Concilier l’inconciliable, c’est ce que le contrôleur général des lieux de privation de liberté essaie de faire dans son avis sur les mères détenues avec leur enfant. Faut-il éviter à tout prix l’incarcération à un enfant mais le priver de sa mère ou au contraire privilégier le lien maternel en laissant un enfant derrière les barreaux ? Jean-Marie Delarue n’a évidemment pas la solution mais il émet des recommandations pour améliorer les conditions de vie de ces enfants de moins de 18 mois qui peuvent rester auprès de leur mère.
Equiilibre entre dignité et sécurité
Tout d’abord, il rappelle que « l’équilibre entre les impératifs de sécurité et ceux de la dignité des personnes n’est pas le même dans les quartiers « mères et enfants » que dans les autres quartiers de l’établissement. » Or, cet équilibre est diversement appliqué. Par exemple, les sanctions disciplinaires qui pourraient conduire à la séparation de la mère et de l’enfant doivent être évitées. Par ailleurs, sur le plan sanitaire, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté émet des recommandations précises sur le plan sanitaire. « La mère doit pouvoir s’entretenir librement (au téléphone) avec le médecin qui suit ou doit suivre son enfant, aussi accompagner ce dernier aux consultations médicales au-dehors, enfin être présente auprès de lui en cas d’hospitalisation, autant que l’hôpital le permet », souligne-t-il.
Faire venir les pédiatres en prison
Faciliter l’entrée des services de Proctection maternelle et infantile (PMI) dans les lieux de détention est également nécessaire. Pour le CGLPL, il faut absolument signer des conventions entre les PMI et les établissements pénitentiaires et prévoir notamment les cas d’urgence pédiatrique. En outre, Jean-Marie Delarue estime qu’il est souvent préférable de faire venir les professionnels de santé au sein de la prison plutôt que d’extraire la femme et l’enfant pour les conduire à l’hôpital. « Cette configuration est bien meilleure que la liberté, toute théorique, laissée à la mère de choisir un médecin pour son enfant. Elle a l’avantage de faire observer par le médecin in situ les conditions d’existence de l’enfant et de sa mère. Elle garantit la régularité de l’examen médical – non soumis à extraction de l’enfant. C’est pourquoi cette solution doit être privilégiée. » Et même pour les soins post-accouchement, la venue du gynécologue est préférable à l’extraction de la femme. En effet, lors de ces transferts, les femmes ont souvent des menottes, des chaines et des surveillantes sont souvent présentes. Autant de conditions dégradantes pour la femme. Enfin, Jean-Marie Delarue souhaite que les personnels travaillant dans les nurseries des prisons soient spécifiquement formés, pour mieux appréhender certaines situations tel que l’allaitement.
Aménager les peines des mères de famille
Cet avis ne décrit pas une situation apocalyptique dans les 26 des 29 prisons françaises qui comptent au total 76 places de nurseries. Cependant, Jean-Marie Delarue avait déjà réclamé en 2010 qu’une réflexion s’engage pour que « les mères détenues avec enfants se voient nécessairement accorder un aménagement de peine ou bénéficient d’une suspension de peine pour maternité ou encore accèdent à une liberté conditionnelle. » Sans succès. Il espère que ces nouvelles recommandations ne resteront pas lettre morte.