L'acidocétose correspond à une acidité excessive en rapport avec l’accumulation de corps cétoniques dans le sang. Elle s’observe lorsque la quantité d’insuline est insuffisante, chez le diabétique de type 1, mais aussi parfois de type 2. C’est une urgence médicale qui nécessite une hospitalisation.
Des mots pour les maux
On appelle « acidocétose » l’accumulation de corps cétoniques (« acétoacétate » et « béta-hydroxybutyrate »), qui sont acides, dans le sang, ce qui aboutit à une acidose.
Ce sont ces corps cétoniques qui provoquent la libération d’acétone dans l’haleine, ce qui lui confère une odeur particulière (pomme ou fruit pourri).
Bien que le véritable « coma clinique » soit rare (moins de 10 % des cas), le terme de « coma acidocétosique » a été gardé pour désigner l’acidocétose sévère.
Avant l’insulinothérapie, l’acidocétose aboutissait chez le diabétique de type 1 à un coma qui entraînait en quelques heures le décès. Sa fréquence très largement a diminué grâce à la mise à disposition de l’insuline injectable et à l’éducation des diabétiques.
L’acidocétose est la conséquence d’une carence profonde en insuline. Cette carence peut être absolue, c'est le cas lors de la découverte d'un diabète de type 1 chez l’enfant, et c’est même le mode de révélation de la maladie dans un cas sur 3. Cette carence peut aussi être relative chez un patient diabétique de type 1 ou 2 dont les besoins en insuline s'accroissent brutalement, en raison d'une maladie intercurrente grave, infectieuse ou traumatique.
Lorsque le déficit en insuline devient sévère, la pénétration du glucose s’interrompt dans les cellules du cerveau, du tissu adipeux, du foie et des muscles squelettiques. En conséquence, l’organisme cherche à compenser ce besoin en sucre des cellules en puisant dans ses réserves pour augmenter le sucre dans le sang, c’est la mise en route d’un mécanisme appelé « lipolyse », qui consiste à libérer les corps gras stockés dans la graisse (« acides gras »). Les acides gras vont servir de combustible aux muscles et aux autres tissus, mais leur dégradation va aussi aboutir à la formation de corps cétoniques en grande quantité. Parallèlement se produit une « protéolyse » qui consiste à transformer les protéines contenues dans les muscles en sucre. Dans le foie, la dégradation de la forme de stockage du sucre, la « glycogénolyse », ainsi que la formation de novo de sucre, la « gluconéogénèse », essentiellement à partir des acides aminés (alanine), sont activées en même temps que celle de la synthèse des corps cétoniques.
Mais ce sucre ne peut toujours pas rentrer dans les cellules et s’accumule dans le sang (« hyperglycémie »), ce qui entraîne une hyper-concentration de sucre dans le sang (« hyper-osmolarité ») qui attire l’eau et le potassium à partir de la cellule (« compartiment intra-cellulaire ») vers le sang (« compartiment extra-cellulaire »). Parallèlement, ces processus provoquent une augmentation de la filtration par le rein. La non-réabsorption du glucose par le tubule rénal au-delà de sa capacité maximale de réabsorption, provoque une fuite de sucre dans les urines (« glycosurie ») avec une « diurèse osmotique ». Cette diurèse osmotique insuffisamment compensée par les boissons, a pour conséquence un déficit hydrique important avec diminution secondaire du volume d’eau dans le sang (« hypovolémie ») qui provoque inéluctablement une baisse de la filtration urinaire et une « insuffisance rénale fonctionnelle », élevant le seuil rénal du glucose et majorant l’hyperglycémie.
Les conséquences de ces perturbations sont donc principalement « l'hyperglycémie », « l'hyperosmolarité » et la « cétose », qui sont des signes biologiques majeurs de l'acidocétose diabétique.
