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Douleur chez l’enfant

Douleur chez l’enfant : mieux l’évaluer pour bien la traiter

La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable qui correspond le plus souvent à un signal d’alarme à explorer. Jusqu’à une période récente, les nouveau-nés et les bébés étaient réputés peu sensibles à la douleur puisque l’expression de la douleur est difficile sans recours à la parole. Avec un ajustement des moyens d’évaluation en fonction de l’âge, le traitement devient plus adapté et plus efficace.

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Des mots pour les maux
Une douleur peut être aiguë ou chronique (plus de 3 mois). Entre les deux, on trouve la douleur subaiguë.
La douleur peut être liée à une stimulation des récepteurs de la douleur (piqûre, inflammation, brûlure…) : c’est la douleur « nociceptive ».
La douleur peut être liée à un dysfonctionnement du système de la douleur : c’est la douleur « neurogène » ou « neuropathique ».
La douleur cancéreuse est classée à part, car elle emprunte aux deux autres douleurs.

Qu'est-ce que la douleur ?

La douleur est une sensation complexe qui est indissociable de la conscience, ainsi que de l’émotion qu’elle suscite. La douleur est donc un phénomène subjectif qui repose avant tout sur le ressenti de l’enfant, ce qui la rend difficile à quantifier et à qualifier.
Il existe plusieurs types de douleurs, qui mettent en jeu un circuit neurologique particulier dans l’organisme. La douleur aiguë classique, ou « nociceptive », a essentiellement un rôle d’alarme qui va permettre à l’organisme de réagir et de se protéger face à une agression mécanique, chimique ou thermique. Dans beaucoup de cas, cette douleur est liée à une maladie qui fait intervenir la compression, la distension, la privation d’oxygène (« ischémie ») ou l’inflammation d’un organe, mais ce sont in fine les mêmes mécanismes.
Si la douleur devient chronique, le mécanisme est différent et fait intervenir un dysfonctionnement du système nerveux qui traite habituellement le message de la douleur (« circuits de la douleur »). La douleur devient dans ce cas une maladie à part entière et on parle de douleur « neurogène » ou « neuropathique ».
En cas de cancer, le mécanisme de la douleur est plus complexe et associe souvent des mécanismes neuropathiques et des mécanismes nociceptifs, en particulier compressifs et inflammatoires : on parle de « douleurs cancéreuses ».
Chez l’enfant, une douleur chronique peut avoir des effets négatifs durables sur sa santé : troubles du sommeil, perte de poids, ralentissement de la croissance... Pour cette raison, il faut systématiquement la soulager.

Comment est véhiculé le message de la douleur ?

Classiquement, un signal douloureux, que ce soit une brûlure, une piqûre ou un écrasement, par exemple de la main, va stimuler les terminaisons nerveuses de la peau (également présentes dans d’autres tissus : muscles, articulations, intestins, membrane autour de l’os, capsule articulaire, ligaments). Après avoir été stimulées, ces terminaisons nerveuses vont transmettre un message douloureux via des cellules nerveuses spécialisées : les « neurones nocicepteurs », jusqu’à la moelle épinière, site des premiers relais entre ces cellules nerveuses et les neurones suivants dans les « circuits de la douleur » du système nerveux central, puis au cerveau, jusqu’au « cortex cérébral », siège de la conscience. C’est uniquement dans le cerveau que ce signal est identifié comme une souffrance et une douleur.
Cependant, avant même que le cerveau n'ait conscience de ce signal douloureux, la main aura été écartée de la source de chaleur ou de piqûre grâce à un réflexe qui fait intervenir un « arc réflexe court » impliquant uniquement la moelle épinière (neurone « afférent » qui véhicule la douleur en lien direct avec le neurone « effecteur » de la contraction musculaire dans la moelle épinière). C’est également au niveau de la moelle épinière que les premiers systèmes de rétrocontrôle interviennent : il s’agit d’un mécanisme de protection contre la douleur qui implique des neurotransmetteurs, comme le « GABA », ou des « endorphines ». Dans certaines conditions, d’autres systèmes peuvent également exacerber l’information douloureuse.

Quels sont les signes de la douleur chez l’enfant ?

