Des mots pour les maux
La sarcoïdose, ou maladie de « Besnier-Boeck-Schaumann », est une « lymphogranulomatose », c’est-à-dire une maladie caractérisée par la dissémination de « granulomes » à travers tout le corps
Qu'est-ce qu’une sarcoïdose ?
La sarcoïdose est une maladie auto-immune de cause inconnue. Elle peut toucher plusieurs organes, en particulier les poumons et les ganglions lymphatiques.
Cette maladie inflammatoire est caractérisée par la dissémination, à travers le corps d’amas de cellules immunitaires, appelés « granulomes ». Ces amas se forment principalement dans les poumons, mais ils peuvent toucher n’importe quel organe, et notamment les ganglions, les articulations, la peau, les yeux, le cœur, le système nerveux, les reins...
Trois grandes formes de sarcoïdose sont possibles : « thoracique pure » (atteinte isolée du poumon) qui touche 4 malades sur 10, « intra- et extra thoracique » (atteinte des poumons et d’autres organes dans le corps) dans 40 % des cas également, et « extra-thoracique pure » (pas d’atteinte des poumons et des ganglions du poumon) dans les 20 % restants.
Certains malades feront une seule poussée dans les poumons ou les ganglions du thorax, puis guériront, généralement au bout de 3 ans maximum, mais la sarcoïdose pourra toucher tous les organes, en moyenne 2 à 4 : yeux (« uvéites »), reins et peau… Au final, du fait de cette large diffusion et de cette variabilité, la maladie peut se présenter sous des aspects très divers.
Quels sont les signes de la sarcoïdose ?
Du fait de la grande diffusion des granulomes à travers le corps, les manifestations de la sarcoïdose peuvent être très variables et le diagnostic peut être difficile à poser.
• La maladie s’accompagne de signes généraux à type de grande fatigue, fièvre, sueurs nocturnes, manque d’appétit et perte de poids, voire des douleurs musculaires et articulaires.
• Les poumons sont touchés par la maladie dans 90 % des cas (« sarcoïdose pulmonaire »). Cependant, seul un tiers des personnes touchées se plaint de problèmes tels qu’une toux sèche persistante (30 % des cas), un essoufflement à l’effort (« dyspnée ») et une douleur dans la poitrine (« douleur thoracique »).
Plus rarement, le médecin retrouve des sifflements à l’auscultation des poumons (« sibilances »), qui sont souvent associés à une atteinte marquée des bronches, responsable d’une gêne respiratoire (« syndrome ventilatoire obstructif »). En cas d’atteinte pulmonaire sur la radiographie, d’autres bruits d’auscultation, les « râles crépitants » existent dans 15 % des cas.
Si on laisse évoluer une sarcoïdose avec atteinte pulmonaire active sans la traiter, cela peut aboutir à la formation de « cicatrices » dans les poumons, qui peuvent être responsables d’une gêne respiratoire définitive. On parle alors de « fibrose pulmonaire ».
De façon exceptionnelle, la sarcoïdose peut donner une « hypertension artérielle pulmonaire » qui aggrave la gêne respiratoire (« dyspnée ») et peut évoluer vers une insuffisance cardiaque prédominant à droite.
• Environ un tiers des personnes souffrant de sarcoïdose a une augmentation du volume des ganglions (« adénopathies »), surtout ceux du thorax, mais aussi ceux du cou, des aisselles, ceux situés derrière les clavicules, au niveau des coudes (ganglions « épitrochléens ») et ceux situés dans l’aine (les ganglions « inguinaux »). Les adénopathies du thorax sont indolores et ne donnent aucune gêne le plus souvent. Elle se diagnostiquent généralement sur une radiographie du thorax.
• L’atteinte de la peau est retrouvée chez près d’un malade sur 4, mais les lésions de la peau peuvent beaucoup varier d’un malade à l’autre.
Chez certaines personnes, surtout des jeunes femmes, la maladie débute par un « érythème noueux » : il s’agit de petites boules (« nodules »), de couleur rouge sombre, extrêmement douloureuses, siégeant surtout au niveau des jambes et qui peuvent s’accompagner d’un gonflement des articulations (arthrites des chevilles et des genoux essentiellement). Ces nodules peuvent être nombreux (jusqu’à 20 par jambe) apparaître et évoluer par poussées successives. Ils régressent spontanément en 2 à 3 mois dans la plupart des cas. Lorsqu’un malade souffre d’un érythème noueux associé à une augmentation de volume des ganglions thoraciques, on parle de « syndrome de Löfgren ». L’existence d’un érythème noueux est un signe de très bon pronostic car la maladie va régresser en moins de 2 ans dans la plupart des cas.
