Que faire spécifiquement en cas de suspicion de rage ?
La rage est une « zoonose » (une maladie transmise de l’animal à l’homme) virale et potentiellement mortelle si la personne mordue n’est pas prise en charge correctement. Le virus de la rage infecte des animaux domestiques et des animaux sauvages et est transmis à l’homme par la salive des animaux infectés lors d’une morsure ou d’une égratignure.
• Le chien est le principal hôte et vecteur du virus rabique. Aux États-Unis d’Amérique et au Canada, la plupart des cas de rage humaine sont causés par les chauves-souris, ce qui est aussi devenu le cas en Australie, en Amérique latine et en Europe occidentale. La transmission de l’animal à l’homme peut aussi se produire par contact direct de salive avec des muqueuses ou une blessure non cicatrisée sur la peau de l’homme. La transmission interhumaine par morsure est théoriquement possible, mais n’a jamais été confirmée.
• La période d’incubation de la rage est généralement de 1 à 3 mois, mais peut aussi durer moins d’une semaine à plus d’un an. La maladie se manifeste d’abord par de la fièvre et, souvent, des douleurs ou des fourmillements, des démangeaisons et des brûlures à l’endroit de la blessure.
La propagation du virus dans le système nerveux central peut entraîner une inflammation progressive et mortelle du cerveau et de la moelle épinière avec des signes neurologiques de type hyperactifs (« hydrophobie », épilepsie) ou paralytiques (paralysie ascendante évoquant un syndrome de Guillain-Barré). Le décès survient dans tous les cas en quelques jours par arrêt cardiorespiratoire. Dans 30 % environ des cas humains, la rage se présente sous sa forme « paralytique ». Les muscles sont progressivement paralysés, à partir de l’endroit de la morsure ou de l’égratignure. Les cas de rage paralytique sont souvent mal diagnostiqués et donc sous-notifiés.
• En termes de diagnostic, il n’existe pas de test permettant de diagnostiquer la rage avant le début de la phase clinique. Le diagnostic clinique peut être confirmé intra-vitam et post-mortem par diverses techniques de laboratoire qui détectent le virus entier, l’antigène du virus ou des acides nucléiques dans les tissus infectés (encéphale, peau) ou dans l’urine ou la salive.
• La prévention ou « prophylaxie post-exposition » (PPE) prévoit le traitement de la plaie, le plus rapidement possible après l’exposition et la mise en place d’un traitement efficace peu de temps après l’exposition au virus. La PPE permet d’éviter l’apparition des signes de la rage et le décès.
La PPE doit être initiée sans délai en cas de morsure par un chien ou un chat malade, ayant disparu ou de propriétaire inconnu, ou en cas de morsure par un animal en provenance ou ayant séjourné dans les douze derniers mois dans une zone de rage terrestre. Dans cette dernière situation, elle pourra être stoppée après dix jours si l’animal gardé en observation reste en bonne santé.
La suppression du virus de la rage, par des moyens chimiques ou physiques (eau savonneuse, un détergeant ou un désinfectant) de la plaie est un moyen efficace de protection. Les premiers soins recommandés sont le nettoyage immédiat de la plaie pendant au moins 15 minutes avec de l’eau et du savon, un détergent, de la « povidone iodée » ou d’autres substances qui tuent le virus de la rage.
Après déclaration, il est nécessaire d’administrer une série de doses d’un vaccin antirabique à la personne mordue, si l’animal mordeur développe la rage en observation. Dans certains cas, l'administration d’immunoglobulines antirabiques peut être indiquée.
Que faire spécifiquement en cas de morsure de serpent ?
La majorité des morsures de vipère présentent une évolution clinique peu sévère. Des symptômes graves d’envenimation ne se développent que dans 10 à 20 % des cas. La gravité des symptômes dépend de la quantité de venin injectée et de l’état de la personne mordue. Une morsure est plus grave chez l’enfant car la quantité de venin injectée par kilo de poids corporel est plus grande que chez l’adulte.
• En France, la vipère est le seul serpent venimeux. Néanmoins, la moitié des morsures se font sans injection de venin et elles sont exceptionnellement mortelles (un à trois cas par an en France).
Il faut savoir faire la différence entre une morsure de vipère et celle d’une couleuvre (qui n’est jamais venimeuse). La morsure de la vipère se caractérise par deux piqûres, comme si deux crochets s’étaient plantés dans la peau.
Le venin est un cocktail complexe de protéines ayant des propriétés toxiques et enzymatiques. La présence d’enzymes protéolytiques rend la morsure douloureuse et entraîne des lésions des tissus mous, des lésions des capillaires et des troubles de la coagulation. La hyaluronidase facilite la dispersion du venin dans les tissus sous-cutanés. L’injection de venin provoque également dans l’organisme une libération d’histamine, de bradykinine, de prostaglandines et de sérotonine responsables des effets généraux.
A l’étranger, il faut se renseigner sur les anti-venins disponibles, et une fois sur place, on peut se les procurer avant de partir en randonnée.
• Les signes locaux surviennent entre 30 minutes et quelques heures après la morsure. Il existe des signes locaux et des signes généraux.
Les crochets laissent théoriquement deux lésions punctiformes espacées de quelques millimètres, à plus de 1 cm en fonction du développement de l’œdème, mais les marques de crochets peuvent aussi être masquées par l’œdème ou l’hématome. Il peut aussi n’y avoir qu’une seule marque de crochet.
