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Chronique de l'été

L’été, nos oreilles sont en danger

Par le Dr Jean-François Lemoine

Autrefois, on appelait cela les « bourdonnements » d’oreille. Aujourd’hui, le terme à la mode est celui d’« acouphènes ». Mieux adapté à la génération de sourds que baladeurs, boîtes de nuit assourdissantes et méga-concerts nous promettent. L’été, nos oreilles sont en danger.

SvetaZi / iStock

Phil Collins, Eric Clapton, Pete Townshend, le guitariste des Who, Barbra Streisand en sont des victimes célèbres, mais les valeureux soldats touchés dans la fosse d’orchestre se comptent par dizaines de milliers.

Il n’y a pas si longtemps que le bruit le plus puissant que l’on pouvait rencontrer épisodiquement était un avion au décollage. Ce record est désormais largement battu par bon nombre de groupes lors de méga-concerts, mais également des discothèques mal contrôlées ou encore de nombreuses soirées techno. Avec en prime, à la sortie, un sifflement désagréable qui, heureusement, ne dure que quelques heures.

Acouphènes, quand le bruit vient de l’intérieur

Si le sifflement persiste, il s’agit d’une urgence qui nécessite l’intervention d’un spécialiste. Au-delà d’une semaine, on est face à un acouphène. Des bourdonnements, des tintements, des sifflements ou des chuintements, gâchent la vie de plus de 3 millions de Français, dont 600 000 trouvent ces acouphènes agressifs et insupportables. Des chiffres en constante augmentation car le niveau sonore, de plus en plus élevé dans notre société, génère 200 000 nouveaux cas chaque année. La plupart de ces douleurs pourraient être évitées, tout simplement en mettant en garde les enfants. Par exemple contre les baladeurs : depuis 1996, la loi impose une limite de 100 décibels. Un niveau déjà insuffisant. Un restaurant scolaire ou un carrefour routier très fréquenté représentent 95 décibels. Personne n’y resterait des heures entières. Pourtant, il n’est pas rare de voir les adolescents utiliser, pendant des heures, leurs baladeurs qu’ils débrident à 120 décibels et plus, c’est-à-dire tout proche du seuil de douleur, donc de destruction, car l’oreille est un organe qui sait résister en se détériorant sans provoquer de souffrance.

Insupportable

L’acouphène est vite insupportable ; parce qu’on ne « peut pas ne pas entendre » : impossible, à la différence des yeux, de fermer ses oreilles. Celui qui souffre ne se sent pas à l'origine du bruit et ne peut l’accepter : le cliquetis du stylo du voisin, en réunion, ne gêne jamais celui qui le génère. Enfin, la tolérance baisse au fil du temps : on supporte de moins en moins le bruit d’une perceuse. On connaît mal l’origine de ce symptôme dont les mécanismes sont inconnus. La plupart du temps, malgré des examens complémentaires nombreux, on ne retrouve rien. Pour soulager ces malades souvent épuisés, la mauvaise habitude de la plupart des médecins consiste à proposer, selon le principe du bruit que l’on finit par ne plus entendre par habitude, comme la circulation automobile au dehors d’un appartement, de supporter une gêne, pourtant définie la plupart du temps comme insupportable. Votre médecin ne dispose d’aucun médicament spécifique. Il fera avec ce qu’il a, sans aucune garantie d’efficacité, car la plupart ont plus d’effets indésirables que d’effets positifs… Le recours au psychiatre, mal perçu, est souvent inutile.

Reste une méthode qui peut paraître un peu barbare : combattre le bruit par le bruit : musique le soir à l’endormissement ou, solution plus moderne, le « masqueur » d’acouphènes. Il s’agit d’une prothèse que l’on se met dans l’oreille et qui produit un bruit plus agréable pour l’oreille que celui de l’acouphène. Une forme de méthode Coué… Aucune solution n’est totalement efficace, mais les possibilités de soulagement suffisamment nombreuses pour ne pas se résigner.

La prévention est facile mais essentielle

Il faut répéter ces conseils simples : plus d’une heure d’écoute d’un baladeur débridé par jour fait dépasser le seuil limite. En discothèque, il faut sortir s’aérer les oreilles toutes les 30 minutes. S’il devient impossible de comprendre ce qu’il se dit à 1 mètre, c’est que le niveau dépasse 105 décibels ; un signe d’alarme important : il faut donc s’éloigner, mettre une protection discrète – en vente dans toutes les pharmacies – ou au pire, un morceau de coton. Mieux vaut être ringard que traumatisé…