Plusieurs milliers de personnes, en grande majorité des femmes de tous âges, ont manifesté ce samedi à Madrid (Espagne) pour la défense du droit à l'avortement. Pour la deuxième semaine consécutive, ces manifestants s'insurgaient contre le projet gouvernemental de la droite conservatrice espagnole (PP) qui prévoit de restreindre le droit à l'IVG des femmes. Défilant devant le ministère de la Justice, ils réclamaient aussi la démission du ministre Alberto Ruiz-Gallardon, qui porte ce projet de loi.
Dans ce contexte, pourquoidocteur a récemment interrogé les médecins français sur le climat actuel dans notre pays. Majoritairement, ces professionnels de santé s'accordaient pour dire qu'il n'y a pas de menace en France vers un retour en arrière. Eux préféraient plutôt parler des difficultés d'application de la loi Veil sur l'IVG, selon les régions françaises. Aucun parti politique ne remet en cause ce droit, et s'ils se hasardaient à le faire, ils se heurteraient à une franche opposition des Français. En effet, selon un sondage Ifop paru dans Sud-Ouest Dimanche, les Français sont largement plus favorables à l'IVG en 2014, qu'il y a quarante ans.
3 Français sur 4 favorables à l'IVG sans restriction
Selon l'Ifop (1), qui a comparé les résultats de deux sondages effectués à 40 ans d'intervalle, 75 % des Français se disent favorables à l'IVG sans restriction en 2014, contre 48 % en 1974. Le sondage de 1974 avait été réalisé quelques mois avant l'adoption de la loi Veil du 17 janvier 1975 sur l'interruption volontaire de grossesse. Et en 2014 comme en 1974, les hommes et les femmes sont sur la même longueur d'ondes.
Moins de Français veulent imposer des restrictions
Par ailleurs, les Français qui estiment nécessaire d'imposer des restrictions au droit à l'avortement pour les femmes sont également moins nombreux en 2014 qu'en 1974. Ainsi, 19 % assurent en 2014 qu'il faut circonscrire l'IVG à "certains cas limités et précis", contre 25 % en 1974.
De plus, il ne sont plus que 6 % à penser que l'IVG ne peut être permise "que dans un seul cas, lorsque la vie de la femme est en danger", contre 24 % en 1974. « C'est sur cette position radicale que le recul est le plus important, -18 points », relève l'article de Sud-Ouest Dimanche.
Les clivages liés à l'âge se sont estompés
En outre, en 40 ans, les forts clivages qui existaient en fonction de l'âge des répondants se sont largement estompés. En 1974, les moins de 35 ans étaient favorables à 53 % à l'IVG, contre seulement 35 % des personnes âgées de 65 ans et plus. En 2014, ces deux générations se rejoignent très exactement, se déclarant toutes deux favorables à 77 % à l'IVG. Aujourd'hui, ces deux générations sont d'ailleurs les populations les plus favorables à l'IVG sans restriction.
La religion, élément essentiel des opposants à l'IVG
Enfin, actuellement, « d'autres clivages sont à l'oeuvre sur cette question », relève l'Ifop dans son document. « L'opposition à un accès sans condition à l'IVG se structure d'abord sur une appartenance religieuse et, en second lieu, selon la sympathie partisane », indique l'institut de sondage.
Ainsi, en 2014, 47 % des catholiques pratiquants sont partisans de l'instauration de conditions d'accès contre 25 % dans l'ensemble de la population, note l'Ifop.
L'institut ajoute aussi que si les catholiques pratiquants se révèlent être le groupe social le moins libéral sur l'IVG, une courte majorité d'entre eux (53 %) est néanmoins favorable à une liberté totale d'avortement, alors que ce n'était le cas que de 37 % des catholiques pratiquants interrogés en 1974.
De même, les personnes les plus réfractaires à l'égard du droit à l'avortement ne représentent aujourd'hui que 13 % des catholiques pratiquants, "soit 17 points de moins qu'à la veille du vote de la loi Veil", conclut l'Ifop.
(1) Le sondage 2014 Ifop pour Sud-Ouest Dimanche a été réalisé en ligne du 5 au 7 février auprès d'un échantillon de 1.016 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus (méthode des quotas).