La douleur locale est immédiate et intense, un œdème apparaît rapidement et s’étend progressivement dans les 48 à 72 heures qui suivent la morsure. L’importance de l’œdème local est corrélée à la gravité de l’envenimation. L’œdème peut s’étendre à tout le membre et au tronc. Des bulles, des bleus (« ecchymoses »), des petites taches violacées (« zones purpuriques ») et un gonflement des ganglions satellites (« adénopathies régionales ») peuvent apparaître.
Les premiers signes généraux d’une envenimation sont digestifs et cardiovasculaires et les autres signes apparaissent plus tardivement : d’abord, nausées, vomissements, diarrhée, hypotension artérielle, accélération du rythme cardiaque (« tachycardie »), puis, contractures musculaires ou troubles respiratoires. Dans les cas graves et chez l’allergique, l’œdème s’étend au-delà du membre mordu (œdème de Quincke, bronchospasme, choc anaphylactique) et un état de choc ainsi que des troubles de la coagulation avec des saignements peuvent survenir.
• En cas de morsure par un serpent, il faut immédiatement appeler le 15 ou le 112 et allonger la victime en attendant les secours. Il est inutile et dangereux de tenter d’aspirer le venin avec la bouche ou d’inciser la plaie. Il vaut mieux utiliser un système de pompe aspirante (Aspivenin) qui est parfois disponible dans les refuges, les pharmacies et les hôpitaux : cet appareil peut être efficace pour les morsures superficielles mais cela reste modeste.
Pour soulager la douleur et limiter le gonflement, il est possible d’appliquer sur la plaie de la glace, dans un sac plastique entouré d’un linge propre. Un antidouleur (« analgésique ») à base de paracétamol ou un opiacé peut être pris si nécessaire, mais il faut éviter l’aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens en raison du risque de saignements.
Que faire spécifiquement en cas de morsure de rat ?
• La « Rat-bite fever » est une infection généralement transmise par la morsure d’un rat. Elle est en rapport avec des bactéries de la flore de la gueule des rongeurs : Streptobacillus moniliformis (Europe, Etats-Unis) ou Spirillum minus (Asie).
Alors que la plaie est guérie, survient une fièvre accompagnée de maux de tête (« céphalées »), vomissements, de douleurs musculaires (« myalgies ») et articulaires (« arthralgies ») migrantes. Quelques jours plus tard, apparaît une éruption « maculo-papulaire » (plaques ou boutons rouges) touchant les extrémités, les paumes et les plantes de pied. La moitié des patients vont souffrir d’une polyarthrite asymétrique ou d’une arthrite infectieuse « septique ».
La fièvre se résout spontanément en trois à cinq jours, mais peut récidiver pendant des semaines à des mois.
En l’absence d’antibiothérapie, des complications (pneumonie, hépatite, pyélonéphrite, endocardite) sont possibles.
Le diagnostic repose sur les cultures de sang (« hémocultures ») et la culture du liquide articulaire sur des milieux enrichis. La sérologie se positive dix jours après le début des symptômes avec un pic entre un à trois mois.
Le traitement de choix est la pénicilline.
• Le rat peut également être responsable de la leptospirose qui existe dans le monde entier. L’homme se contamine surtout par contact direct ou indirect avec des rats sauvages qui excrètent Leptospira dans leur urine. Ces bactéries pénètrent à travers les muqueuses intactes ou la peau blessée et se disséminent par voie hématogène.
La maladie a souvent un cours « biphasique » avec une première phase aspécifique (fièvre, céphalées, douleurs musculaires ou myalgies), puis une deuxième phase comprenant des maux de tête (« céphalées ») intenses et des douleurs du ventre (« douleurs abdominales »).
Dans 10 % des cas, la leptospirose évolue vers une forme sévère, le « syndrome de Weil », caractérisé par une insuffisance rénale et hépatique avec un syndrome hémorragique en rapport avec un trouble de la coagulation.
Le diagnostic de leptospirose est généralement posé sur la sérologie, qui devient positive après six à douze jours de signes. Une hémoculture ou une culture du liquide céphalorachidien permet d’isoler des leptospires pendant les dix premiers jours de la maladie, puis des leptospires apparaissent dans l’urine dès la deuxième semaine.
La pénicilline ou l’amoxicilline sont les traitements de choix.
Que faire spécifiquement en cas de suspicion de peste ?
Contrairement aux idées reçues, la peste n’a pas disparu et est causée par Yersinia pestis. La peste est largement répandue, y compris aux Etats-Unis (un petit rongeur du désert sert de réservoir), mais elle concerne surtout l’Asie et l’Afrique.
La peste peut se transmettre par la morsure d’un rongeur ou d’un prédateur ayant mangé des rongeurs infectés, ou lors du contact avec des tissus infectés.
Le malade se plaint de fièvre avec des de gros ganglions (« adénopathies ») tendus ou « bubons ».
Sans traitement, l’infection peut évoluer vers une infection du poumon (« pneumonie »), des méninges (« méningite ») et une infection généralisée (« septicémie »).
Le diagnostic repose sur la culture (hémoculture, prélèvement ganglionnaire, expectoration) et la sérologie.
Un traitement de gentamycine réduit la mortalité qui s’élève sinon à 50 %.