Le trouble bipolaire est une maladie sévère, aux conséquences personnelles, familiales et sociales souvent douloureuses et parfois dramatiques (suicide). La maladie est en effet source de souffrance pour le malade et pour son entourage. Il est certain que des artistes, tel Charles Baudelaire, ont parfois décrit leurs phases de meilleure créativité « en sortie d’épisode dépressif », mais il n’y a aucune preuve que la création ait été faite grâce à l’hypomanie. C’est plutôt un leurre et la création s’est plutôt exprimée en dépit de la maladie, c’est-à-dire qu’elle a pu se manifester une fois que le frein de la dépression sur les fonctions intellectuelles a été levé.
Un des plus célèbres et des plus remarquables troubles bipolaires que l’histoire récente aient connue est Winston Churchill, dont la longue et prolifique carrière témoigne bien de la possibilité de vivre une vie riche et passionnante en dépit de cette maladie. Mais Winston Churchill a beaucoup souffert à certaines périodes de la maladie et pour éviter la souffrance et le handicap social, mieux vaut suivre un traitement sur le long terme.
Les épisodes, au fur et à mesure qu’ils se répètent, permettent au malade de repérer les signaux annonciateurs de ses rechutes, véritables signaux d’alerte et les éléments les favorisant. Il peut alors attirer l’attention de son médecin et discuter avec lui de la réponse qu’il faut apporter : repos, arrêt de travail, ajustement du traitement médicamenteux, hospitalisation…
Les troubles de la libido sont fréquents au cours du trouble bipolaire et ils doivent être pris en charge afin de ne pas perturber le suivi du traitement.
En phase maniaque, il est souvent observé une exacerbation de la libido, véritable désinhibition sexuelle : les pulsions se libèrent et certains fantasmes habituellement contrôlés s’expriment. Ces situations mènent parfois à des comportements sexuels à risques dont les conséquences peuvent être graves (SIDA).
A l’opposé, dans la dépression, la libido est atteinte et le désir disparaît. Enfin, entre les épisodes, les médicaments sont parfois à l’origine de difficultés sexuelles avec une perte du plaisir. Une adaptation du traitement et le recours à des traitements médicamenteux favorisant les érections chez les hommes peuvent permettre d’améliorer ces troubles qui sont difficiles à supporter et sont à l’origine de nombreux arrêts de traitement intempestifs.
La maladie bipolaire dans les accès aigus est souvent à l’origine de conflits ou de situations qui peuvent désorganiser complètement la vie familiale.
Pendant les phases dépressives, les proches se sentent impuissants face à cette grande souffrance qui semble impossible à soulager et les tâches de la vie courante leur retombent dessus. A l’inverse, pendant les phases maniaques ou hypomaniaques, les proches sont souvent des obstacles aux projets grandioses de l’accès d’excitation et il est difficile de suivre le rythme de vie du malade et de supporter les conséquences de l’accès maniaque (achats, provocations publiques, familiarité, adultère...).
L’entourage vit souvent dans l’anticipation anxieuse des rechutes, tout en supportant mieux les phases de dépressions que les phases d’excitation. Les malades sont souvent conscients qu’ils sont la cause de la souffrance de leur entourage. Au final, dans la crainte d’aggraver les conflits, le conjoint supporte plus ou moins ces comportements dont il aura à assumer les conséquences.
Outre les aspects financiers ou professionnels, ce sont les ruptures affectives qui marquent le plus profondément la vie des bipolaires. Dans les cas sévères et insuffisamment pris en charge, ou résistants aux traitements, les crises peuvent conduire aux séparations, à la solitude et à l’isolement alors qu’une situation affective stable serait un facteur protecteur contre les rechutes. Dans les situations extrêmes, le médecin traitant et le psychiatre doit rappeler aux malades et à leur conjoint qu’aucune décision définitive engageant la vie familiale ne doit être prise en période aiguë maniaque ou dépressive.
Ainsi, bien pris en charge, le malade bipolaire n'apporte pas de souffrance à son entourage, bien au contraire. Les personnalités bipolaires sont souvent généreuses, créatives, sensibles et la vie avec un « bipolaire » peut s'apparenter à une aventure affective mouvementée, avec ses peines mais aussi ses joies. Cet aspect est essentiel car c’est grâce au soutien des proches que le bipolaire va pouvoir comprendre sa maladie, déceler les signes annonciateurs des crises et à se fixer des objectifs de vie raisonnables.