La prévention du cancer du col de l’utérus est à la traîne en France. Une femme sur quatre n’a pas réalisé de frottis de dépistage au cours des trois dernières années. D’après le Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire (BEH), édité par Santé Publique France, la faute revient en partie aux inégalités territoriales. Mais l’étude, réalisée auprès de 2 500 femmes, offre tout de même une lueur d’espoir : les femmes « actives et mobiles » parviennent à réduire leur risque.
Un examen mal remboursé
Chaque année, 6 millions de femmes réalisent un frottis de dépistage du cancer du col de l’utérus. Côté ponctualité, en revanche, les Françaises ne sont pas au rendez-vous. Alors que l’examen est recommandé tous les trois ans, 10 % de la population concernée suit ce conseil. Au sein de l’étude parue dans le BEH, menée à Paris et en petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne), les femmes se montrent un peu plus sérieuses. Mais 26,9 % d’entre elles n’ont pas réalisé de frottis depuis au moins trois ans.
Ces travaux mettent en évidence des inégalités dans l’accès aux examens gynécologiques selon le territoire. Les femmes qui ne réalisent pas de frottis dans les temps sont principalement les plus jeunes ou les plus âgées du groupe. Les chercheurs notent aussi qu’elles sont plus souvent célibataires, qu’elles ont un faible niveau d’études et qu’elles ne disposent pas d’une complémentaire santé.
Or, l’examen n’est pas intégralement remboursé par l’Assurance maladie. Son coût, lui, n’est pas minime, puisqu’à la consultation gynécologique (28 euros) – remboursée à 70 % – s’ajoute le prix du frottis (15,40 euros). « Seul un des quatre départements concernés (…) a mis en place un dépistage organisé après la réalisation de l’enquête », souligne l’article du BEH.
La mobilité compense
Mais certaines femmes sont plus exposées aux inégalités que d’autres. Vivre dans un quartier où les médecins généralistes et les gynécologues se font rares favorise ainsi les retards dans le dépistage du cancer du col de l’utérus. Une manière d’échapper à cette fatalité émerge cependant : la mobilité.
Les femmes dites « actives et mobiles », c’est-à-dire qui travaillent et changent de quartier, ratent moins les intervalles de dépistage (16,1 %). Elles maîtrisent mieux l’espace, ont davantage accès aux ressources à leur disposition, expliquent les auteurs. Mais ils le rappellent : la mobilité quotidienne peut autant souligner les inégalités que les exacerber.
Pour rattraper son retard mieux vaut que les autres quartiers soient plus favorisés sur le plan des services médicaux. Car les femmes dont les trois quartiers les plus fréquentés appartiennent aux niveaux socioéconomiques les plus faibles sont 78 % plus à risque de retard dans l’accès au frottis.
« Ces résultats suggèrent que la préservation ou l’augmentation de l’offre de soins gynécologiques ambulatoires de proximité est importante pour ces femmes peu mobiles, par ailleurs les plus vulnérables et les plus défavorisées », tranchent les auteurs. Définir une offre valable est urgente car le cancer du col de l’utérus touche 2 800 personnes annuellement et en a tué 1 100 en 2015.
Vaccin contre le papillomavirus : son prix freine l’adhésion
15 % des jeunes filles sont vaccinées contre le papillomavirus à l’âge de 16 ans. Une couverture vaccinale largement insuffisante et en baisse constante depuis 2011. Pourquoi les Françaises ne se protègent-elles pas contre ce virus, responsable des verrues génitales et du cancer du col de l’utérus ? C’est la question que se sont posée les auteurs d’un article du Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire (BEH). Ils ont suivi les réponses de l’enquête santé et de protection sociale de 2012 et 685 couples mère-enfant.
« Les jeunes filles ayant un profil d’alcoolisation ‘consommateur à risque ponctuel’, ainsi que celles vivant dans un foyer dont la personne de référence était un agriculteur exploitant, était mieux vaccinées », soulignent les auteurs. Mais chaque dose de vaccin contre le papillomavirus coûte 110 à 120 euros. Elle est remboursée à 65 % par la sécurité sociale. Sans surprise, l’absence de complémentaire santé freine donc l’accès à cette protection, tout comme le fait d’appartenir à un foyer aux faibles revenus.
Lorsque la mère ne réalise pas de frottis de dépistage régulier, sa fille se fait moins souvent vacciner, révèle aussi l’étude. « On peut supposer que ces filles non vaccinées, qui auront demain les mêmes comportements que leurs mères ou qui rencontreront les mêmes obstacles au dépistage que leurs mères, seront elles-mêmes non dépistées dans le futur », notent les auteurs. Une observation qui remet en question l’efficacité du programme de vaccination en France.
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