Il peut aussi exister d’autres types de nodules de la peau : les « sarcoïdes » qui sont des nodules de la peau constitués par un infiltrat de cellules conjonctives particulières et de cellules lymphoïdes, ressemblant à un nodule tuberculeux. Les sarcoïdes, qui peuvent être plus ou moins grosses, sont surtout présentes au visage et au thorax.
D’autres lésions cutanées peuvent exister, comme un « lupus pernio » (lésions en placards rouges ou violacés de la face) ou un changement de couleur des cicatrices (qui peuvent devenir rouges et douloureuses).
• Les douleurs articulaires (« arthralgies ») ou les gonflements articulaires (« arthrites ») sont fréquents. Ils sont dus à l’inflammation de la membrane qui tapisse les articulations (« synovite »). Les articulations les plus touchées sont les genoux, les chevilles, les coudes et les poignets. Ces douleurs ont un rythme inflammatoire (elles prédominent la nuit et le matin et s’estompent dans la journée) et peuvent concerner une ou plusieurs articulations en même temps, de manière plus ou moins symétrique, et accompagner un érythème noueux. Rarement, il est possible d'observer également des atteintes de la colonne vertébrale de type spondylarthrite.
Très rarement, la sarcoïdose peut entraîner des douleurs musculaires (« myalgies ») ou une faiblesse musculaire.
Dans quelques cas (1 à 2 %), la sarcoïdose peut concerner les os, surtout au niveau des mains et des pieds, provoquant des douleurs, une déformation progressive des doigts et une destruction progressive du bout des phalanges.
• L’atteinte de l’œil est relativement fréquente, puisqu’elle touche 10 à 25 % des personnes souffrant de sarcoïdose. Toutes les parties de l’œil peuvent être affectées. L’atteinte oculaire peut n’entraîner aucun signe, mais elle peut aussi être à l’origine de douleurs, brûlures, démangeaisons, rougeur, larmoiement ou au contraire sécheresse oculaire.
L’inflammation de la chambre antérieure de l’œil, appelée « uvée » est responsable d’une « uvéite ». Elle est souvent à l’origine de rougeurs, d’une sensibilité excessive à la lumière (« photophobie ») et d’une vision floue.
L’uvéite peut s’associer à de la fièvre, à un gonflement des glandes salivaires (qui deviennent douloureuses) et/ou à une paralysie faciale (impossibilité de faire des mimiques, de sourire, une moitié du visage étant figée). On parle alors du « syndrome d’Heerfordt ». Même si elles n’entraînent pas toujours de signes gênants, les uvéites doivent être surveillées car elles peuvent entraîner des complications graves (comme une perte de la vision).
Dans certains cas rares, la rétine (membrane sensorielle qui tapisse le fond de l’œil et sur laquelle sont « projetées » les images) ou le nerf optique (qui transmet les informations visuelles de l’œil au cerveau) sont le siège d’une inflammation. Ces atteintes peuvent être graves et peuvent provoquer une baisse rapide de la vision en l’absence d’un traitement adéquat. Elles nécessitent donc une prise en charge urgente.
• L’atteinte du cœur est rare (5 % des cas environ), mais grave. C’est l’une des localisations les plus graves de la maladie car elle s’accompagne, de façon exceptionnelle, d’un risque de mort subite au cours d’une crise cardiaque (« infarctus du myocarde »).
Elle est le plus souvent découverte lors du suivi médical des personnes souffrant de sarcoïdose, car elle entraîne rarement des signes cliniques : palpitations (troubles du rythme cardiaque), essoufflement lors des efforts, douleurs thoraciques ou malaises (vertiges, pertes de connaissance). En cas d’atteinte cardiaque sévère, les jambes peuvent gonfler (œdème).
• L’atteinte du foie est relativement fréquente (20 % des cas) mais n’entraîne pas systématiquement de signes. Une augmentation du volume du foie (« hépatomégalie ») peut être observée chez 10 % des malades et peut provoquer une sensation de gêne dans le ventre ou des douleurs du côté droit sous les côtes. Une coloration jaunâtre des yeux et de la peau (« ictère » ou jaunisse), ainsi que des démangeaisons (« prurit ») peuvent alors survenir.
Une augmentation du volume de la rate (organe situé en haut à gauche de l’abdomen) ou « splénomégalie » est également possible, ce qui peut aussi entraîner éventuellement des douleurs ou une sensation de pression.