• En cas d’acidocétose inaugurale, la fatigue (« asthénie ») apparaît sur quelques jours et est souvent marquée. Elle s'associe surtout à un amaigrissement important, supérieur à 10 kg et rapide (quelques semaines). Cet amaigrissement est associé paradoxalement, au moins au début, à une conservation de l'appétit.
• Au stade de l'acidocétose, l'accumulation des corps cétoniques est responsable en règle générale de problèmes digestifs avec nausées, vomissements et douleurs du ventre (« douleurs abdominales »). La fréquence respiratoire est élevée, supérieure à 20, voire jusqu'à 30 à 40 respirations par minute. Cependant, une acidocétose grave qui évolue depuis longtemps peut au contraire entraîner un épuisement musculaire, avec une fréquence respiratoire paradoxalement diminuée : une fréquence respiratoire paradoxalement normale peut donc être un signe de gravité de l’acidocétose.
Les signes de déshydratation sont dominés par la peau sèche, gardant le pli, et une baisse de la pression artérielle (« hypotension »), qui traduisent la déshydratation « extra-cellulaire », souvent associés à une sécheresse des muqueuses buccales et une diminution de la tension oculaire traduisant une déshydratation « intracellulaire ». L'acidocétose s'accompagne souvent d'une baisse de la température (« hypothermie ») qui va donc pouvoir masquer un processus infectieux. La recherche d'un foyer infectieux (qui peut être à l'origine de la décompensation acidocétosique) doit donc être systématique lors de l’examen, de même que celle d’une autre cause pouvant être à l'origine de l'acidocétose, qu'il s'agisse d'un accident vasculaire ou d’un accident médicamenteux.
Le coma acidocétosique se voit à tout âge, mais il est particulièrement grave chez le vieillard. Le coma acidocétosique peut survenir quelle que soit l’ancienneté du diabète, qu’il révèle parfois (20 % des comas acidocétosiques sont révélateurs d’un diabète de type 1). Dans 85 % des cas, le coma acidocétosique complique un diabète de type 1, mais dans 15 % des cas, il complique un diabète non traité par l’insuline. Le plus souvent, il s’agit alors d’un diabète de type 1 en état de stress physique, par exemple, à l’occasion d’une infection sévère ou d’un infarctus du myocarde. Il peut s’agir aussi d’un diabète de type 2 qui devient insulino-dépendant après des années de traitement par des hypoglycémiants oraux.
• Parmi les causes retrouvées, l’infection arrive en tête avec 35 % des cas.
• Une maladie est retrouvée dans 15 % des cas, dont une fois sur deux une complication due au diabète, en particulier cardiovasculaire.
• L’arrêt de l’insulinothérapie est retrouvé dans 10 % des cas, en particulier chez les patients traités par pompe à insuline sous-cutanée. Dans ses débuts, le traitement par pompe s’est accompagné d’une augmentation importante de fréquence des comas acidocétosiques secondaires à des pannes diverses. Depuis que les patients traités par pompe bénéficient d’une éducation particulière pour la prévention de l’acidocétose, la fréquence n’est plus différente de celle observée lors des traitements conventionnels.
• Une grossesse non ou mal suivie est retrouvée dans 5 % des cas (les besoins en insuline augmentent dès le 2ème trimestre de la grossesse).
• L’administration d’insuline et la réhydratation à l’hôpital doivent permettre d’éviter les complications secondaires que sont l’hypoglycémie, la déplétion potassique, la surcharge hydrosodée avec risque d’œdème aigu pulmonaire, les complications thrombo-emboliques et l’œdème cérébral.
• En l’absence de réhydratation adaptée et d’administration de l’insuline, la production de corps cétoniques va se poursuivre, aggravant l’acidocétose, les troubles hydro-électrolytiques et les troubles de la volémie.
Assez rapidement, le décès du malade peut survenir en raison de l'acidose, de l'hypokaliémie, du collapsus hypovolémique ou de la régurgitation et l'inhalation.
• Au cours d’une grossesse, l’acidocétose est redoutable, puisqu’elle peut entraîner la mort in utéro du fœtus.