L’expression de la douleur chez les bébés et les très jeunes enfants est rendue difficile par l’impossibilité qu’ils ont de recourir à la parole.
La douleur des nouveau-nés se traduit essentiellement par des modifications du comportement. Les cris et les pleurs sont significatifs, mais aussi l’attitude générale, l’agitation ou, au contraire, une attitude particulière où l’enfant a moins mal (« attitude antalgique »), le refus d’être couché sur la zone douloureuse, une raideur du corps (« rejet en arrière »), les changements de teint (pâleur ou rougeur), les troubles du sommeil. Certaines douleurs sont parfois associées à des signes, comme la transpiration, les palpitations cardiaques et l’accélération du pouls et de la respiration, l’augmentation de la tension artérielle...
Si la douleur se prolonge, le visage de l’enfant devient inexpressif, il se tient immobile, il refuse de jouer et de communiquer et arrête de s’alimenter.
À mesure qu’ils grandissent, le bébé et le jeune enfant peuvent exprimer de plus en plus précisément leurs sensations douloureuses. L’acquisition de la parole facilite la désignation et la description des douleurs, mais pas au même niveau de détail que chez l’adulte.
Une douleur chronique peut avoir des effets négatifs sur la santé de l’enfant, avec troubles du sommeil, perte de poids, ralentissement de la croissance, qui vont parfois être au premier plan, voire résumer le tableau.

Comment les médecins classent-ils les douleurs ?

• Habituellement, la douleur est divisée en 3 catégories en fonction de sa durée. La douleur aiguë est d’apparition brutale, intense mais souvent brève : c’est ce qu’on ressent en se brûlant ou en se coupant le doigt, par exemple. La douleur est dite chronique lorsque la douleur persiste au-delà de trois mois. Il s’agit d’une douleur plus particulière, qui fait alors intervenir un dysfonctionnement des circuits neurologiques de la douleur, et dont le traitement est plus complexe. C’est pourquoi les médecins définissent, entre les deux, la douleur subaiguë, qui est une douleur qui dure au moins 6 semaines et moins de 3 mois et qui doit absolument être prise en charge pour éviter le passage à la chronicité. Cette douleur subaiguë ferait le lit de la douleur chronique, mais serait toutefois plus simple à traiter, ce qui permettrait de prévenir le passage à la chronicité. Ce phénomène a pu être vérifié dans la lombalgie où le traitement intensif de la lombalgie subaiguë peut prévenir le passage à la chronicité.
• Par ailleurs, dans une perspective diagnostique, les médecins classent aussi les douleurs en fonction de leur horaire. La « douleur inflammatoire » est souvent une douleur nocturne, maximale dans la 2e partie de la nuit et le matin au réveil où elle s’accompagne d’une raideur qui est responsable d’un dérouillage matinal prolongé (plus de 30 minutes). Cette douleur inflammatoire tend à s’estomper dans la journée avec l’activité. La « douleur mécanique », en revanche, apparaît à l’utilisation du segment de membre ou de colonne vertébrale et est calmée par le repos dans une position propre.
• Enfin, il est possible de classer les douleurs en fonction de leur intensité mesurée sur une échelle, échelle visuelle analogique (EVA) ou numérique (EN) de la douleur chez l’adulte et échelles spécialisées chez le nourrisson et le jeune enfant. La douleur est qualifiée de « faible à modérée » en cas de mesure inférieure à 40 mm sur l’EVA, de douleur « modérée à sévère » en cas de mesure EVA comprise entre 40 et 70 mm, et de « très intense » en cas de mesure EVA supérieure à 70 mm.

Quelles sont les causes de la douleur ?

Au-delà, il existe une classification selon le contexte, sinon selon le mécanisme exact responsable de la douleur chronique. Trois formes de douleurs chroniques peuvent être distinguées selon le contexte :
• Les « douleurs nociceptives » aiguës et chroniques sont liées à l’apparition et à la persistance de la cause, le plus souvent inflammatoire : elles recouvrent toutes les douleurs associées aux rhumatismes, aux sciatiques, aux traumatismes, aux maladies infectieuses comme les otites...
• Les « douleurs neuropathiques » sont associées à des dysfonctionnements des circuits de la douleur dans le système nerveux central et périphérique : lésion de la moelle épinière, du nerf sciatique, du ganglion spinal (comme dans la douleur post-zostérienne).
• Les « douleurs cancéreuses » sont plus complexes et associent souvent une composante à la fois inflammatoire et neuropathique.