- Mieux Vivre Santé : Le blanchiment dentaire est aujourd’hui très à la mode et les méthodes semblent diverses. Mais, de quoi parle-t-on réellement lorsque l’on parle de blanchiment dentaire ?
Docteur François Lescuyer : Lorsque l’on parle de blanchiment dentaire, typiquement on entend par-là l’application de péroxyde d’hydrogène qui se fait soit au fauteuil et pratiquée par un professionnel de santé, soit en ambulatoire avec des gouttières et c’est donc le patient qui s’en charge.
Pour ce qui est du reste, c’est-à-dire les facettes en céramique ou le travail avec des résines, il s’agit de prothèses et non de blanchiment. Bien sûr, on obtiendra un résultat esthétique puisqu’elles viendront modifier la morphologie et la teinte des dents mais elles ne blanchiront pas directement les dents.
- Ces différentes méthodes, qu’il s’agisse de blanchiment stricto sensu ou non, se valent-elles toutes ?
Non pas forcément puisque comme vous l’aurez compris, elles répondent à des besoins différents.
Prenons les facettes, elles peuvent être intéressantes car elles permettent une maîtrise complète du projet esthétique. Contrairement au blanchiment qui ne permet de savoir qu’elle sera la teinte obtenue à la fin (cela dépend de la biologie du patient), avec les facettes on définit précisément la forme et la couleur des dents au début du projet.
En revanche, leur inconvénient se trouve dans leur côté iatrogène et abrasif puisqu’il y a quand même une taille sur la dent naturelle. Or, même si elle est minime et n’endommage pas la vitalité de la dent, elle reste irréversible. La technique est donc invasive contrairement au blanchiment qui l’est très peu.
Pour ce qui est de la résine, il en existe divers types, mais l’on commence à avoir de plus en plus recours à la résine à très basse viscosité. Cette dernière permet de traiter les taches en les faisant disparaître. Le processus donne donc lieu à un éclaircissement des dents mais il ne s’agit pas d’un blanchiment, puisque la résine intègre ici la dent.
Pour ce qui est du déroulé et de la longévité des traitements, bien entendu ils varient. Pour un blanchiment en fauteuil, personnellement je procède à une grosse séance d’1h15 avec deux applications de péroxyde et quinze jours plus tard, si le résultat obtenu n’est pas suffisant, je propose une seconde séance. Côté longévité du traitement, une séance tous les deux ans est suffisante.
Pour le blanchiment ambulatoire cela dépend du produit, mais généralement se déroule sur quinze jours. Durant ces quinze jours, le patient porte les gouttières trois heures par jour.
Maintenant, si l’on veut obtenir un résultat esthétique qui bouge très peu, alors mieux vaut avoir recours aux facettes céramique dont la teinte ne changera pas avec le temps. Ainsi, sans problème particulier, elles peuvent durer au minimum vingt à trente ans et au maximum, vous les avez pour la vie.
- Vous venez d’expliquer les différentes méthodes, mais, est-ce vraiment pour tout le monde ? N’y a-t-il pas des contre-indications ?
Le blanchiment dentaire ainsi que les autres techniques mentionnées plus haut sont avant tout esthétiques, c’est donc le patient qui décide. C’est très subjectif, seul le patient peut estimer qu’il en a besoin ou non, ça ne dépend pas du professionnel de santé.
Ensuite, en ce qui concerne les contre-indications pour le blanchiment au péroxyde d’hydrogène, on évitera d’y avoir recours sur une bouche qui n’est pas saine. S’il y a des problèmes parodontaux, des caries, etc… il faut absolument les soigner en amont. Par ailleurs, si la bouche est saine mais que la personne souffre d’hypersensibilités au froid, au chaud, au sucre… on s'abstiendra également de faire un blanchiment puisque celui-ci pourrait les accentuer.
- Si les blanchiments dentaires et autres techniques conduisant à un sourire plus blanc sont généralement pratiquées par des professionnels de santé, à l’heure actuelle les bars à sourire fleurissent un peu partout. Pour autant, n'est-il pas fortement déconseillé de s’y rendre ?
Effectivement, depuis plus de dix ans, on voit les bars à sourire se répandre un peu partout. Ce boom a poussé l’Etat à légiférer très rapidement sur la question. Ainsi, depuis 2011, ces lieux n’ont pas le droit d’utiliser du péroxyde d’hydrogène.
Cette décision a été prise en raison de la potentielle toxicité du péroxyde d’hydrogène. Effectivement, lorsqu’il est très dilué (moins de 0,1%) il est peut être utilisé dans le privé, mais lorsque son taux dépasse les 1% il ne peut être manié que par des professionnels. En ce sens, les solutions utilisées dans les bars sont très peu dosées, et les résultats sont donc assez minimes.
En ce qui concerne les risques, on ne risquera jamais sa vie, on ne développera pas de cancer, mais il peut y avoir un risque d’inflammation des muqueuses respiratoires ou digestives ou encore un risque d’hémorragies locales.
Par ailleurs, lorsque le blanchiment n’est pas pratiqué par un médecin, il y a toujours le risque de créer des sensibilités dentaires ou encore d’accentuer des problèmes qui étaient déjà présents. C’est pour cette raison qu’il vaut mieux faire appel à un professionnel.
- Enfin, n’existe-t-il pas des manières de blanchir ses dents soi-même ? Quels en sont les bons points et les risques potentiels ?
Les principales astuces auxquelles on peut avoir recours soi-même pour blanchir ses dents sont le bicarbonate, le charbon ou encore le citron. Aucune ne donne lieu à un réel blanchiment, elles permettent simplement de retirer les pigments alimentaires qui peuvent venir jaunir les dents. En d’autres termes, elles nous permettent de retrouver la teinte naturelle de nos dents.
Maintenant, on peut s’intéresser à chacune de ces méthodes. Le bicarbonate, au-delà d'être une poudre abrasive, va également agir sur les problèmes de gencives en neutralisant, en quelque sorte, les bactéries. Cependant, il ne faut surtout pas s’en servir trop souvent. Effectivement, en s’en servant trop souvent et avec une brosse à dents trop dure, on risquerait d'abîmer notre gencive qui est un tissu très fragile et donc, de créer des sensibilités.
Cela étant dit, s’il est plus abrasif que le dentifrice habituel il l’est moins que le dentifrice au charbon. Sans pour autant déconseiller l’utilisation du charbon, tant il est abrasif, je pense qu’il est bon de la réduire au maximum et de ne s’en servir, par exemple, qu’avant un événement important.
Vient ensuite le citron dont je déconseille fortement l’utilisation car il est bien trop acide. En effet, son acidité attaque l’émail et donne lieu à des lésions acides blanches qui sont irréversibles. Il en va de même pour les cures de jus de citron que l’on prend parfois le matin : leur effet sera le même, je les déconseille donc grandement aussi.
De plus, en ce qui concerne les kits de blanchiment dentaire que l’on fait à domicile sans suivi médical, je ne peux pas dire qu’ils soient bons ou mauvais mais il vaut toujours être suivi par un professionnel. En outre, si l’on s’en sert trop souvent, on peut là aussi créer une porosité de l’émail et endommager notre capital santé.
Enfin, je tiens tout de même à rappeler qu’une pose de facettes, bien plus qu’un blanchiment, ne doit pas se faire sur un coup de tête mais doit découler d’une gêne profonde. Aujourd’hui avec Instagram et autres on veut toujours être “mieux”, mais ne pas avoir des dents aussi blanches que les stars américaines n’est pas dramatique !