Célibat, carrière professionnelle... Les Françaises ont des enfants de plus en plus tard, et peuvent de ce fait ne plus être aptes à mener une grossesse au moment où elles le désirent. Pour éviter de tels drames, le docteur Pauline Jaeger, médecin biologiste, nous explique en quoi l’autoconservation des gamètes hors raison médicale peut s’avérer utile et comment se déroule ce nouveau processus.
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Publié le 06.03.2023 à 18h00
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- Mieux Vivre Santé : Selon un nouveau sondage, seul un Français sur dix a déjà a déjà entendu parler de l’autoconservation des gamètes hors raison médicale, une démarche qui a été récemment autorisée par la nouvelle loi de bioéthique. A quoi sert-elle ?
Pauline Jaeger - C’est une nouvelle loi qui permet aux femmes entre 29 et 37 ans ou aux hommes entre 29 et 45 ans de pouvoir congeler leurs gamètes sans avoir de souci de santé. Le but est de préserver au maximum leur fertilité, car avec le temps, les ovocytes ou les spermatozoïdes s’épuisent, et il devient alors impossible de concevoir un enfant.
- Quel est le profil majoritaire de vos patients ?
Ce sont surtout des femmes qui avancent en âge et qui n’ont pas encore trouvé le bon partenaire pour concevoir un enfant.
- Concrètement, comment se déroule le processus ?
Il faut d’abord s’orienter vers un centre spécialisé en prenant rendez-vous avec un gynécologue, qui donne les premiers bilans à faire. Il faut ensuite voir un médecin biologiste qui fait le point sur les résultats et explique le processus, puis retourner voir le gynécologue pour la remise de protocole, c’est-à-dire les ordonnances pour la stimulation ovarienne et le calendrier à respecter.
Après la mise en place du traitement, qui se fait via des piqûres pendant 10 à 15 jours et des échographies de surveillance, il faut aller récupérer les gamètes directement dans les ovaires, donc faire une chirurgie ambulatoire avec une anesthésie locale ou générale. Généralement, les patientes arrivent tôt le matin à l’hôpital et en ressortent en début d’après-midi.
- Existe-t-il des effets indésirables ?
Oui, ce n’est pas un geste anodin. Il y a d’abord de potentiels effets secondaires liés aux piqûres, avec des rougeurs et des bleus qui peuvent apparaître sur la peau. Il y aussi des risques liés à l’anesthésie, la chirurgie et la ponction, qui peuvent provoquer des infections ou des écoulements de sang dans le ventre, même si c’est rare.
C’est enfin une démarche qui prend du temps et qui fatigue, même si on essaye au maximum de programmer les écographies tôt le matin pour que les femmes puissent aller travailler ensuite.
- Est-ce une garantie totale de tomber enceinte si on se décide à avoir un enfant ?
Non, pas du tout. Ce n’est pas une garantie mais une option, notamment parce qu’on ne maîtrise pas la qualité des spermatozoïdes en face au moment de la conception désirée et qu’on ne peut pas prévoir ce que va donner l’ovocyte quand on le réchauffe.
D’une manière générale et si les conditions le permettent, mieux vaut donc essayer de concevoir assez tôt naturellement, en ayant à l’esprit que les femmes sont les plus fertiles entre 15 et 25 ans, et que cette capacité diminue assez drastiquement à partir de 35 ans.
- Toutes les femmes peuvent-elles le faire ?
Oui. Pas besoin d’être en couple, c’est une démarche personnelle.
- A partir de quel âge recommandez-vous l’autoconservation des gamètes hors raison médicale ?
Le plus tôt possible, même si les réserves d’ovocytes varient entre chaque femme.
- Est-ce une démarche remboursée par la sécurité sociale ?
Oui, tout ce qui est traitement et ponction est pris en charge par la sécurité sociale. La seule chose qui reste à la charge des patients, c’est tout ce qui est lié à la conservation via l’azote, qui coûte entre 45 et 50 euros par an.
- Pensez-vous qu’il faille mieux faire connaître ce processus aux Français, et si oui comment ?
Oui, on y réfléchit, car même s’il ne faut pas non plus inciter à faire cette démarche en masse, je pense qu’il serait bien que tous les Français soient informés de l’existence du processus, ce qui n’est pas du tout le cas aujourd’hui. Un bon moyen d’y arriver serait je pense de former les gynécologues et les médecins généralistes de ville, car la plupart ne connaissent pas encore bien les tenants et les aboutissants de l’autoconservation des gamètes hors raison médicale.
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