autour du remboursement. Par exemple, la Commission de la transparence (CT) a recommandé cet été dans un avis provisoire, le déremboursement des pilules de troisième génération. Les arguments portent le sur-risque thrombo-embolique et l'absence davantage démontré en termes de tolérance clinique par rapport aux contraceptifs oraux plus anciens. L'annonce de ce possible déremboursement "est une mauvaise nouvelle pour les femmes, parce qu'elles avaient le choix jusqu'ici de prendre une pilule de troisième génération, moins dosée.
Le service rendu était considérable car le problème de compliance est le problème de la contraception, et la troisième génération permet d'y répondre », a déclaré cet été le Pr Israël Nisand, gynécologue-obstétricien aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg, et  co-auteur d'un rapport visant à faciliter l'accès à la contraception et à l'IVG chez les adolescentes. Selon lui, l'évaluation de la CT « est insuffisante, plutôt faite pour faire des économies que pour le bien-être des femmes. Le risque [thrombo-embolique] est extrêmement faible en valeur absolue, on passe de l'ordre de 1,5 pour 100.000 au lieu de 1 pour 100.000. C'est une mesure uniquement économique ».


Quelles sont les pistes pour modifier cet infléchissement de la contraception ? Pour Christian Jamin, il est nécessaire de revoir le mode de remboursement des contraceptifs, mais il faut aussi rappeler les risques quand on ne prend pas de contraceptif.

Ecouter Christian Jamin : « Juste un chiffre, les 3 % des femmes qui ne prennent pas de contraception représentent 35% des IVG en France. »
 

Deuxième piste, développer les alternatives à la pilule. Car la France reste le pays du tout pilule, malgré les recommandations en faveur des autres méthodes. Ainsi, depuis 2004, la Haute autorité de santé (HAS) indique que le stérilet peut être utilisé à tous les âges, que la femme ait eu ou non un enfant. Or seules 1,3% des femmes sans enfant utilisent cette méthode en 2010. La proportion grimpe à 20% chez celles qui ont un enfant et à 40% chez celles qui en ont deux ou plus. « Il y a un effort à faire auprès du corps médical », estime le Dr Christian Jamin. Une enquête menée chez les médecins en 2011 le confirme. 69% des gynécologues interrogés considèraient que le stérilet n'est pas indiqué pour une femme n'ayant pas eu d'enfant, ainsi que 84% des médecins généralistes…

(1) Institut national d'études démographiques

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