Difficile d’abandonner une addiction, y compris pour neuf mois. Une femme sur cinq continue de fumer au cours de sa grossesse. Les spécialistes font donc le choix du compromis, et recommandent de réduire la consommation autant que possible. Mais à de faibles quantités de tabac auraient aussi des effets sur le fœtus. C’est ce que montre une étude menée par l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris), publiée ce 11 avril dans Nicotine and Tobacco Research. Les bébés exposés à la nicotine ont un plus petit poids à la naissance.
300 grammes de différence
En France, on estime que 158 600 nouveau-nés sont exposés au tabac chaque année, avant leur naissance. 500 grammes séparent les bébés nés de mère abstinente de ceux dont la mère était grosse fumeuse (plus de 10 cigarettes par jour). Pour parvenir à ce résultat, les chercheurs ont suivi 371 femmes. Elles devaient arrêter de fumer avant la fin du premier trimestre de grossesse.
Par rapport aux volontaires qui ont réussi, celles qui fument peu – moins de 5 cigarettes par jour – observent toujours des effets sur leur progéniture. Sur la balance, ces nourrissons pèsent 336 grammes de moins. Cela confirme les résultats d’autres études, qui associent la réduction du tabagisme à un moindre effet sur le fœtus.
« Cependant, au niveau de la santé publique, une réduction – même faible – du poids de naissance peut avoir des conséquences durables pour la descendance », soulignent les chercheurs. Les bébés sont, en effet, plus sujets à des pathologies chroniques. Certains de leurs organes sont plus sensibles, face aux médicaments par exemple.
Un apport constant
Dans un second temps, l’équipe a éliminé tous les facteurs qui peuvent influencer les variations du poids de naissance. L’écart se maintient toujours, bien qu’il soit légèrement plus faible. Les enfants dont la mère a fumé moins de 5 cigarettes par jour sont 228 grammes plus légers que les autres. Les écarts se resserrent entre les différents bébés exposés à la cigarette in utero, preuve s’il en était besoin de la toxicité élevée des produits du tabac.
« Ces résultats montrent qu’il faut une abstinence totale pendant la grossesse pour ne pas perdre de poids de naissance », conclut le Dr Ivan Berlin, coordinateur de l’étude. Et pour cause : même avec peu de cigarettes, l’apporte de nicotine reste constant dans l’organisme. « Le tabagisme pendant la grossesse continue d'être un problème de santé publique mondial, concluent Linda Bauld et Cheryl Oncken dans un éditorial publié dans le même numéro de Nicotine and Tobacco Research. Les risques sont conséquents et les bénéfices de l'arrêt du tabac sont majeurs.»
Regardez les explications du Dr Ivan Berlin :