• Les atteintes du système nerveux sont assez rares (moins de 10 % des malades) et peuvent être diffuses. Il peut s’agir d’une atteinte des nerfs crâniens, ce qui entraine une paralysie faciale (avec une moitié du visage paralysée et affaissée) ou une atteinte du nerf optique avec son risque de diminution de la vue. Il peut aussi s’agir d’atteintes du système nerveux central, avec des troubles des fonctions cognitives (mémoire, concentration, attention), ainsi que des maux de tête (« céphalées »), des troubles de la vision, des troubles psychiques (dépression, confusion, sautes d’humeur,…) ou encore des convulsions peuvent exister.
Lorsque les nerfs et la moelle épinière sont atteints, le malade peut ressentir un engourdissement ou des picotements dans un membre, des douleurs, une faiblesse voire une paralysie…
• Souvent des complications dues à des troubles du métabolisme du calcium peuvent être notées avec une augmentation du taux de calcium dans le sang (« hypercalcémie »), des lithiases rénales (avec calculs d’oxalate de calcium), une « néphrocalcinose » ou des pyélonéphrites.
• Il existe une multitude d’autres manifestations possibles, car tous les organes peuvent être atteints par le processus granulomateux : c’est le cas notamment de l’atteinte des reins (avec un risque d’insuffisance rénale), de l’atteinte de l’estomac et des intestins (avec des douleurs du ventre et un risque d’hémorragies), de l’atteinte de certaines glandes endocrines (diabète insipide avec une augmentation excessive de la sensation de soif (« polydipsie ») associée à une augmentation de la quantité d’urines émises (« polyurie ») ou atteinte de la thyroïde, ou un arrêt des règles chez les femmes ou une impuissance chez les hommes, de l’atteinte des glandes salivaires (parotide, sous-maxillaire) et lacrymales (sécheresse oculaire), formant le « syndrome de Mikulicz ».
Quelles sont les causes de la sarcoïdose ?
La cause exacte de la sarcoïdose n’est pas connue. Il pourrait s’agir d’une réaction excessive du système de défense immunitaire de l’organisme (maladie auto-immune) contre un élément étranger inconnu comme une substance environnementale ou une bactérie.
Les personnes qui développent une sarcoïdose pourraient être particulièrement sensibles à cet agent extérieur, à la différence du reste de la population et présenter une vulnérabilité d’origine génétique.
Le système immunitaire pourrait se dérégler et réagir de façon exagérée en provoquant des zones d’inflammation qui se traduisent par l’accumulation anormale de cellules (« granulomes »).
La sarcoïdose est une des rares maladies respiratoires qui soient moins fréquentes chez les fumeurs que chez les non-fumeurs, mais ce n’est pas une raison pour fumer.
Comment évolue la sarcoïdose ?
• La guérison de la sarcoïdose est obtenue spontanément dans la moitié des cas, en moins de trois ans : le diagnostic de guérison repose sur la disparition des anomalies cliniques, radiographiques et biologiques.
• Dans 15 % des cas environ, elle persiste et/ou des rechutes surviennent avec des complications graves. Elle peut parfois durer de 5 à 15 ans, et exceptionnellement plus de 15 ans. La complication la plus fréquente et la plus sévère est la fibrose pulmonaire, qui se caractérise par la formation de cicatrices fibreuses au niveau des poumons. Ces cicatrices sont secondaires à l’inflammation prolongée du poumon et elles aboutissent à réduire la capacité des poumons à enrichir le sang en oxygène (« oxygénation ») et rendent la respiration difficile. La fibrose pulmonaire est à l’origine de la majorité des décès dus à la sarcoïdose, même si ceux-ci restent rares. L’atteinte cardiaque peut également mettre la vie en danger.
• La sarcoïdose peut aboutir au décès dans un faible nombre de cas (fibrose pulmonaire et insuffisance cardiaque), mais l’espérance de vie est normale si le traitement est précoce et adapté.
• Un cancer du système lymphatique qui fait partie des défenses de l’organisme (« lymphome ») est plus fréquent chez les personnes atteintes de sarcoïdose que dans la population générale, sans que l’on sache pourquoi exactement (secondaire à l’hyperfonctionnement du système immunitaire ?).
Compte tenu de l’absence de critère pronostique sûr, la surveillance est nécessaire jusqu’à 3 ans après la guérison pour ne pas manquer une récidive dans un site initialement atteint ou dans une autre localisation.
Peut-on transmettre la sarcoïdose ?
La sarcoïdose n’est pas une maladie contagieuse, ni une maladie héréditaire : cette maladie n’est en aucun cas transmise directement des parents aux enfants.
Il est en revanche probable que certains gènes prédisposent à la sarcoïdose, c’est-à-dire que les personnes possédant ces gènes sont plus susceptibles que les autres de développer la maladie. C’est pourquoi les frères et sœurs d’une personne atteinte ont un risque plus élevé que la population générale de souffrir d’une sarcoïdose (« agrégation familiale »).