Le taux d’échec contraceptif est 22 fois plus élevé avec une pilule ou un patch qu’avec un contraceptif de longue durée, stérilet ou implant. Une étude américaine publiée dans une revue médicale de référence, le New England Journal of Medicine, confirme le fossé entre l’efficacité théorique, qui plaide en faveur de la pilule et l’efficacité réelle, plombée notamment par les oublis. « Personne ne peut prendre un médicament à heure fixe tous les jours sans jamais oublier, c’est une évidence dont tous les médecins sont conscients. Pourtant, ils n’expliquent pas systématiquement que faire en cas d’oubli lorsqu’ils prescrivent la pilule à une patiente », regrette Marie-Pierre Martinet, secrétaire générale du Mouvement pour le planning familial. Même si la pose d’implant contraceptif est en hause, la pilule reste la méthode contraceptive la plus répandue avant 40 ans. Tous âges confondus (1), les femmes sont deux fois plus nombreuses à utliser la pilule (56%) que le stérilet (26%). La socio-démographe Nathalie Bajos, co-auteur de l’Enquête sur la sexualité en France, évoque même un parcours contraceptif devenu la norme : préservatif en début de relation, pilule en couple puis stérilet, quand on a eu les enfants désirés.
Comment expliquer que nous ayons adopté comme norme un mode contraceptif aussi propice à l’échec ? Historiquement, la France s’est ouverte à la contraception à travers la pilule en 1967 alors que d’autres pays qui l’avaient légalisé plus tôt ont mis en avant d’autres contraceptifs. Depuis, la prédominance de la pilule s’est ancrée.
Marie-Pierre Martinet, secrétaire générale du Mouvement pour le planning familial : « On favorise une contraception facile à interrompre chez les femmes en âge de procréer »
Le corps médical a même contre-indiqué jusqu’en 2004 la pose de stérilet chez les femmes n’ayant pas encore eu d’enfant. Aujourd’hui, la seule restriction concerne les très jeunes femmes, pour éviter qu’elles ne débutent leur vie contraceptive par un acte invasif qui leur impose un examen gynécologique. Ce caractère invasif des stérilets et des implants peut d'ailleurs rebuter à tous les âges.
Dr Elisabeth Aubény, gynécologue et présidente de l’Association française pour la contraception : « Elles ne veulent pas qu’on leur implante un corps étranger »
C’est au cours d’une véritable consultation dédiée au choix de la contraception que ces craintes peuvent s’exprimer. Une consultation délicate pour des médecins très novices en matière de contraception.
Marie-Pierre Martinet: « Les médecins ne sont formés qu’aux complications éventuelles pas au processus de choix »
Spécialistes et associations en conviennent, la meilleure contraception est celle que l’on choisit. Mais pour que le choix soit possible pour chaque femme, il faudrait qu’elle puisse s’affranchir des questions financières. Autrement dit que les remboursements des contraceptifs longue durée par l’Assurance Maladie soient au même niveau que ceux des différentes générations de pilule. Dans le cas des adolescentes, garantir un vrai choix du contraceptif nécessite également la confidentialité, qui doit normalement être garantie par la loi.
Pr Israël Nisand, chef du pôle de gynécologie-obstétrique du CHU de Strasbourg : « La confidentialité n’est possible que dans les centres de planifications »
Israël Nisand avait rendu en février 2012 à Jeanette Bougrab, l’ancienne secrétaire d’état à la Jeunesse, un rapport plaidant pour la gratuité et la confidentialité de la contraception des jeunes. Il préconisait également un plus large recours à l’implant contraceptif chez ces jeunes femmes pour éviter l’IVG. « François Hollande a demandé à me rencontrer à cette occasion, nous avons longuement parlé et je l’ai senti en accord avec nos propositions », raconte le gynécologue alsacien. « J’ai bon espoir que le nouveau gouvernement n’en reste pas là. Personne ne peut se satisfaire de 90 000 grossesses non souhaitées chaque année chez les moins de 25 ans.»
En savoir plus
www.choisirsacontraception.fr/