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Soriatane (acitrétine)

Psoriasis : un traitement prescrit malgré les risques pour le fœtus

Malgré les risques de malformation fœtale, trop de femmes commencent une grossesse sous Soriatane. Près de 700 grossesses ont eu lieu depuis 2007.

Psoriasis : un traitement prescrit malgré les risques pour le fœtus fizkes/epictura

  • Publié le 22.06.2017 à 13h24
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La France a décidément du mal à faire appliquer les restrictions de prescription des médicaments… Alors que la délivrance du Soriatane (acitrétine) est soumise à des conditions strictes, trop peu de femmes et de professionnels de santé les respectent.

Les tests de grossesse, notamment, ne sont pas suffisamment réalisés. Or, ce traitement indiqué dans des affections dermatologiques sévères, est un agent tératogène puissant. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) s’alarme de cette désinvolture dans une étude d’impact.

Près de 700 grossesses

L’acitrétine est un rétinoïde indiqué dans trois maladies de peau invalidantes : le psoriasis sévère, les dermatoses liées à un trouble de la kératinisation, et les formes sévères de lichen plan. La molécule est efficace mais hautement tératogène. On estime que 25 % des grossesses menées sous traitement aboutiront à des malformations.

Or, entre 2007 et 2015, 694 grossesses sont survenues chez des femmes traitées par Soriatane, selon les données de l’Assurance maladie. Le médicament fait l’objet d’un Programme de Prévention de la Grossesse depuis 2012 et a été progressivement limité (voir encadré).

Mais plus de 100 grossesse ont commencé après la dernière vague de restrictions de l’ANSM, survenue en 2014. C’est le signe que les règles ne sont pas respectées. Ce que confirme le suivi des 10 000 patientes traitées par acitrétine.



Trop peu de tests de grossesse

Avant de démarrer une cure de Soriatane, les femmes doivent se soumettre à un test de grossesse. Celui-ci doit être réalisé dans les trois jours précédant l’initiation du traitement ou le renouvellement de l’ordonnance. Si le résultat est positif, le traitement est interrompu.

Mais seulement 37 % des patientes réalisent ce test avant de voir leur médecin. C’est mieux qu’en 2007, date de la dernière étude, mais cela reste largement insuffisant. « Il n’est pas acceptable qu’actuellement une femme exposée au Soriatane débute une grossesse au regard des risques encourus », tranche l’ANSM.

Les dermatologues respectent un peu mieux cette règle : ils sont 53 % à exiger un test de grossesse, contre 12 % des médecins généralistes. Mais cette dernière observation soulève un autre problème. Ces derniers n’ont pas le droit d’initier une prescription d’acitrétine. Et ce, depuis février 2014. En dépit de cette interdiction, 20 % des généralistes continuent pourtant d’entamer les prises en charge.

Des précédents inquiétants

L’ANSM rappelle donc les règles pour la énième fois et demande aux professionnels de santé de les respecter sans écart. Elle souligne aussi que le Soriatane « ne doit être prescrit que quand le traitement est indispensable et sans alternative possible. » Il faut dire que les risques pour le bébé sont majeurs.

Les enfants exposés au médicament sont à haut risque d’anomalies du système nerveux central, du système cardiovasculaire ou encore des glandes parathyroïdes. Ils sont aussi plus nombreux à souffrir de fentes palatines, d’anomalies de l’oreille externe ou encore de dysmorphies faciales.

Mais ces risques ne sont visiblement pas suffisants pour convaincre les soignants et leurs patientes. Les autorités ont les mêmes difficultés à faire appliquer les règles pour d’autres médicaments hautement tératogènes. Une femme sur deux ne respecte pas les conditions d’obtention d’isotrétinoïne (Roaccutane, Curacné), indiquée contre l’acné. De même, 14 000 grossesses se sont déroulées sous acide valproïque (Dépakine, Dépakote) entre 2007 et 2014.

 

Des règles de prescription strictes

Le Centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT) ne laisse aucun doute sur le sujet : aucune grossesse ne doit se dérouler sous Soriatane (acitrétine). Afin de l’éviter, les autorités sanitaires ont soumis la prescription de cette molécule à un processus complexe et strict. Seuls les dermatologues ont la possibilité d’initier le traitement.

L’ordonnance doit être renouvelée tous les mois et un rendez-vous de bilan chez le spécialiste est obligatoire pour chaque année de cure. Les pharmaciens sont eux aussi soumis à des restrictions. Ils ne peuvent délivrer le médicament que dans la semaine qui suit la prescription.

En l’absence d’un test de grossesse négatif, les médecins doivent refuser d’établir l’ordonnance et les pharmaciens ne peuvent pas délivrer le médicament. Cette information est inscrite sur le carnet remis à chaque patiente au début du traitement, à présenter à chaque entretien avec un professionnel de santé.

Les patientes doivent aussi faire preuve de prudence après l’arrêt du traitement. Un test de grossesse est exigé au début de la cure et tous les mois tant qu’elle dure. Après son interruption, un test de contrôle est exigé dans les deux mois, puis régulièrement pendant trois ans. Une mesure de prudence justifiée par le risque d’accumulation de la molécule dans le tissu adipeux et de relargage au cours de cette période.

Enfin, la consommation d’alcool est interdite au cours du traitement et dans les 2 mois suivant l’arrêt. En effet, la formation d’un métabolite tératogène est favorisée par la prise d’alcool. Il est également interdit d’effectuer un don du sang jusqu’à 3 ans après l’arrêt de la prise en charge.

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