Toutes les hypercholestérolémies ne sont pas à traiter avec un médicament, et en particulier, surtout pas les formes secondaires (hypothyroïdie, cholestases, maladies du foie, insuffisance rénale…), qu’il faut éliminer auparavant.
Par contre, toutes les hypercholestérolémies doivent bénéficier d’une rééquilibration de l’alimentation, au détriment des graisses animales, et d’un développement de l’activité physique.
Le bénéfice de ces mesures est certain : dans les années 1970, le nord de la Finlande détenait le record mondial de la fréquence des infarctus du myocarde avec un taux cinq fois plus élevé que celui d'une ville comme Toulouse. Les pouvoirs publics ont pris la décision de transformer l'industrie laitière et de faire de l'éducation diététique quotidienne de la population : ils ont réussi à normaliser le taux de cholestérol 30 ans après. En France, en trente ans, les campagnes d’information sur le cholestérol et l’alimentation ont fait passer le taux moyen de cholestérol total de 6 g/l à 5,4 g/l, alors que parallèlement, la surcharge pondérale et l’obésité croissaient.
La prise en compte des autres facteurs de risque cardiovasculaire est essentielle (hypertension artérielle, diabète, tabagisme…) : un tabagisme éventuel doit être interrompu et un surpoids doit être corrigé.
Le développement d’une activité physique est également très important, car il améliore la façon dont le corps gère les aliments qui lui sont apportés. Il ne s’agit pas nécessairement de sport, cela peut être une augmentation de la marche quotidienne à plus de 10 000 pas par jour et la pratique d’une activité physique de loisir (danse, bicyclette…).
Les hypercholestérolémies qui sont à traiter avec un médicament sont donc uniquement celles qui persistent élevées en dépit d’un rééquilibrage de l’alimentation correctement respecté et celles qui s’accompagnent d’un risque cardiovasculaire majoré : or, c’est sur la définition de l’hypercholestérolémie à risque que la polémique s’est faite ces dernières années. Le nombre de malades à traiter va, en effet, varier très largement en fonction des critères de gravité qui seront pris en compte.
Parmi les facteurs de risque d'athérosclérose et d’accident cardiovasculaire, le cholestérol est un facteur très « rentable » à traiter car, du fait de la présence d’un « noyau de cholestérol » dans la plaque d’athérome, un traitement par un anti-cholestérol fait rapidement diminuer le volume de cette plaque, il agrandit la lumière de l’artère et il améliore le flux sanguin.
Le lien entre risque cardiovasculaire et taux sanguin de LDL-cholestérol est « continu », c’est-à-dire que le risque croît proportionnellement au taux de LDL-cholestérol dans le sang. Cette relation a été très largement démontrée par plusieurs très larges études de référence comme l’étude Framingham, l’étude européenne SCORE plus récemment, et également des études françaises. La plupart des controverses actuelles n’ont donc aucun fondement. Chez les sujets à risque élevé, les médicaments, en abaissant le taux de LDL, réduisent de 30% le risque d'accident cardiovasculaire. Mais les taux de LDL cholestérol ne sont pas seuls en cause. En France, comme ailleurs, quatre facteurs de risque principaux expliquent plus de trois quarts des événements coronaires aigus (cholestérol et dyslipidémies, hypertension artérielle, tabagisme et diabète). Il faut donc tenir compte du « terrain », c’est-à-dire des autres facteurs de risque cardiovasculaire associés et des antécédents familiaux. Dire que seuls les malades qui ont eu un infarctus doivent être traités est une assertion partisane, qui va contre une montagne de données scientifiques : par exemple, un diabétique dont l’hypercholestérolémie n’est pas traitée risque très gros, même s’il n’a pas eu l’accident cardiovasculaire que l'on cherche justement à éviter.
Mais toutes les hypercholestérolémies ne sont pas à traiter, et en particulier surtout pas les formes secondaires (hypothyroïdie, maladies du foie, insuffisance rénale…), qu’il faut éliminer auparavant.
Les hypercholestérolémies qui sont à traiter avec un médicament sont donc uniquement celles qui résistent au rééquilibrage de l’alimentation et qui s’accompagnent d’un risque majoré.
Il y a consensus sur les critères de risque qui font grimper le score de risque cardiovasculaire total : celui-ci est déterminé par une formule qui pondère l’importance des facteurs de risque (hypertension artérielle, âge, sexe masculin, diabète, tabagisme…). Cette pondération des différents facteurs de risque a été établie par 2 grandes études qui sont concordantes : l’étude de Framingham et l’étude européenne SCORE.
La formule du calcul du risque total combine plusieurs facteurs de risque et aboutit à un score de « risque absolu » élevé, soit parce que le taux de mauvais cholestérol est très élevé, soit parce qu’il y a des antécédents personnels ou familiaux d’accident vasculaire (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral…), soit parce qu’il y a une association à d’autres facteurs de risque, et en particulier le diabète.
Dans ce cas, les données scientifiques démontrent le bénéfice majeur d’un traitement hypocholestérolémiant, type statine, sur le risque de maladie cardiovasculaire et de décès précoce, sans aucune équivoque.
Les objectifs du traitement étaient autrefois définis en fonction du profil de risque et il s’agissait d’abaisser le risque jusqu’à un objectif qui n’était pas toujours atteignable, ce qui était frustrant pour les médecins et inquiétant pour les malades.
