C’est une expression que l’on entend de plus en plus, sans forcément en comprendre le sens. Gilles Mithieux, neuroscientifique et directeur de recherche au CNRS, nous explique pourquoi "l’intestin est notre deuxième cerveau" et comment il peut être une source de bien-être psychologique.
LightFieldStudios / istock.
Publié le 11.01.2023 à 12h00
|
|
|
|
- Mieux Vivre Santé : Selon un nouveau sondage, 40% des Français ne comprennent pas pourquoi ils entendent de plus en plus que "l’intestin est notre deuxième cerveau". Quelle est l’origine de cette expression ?
Gilles Mithieux - L’intestin est désigné comme tel parce qu’il contient un milliard de neurones, ce qui représente 10% de l’ensemble de ce type de cellules présentes dans notre corps et en fait le deuxième organe qui en génère le plus, juste après le cerveau.
- Pouvez-vous nous expliquer concrètement par quels mécanismes biologiques le cerveau impacte les intestins et vice et versa ?
L’intestin contient énormément de nerfs, qui communiquent entre le cerveau central et le cerveau intestinal. Je précise que les échanges se font dans les deux sens : il y a par exemple des informations de type nutritionnel qui remontent de l’intestin vers le cerveau et à l’inverse, le cerveau peut réguler un certain nombre de fonctions intestinales, comme par exemple la motilité (en l’accélérant ou en la ralentissant).
- Dès lors que ces deux organes sont liés, prendre soin de nos intestins peut-il augmenter notre bien-être psychologique ?
Complètement. Par exemple, il y a des aliments qui vont communiquer au cerveau des sensations de bien-être et diminuer l’anxiété : je pense notamment aux fibres contenues dans les légumes et les fruits. D’autres produits peuvent en revanche avoir des effets stressants ou dépressifs, comme par exemple les aliments riches en gras et en sucre rapide.
Une bonne alimentation peut aussi influencer des comportements plus complexes, comme améliorer la mémoire ou la capacité du cerveau à faire des calculs simples.
- Même question concernant notre cerveau : en prendre soin peut-il engendrer des bénéfices physiques au niveau de notre intestin ?
Oui. Par exemple, si vous êtes stressé, vous allez mal digérer vos repas, et inversement.
- Concrètement, comment préserver notre cerveau et notre intestin ?
Je conseille d’abord d’avoir une alimentation bien équilibrée, riche en fruits, en légumes et en protéines. Il est ensuite important de faire régulièrement de l’exercice physique, qui est bénéfique pour l’ensemble des organes. Tout ce qui touche à la méditation peut aussi chez certaines personnes être bon pour les intestins et le cerveau. Enfin, il faut éviter au maximum de se placer dans des situations génératrices de stress, comme peuvent parfois en provoquer le travail ou les réseaux sociaux par exemple, et savoir se reposer quand c’est nécessaire.
- Reste-t-il encore des inconnues aujourd’hui concernant les liens entre le cerveau et l’intestin ?
Oui, c’est d’ailleurs la thématique de mon laboratoire. Il y a encore beaucoup à comprendre, comme par exemple comment est-ce que les nerfs intestinaux détectent les informations et les transmettent au cerveau. Prenons le cas des hormones "coupe faim" produites par l’intestin à la fin des repas : sont-elles identifiées par le cerveau directement via le sang ou par le système nerveux gastro-intestinal ? Mystère.
Vous aimez cet article ? Abonnez-vous à la newsletter !