Les nouvelles recommandations américaines changent la donne : il n’y a plus d’objectifs thérapeutiques, mais des populations à risque et une gradation des moyens thérapeutiques. L’objectif général est d’abaisser le LDL-C d’au moins 50%. Les statines les plus puissantes sont donc conseillées en premier en cas d’athérosclérose, mais les statines génériquées qui réduisent les LDL-C de 30 à 50% sont utilisées en cas de mauvaise tolérance des premières ou dans les autres cas.
La suppression des objectifs chiffrés, inférieurs à 100 mg/dl ou même à 70 mg/dl, est liée au constat des experts qu’il n’y a pas de données randomisées démontrant leur intérêt en prévention primaire, comme en prévention secondaire. De plus, il n’y a pas grand-chose à dire à un malade qui a changé son style de vie à risque et qui prend correctement son traitement par statine. Mais il faudra continuer à doser le cholestérol pour l’observance.
Il y a donc désormais 4 principaux groupes de malades à traiter avec une statine, car les données scientifiques disponibles y démontrent un bénéfice qui dépasse très largement les inconvénients :
• Maladie cardiovasculaire par athérosclérose,
• LDL-cholestérol supérieur à 190 mg/dl, comme dans les hypercholestérolémies familiales,
• Diabète, même en l’absence d’athérosclérose, chez les malades entre 40 et 75 ans avec un LDL-C compris entre 70 et 189 mg/dl,
La 4e catégorie, en l’absence de maladie cardiovasculaire ou de diabète évident, repose sur le calcul du score de risque cardiovasculaire absolu et est encore en cours de discussion par la communauté scientifique : actuellement, le seuil d’intervention est trop bas et le risque de sur-traitement est réel : il est défini par un LDL-cholestérol compris entre 70 et 189 mg/dl et un score de risque cardiovasculaire à 10 ans supérieur ou égal à 7,5%.
La philosophie est donc bonne, mais c’est la position du curseur qui reste à déterminer exactement pour éviter d’élargir les indications du traitement médicamenteux à des personnes pour lesquelles le bénéfice du traitement hypolipémiant ne serait pas suffisant au regard de ses risques éventuels et du coût pour la société.
Le traitement diététique est un véritable traitement de l’hypercholestérolémie. Il ne s’agit pas d’un régime mais de la correction d’anomalies diététiques.
On parle de rééquilibration ou de correction des déséquilibres alimentaires ,car il ne s’agit pas d’un régime restrictif. Il s’agit avant tout de faire des modifications qui sont supportables au quotidien et à long terme.
Il faut réduire la surconsommation de graisse animales (poisson excepté) : la consommation de beurre en arrêtant de cuisiner au beurre (beurres végétaux ou huile) et en réservant une petite proportion de beurre par exemple pour le petit déjeuner ; il faut également réduire la consommation des autres graisses animales comme les charcuteries grasses (rillettes, saucisse, saucisson, pâté, lardons), ainsi que celle des fromages (en évitant d’en manger à tous les repas). Il faut par ailleurs augmenter la consommation de fibres à travers une majoration de la consommation de légumes, de céréales et de fruits, car ces fibres végétales réduisent l’absorption des graisses et donnent une bonne satiété. Il ne s’agit donc pas d’un régime d’éviction, il faut continuer à consommer des aliments qui contiennent des graisses d’origine animale, car ces aliments contiennent des éléments essentiels que le corps ne sait pas fabriquer, mais il faut juste en ajuster la consommation.
Beaucoup d’arguments plaident en faveur d’un « régime méditerranéen » riche en huile d’olive (huile « polyinsaturée »), mais ce n’est pas le seul. Il n’est pas non plus question de passer à un régime végétarien et si on aime le saucisson, on peut continuer à en manger, mais moins et moins souvent.
Le traitement hypocholestérolémiant, et en particulier les statines, est beaucoup remis en cause, alors que les preuves de son efficacité sont colossales.
Récemment, cette efficacité des statines a été réévaluée au travers d’une analyse combinée de 27 essais thérapeutiques contrôlés regroupant plus de 174 000 personnes avec hypercholestérolémie. La réduction des événements cardiovasculaires majeurs obtenue pour une réduction de 1 mmol/l de LDL est de 15 à 20% quel que soit le sexe, et cette réduction du risque reste du même ordre, que le risque cardiovasculaire initial soit élevé ou faible. Les statines sont aussi efficaces chez les femmes que chez les hommes, et cela aboutit à une réduction de la mortalité toute causes confondues. Par contre, il n’a été observé aucun impact sur l’incidence des cancers ou la mortalité non-cardiovasculaire, et ce, pour les 2 sexes.
D’autres composés que les statines sont utilisables, mais leur niveau de preuve scientifique est beaucoup plus faible (fibrates), ou il s’agit seulement de traitements additifs, comme l’ézétimibe qui inhibe partiellement l’absorption intestinale du cholestérol. D’autres traitements sont en cours de validation dans les hypercholestérolémies à très haut risque comme les hypercholestérolémies familiales : il s’agit d’inhibiteurs sélectifs du PCSK-9, une enzyme impliquée dans la régulation du cholestérol.
Par ailleurs, la réduction du taux de LDL cholestérol jusqu’à un niveau de risque bas peut être obtenue avec n’importe quelle molécule, y compris avec un générique. Le seul vrai problème en France, c’est le prix des génériques de statines qui reste très élevé. Aux Etats-Unis, un mois de traitement par une statine générique coûte le même prix qu’un café dans une chaîne de café bien connue.