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Anti-stress

Comment la respiration peut améliorer votre quotidien

Par Stanislas Deve

Détente, concentration, capacités pulmonaires, prise de recul... On ne compte plus les atouts santé de la respiration profonde et consciente. Comment bien respirer peut-il changer la vie au quotidien ? Quels exercices faut-il effectuer concrètement ? Deux spécialistes nous soufflent quelques conseils.

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Respirer n’a jamais été aussi vital, à l’heure où le stress fait des ravages sur la santé et le moral de la quasi-totalité des Français (Ifop). Vantés par les adeptes du yoga et de nombreux athlètes, maintes fois validés par la science, les bienfaits de la respiration sur la santé ne sont plus à démontrer : il suffit parfois de prendre une grande bouffée d’air pour se calmer instantanément face à une situation stressante. « Il y a une interdépendance entre la respiration et le cerveau », explique Stéphane Janssoone, ancien triathlète devenu coach et auteur de La respiration : bien plus qu’une pratique essentielle (2022, éd. Dauphin). Toute variation physiologique ou mentale va se refléter sur le système nerveux autonome et altérer notre respiration. Mais l’inverse est aussi vrai : si on apprend à contrôler sa respiration, on peut réguler son système nerveux autonome pour parvenir à un meilleur état intérieur. »

En clair, c’est à double sens : si l’émotion joue sur notre respiration, la respiration peut jouer sur nos émotions. Et ainsi avoir des effets positifs sur l’humeur (en réduisant l’anxiété, la colère) ainsi que le sommeil (en aidant l’endormissement), mais également la digestion, le poids, la peau... « La respiration change notre chimie intérieure. C’est l’anti-stress le plus pratique : on l’a toujours sur nous », abonde Nathalie Saulnier, sophrologue et autrice du Petit livre de la respiration (2021, éd. First). La question est : comment bien s’en servir ?

« Plus longue est l’expiration, plus grande est la détente »

Nous respirons tous, mais sans y prendre garde, sans jamais vraiment avoir conscience de l’acte, en mode survie. Nous respirons donc presque tous mal, ou du moins, pas au plein potentiel de nos capacités respiratoires. Et ce, alors même qu’on respire quelque 20.000 fois par jour et environ 350 millions de litres d’air en l’espace d’une vie. Autant mettre à profit ces occasions pour s’essayer à quelques exercices de respiration qui ont fait leurs preuves contre l’anxiété ou même l’hypertension artérielle. Commençons par le début : il est préférable d’inspirer par le nez (qui filtre et humidifie l’air) et expirer par le nez (ou la bouche, selon certaines pratiques de sophrologie). « Il peut être intéressant, avant chaque exercice, de faire un peu de place dans mes poumons, en soupirant fort, en expirant l’air dans un seul souffle vif », note Nathalie Saulnier.

Inspirer et expirer n’ont pas les mêmes effets sur le corps. « L’inspiration, de fait, active les muscles respiratoires pour créer du volume au niveau des poumons, décrit Stéphane Janssoone. Si on schématise, elle va donc nous activer, nous dynamiser, stimuler notre concentration. L’expiration qui fait suite, elle, se fait d’elle-même : on a juste à lâcher la force musculaire. Les poumons, le thorax et le diaphragme vont naturellement reprendre leur posture d’équilibre – d’où l’effet plutôt relaxant de l’expiration. » Un premier exercice consiste donc à étirer soit son inspiration, soit son expiration, selon que l’on souhaite se dynamiser ou se relaxer. « Plus longue est l’expiration (comme si on soufflait à travers une paille), plus longue est la détente, et inversement », précise Nathalie Saulnier, qui invite à compter ses respirations (par exemple inspirer 3 temps, expirer 6). La posture est également essentielle pour bien respirer, relève la sophrologue : « Il faut imaginer une colonne d’air qui part du nez jusqu’au périnée, en longeant la colonne vertébrale. A force, cela va la redresser. » « Le mieux, c’est de faire les exercices assis, le dos appuyé contre une chaise, le plus détendu possible », estime de son côté Stéphane Janssoone.

La respiration abdominale, comme les bébés

Parmi les exercices les plus connus, la respiration abdominale. C’est la ventilation propre aux nouveaux-nés, programmés pour respirer par le ventre, le diaphragme, l’ensemble du buste. Lorsque l’on grandit, du fait de notre environnement, on va avoir tendance à déplacer la respiration vers la partie haute de notre corps (respiration thoracique), ce qui va réduire la ventilation et mobiliser le système nerveux autonome, dans un état proche du stress. « Certains patients viennent spécifiquement pour reprogrammer leur respiration spontanée, réimprimer le schéma qu’ils avaient au début de la vie », explique Stéphane Janssoone.

Comment ça marche ? Allongé ou même debout, mains sur le ventre pour sentir le va-et-vient respiratoire, inspirez par le nez en gonflant le ventre comme un ballon, puis expirez lentement par la bouche en laissant le ventre dégonfler jusqu’à se creuser. « Il faut le faire au moins trois fois de suite, c’est le temps minimum pour que le système nerveux repère un changement de respiration et donc un changement de la réponse nerveuse, hormonale, etc. », souligne Nathalie Saulnier. « C’est particulièrement intéressant avant de se lever le matin, allongé, la colonne droite et le ventre souple, ou avant de dormir pour faciliter la transition avec le sommeil. » En pratiquant la respiration abdominale, on augmente son amplitude respiratoire en utilisant 70% d’air contre 30% en respiration thoracique, d'après une étude.

Respirez au carré !

Autre exercice respiratoire efficace (« Il en existe des centaines ! », selon Nathalie Saulnier), la respiration carrée. L’idée ici est d’obliger le cerveau à rester très concentré sur la respiration, et ainsi de l’empêcher de partir dans ses pensées. En pratique : visualisez un carré, imaginez que vous tracez le premier côté en inspirant, le deuxième en restant en apnée pleine, le troisième en expirant, et le dernier en apnée vide. Prenez 3 ou 4 secondes pour dessiner chaque côté. Puis répétez l’exercice plusieurs fois. « Ce qui compte, ce n’est pas la durée des respirations ou apnées, c’est la régularité du cycle, rappelle la sophrologue. Cela fonctionne aussi avec la respiration en cercle : imaginez tracer un premier demi-cercle avec l’inspiration, puis le second avec l’expiration. Avec la pratique, vous parviendrez à dessiner un cercle entier pour chaque inspiration/expiration. »

L’intérêt de l’apnée dans la respiration en carré, c’est qu’elle apprend au corps à s’adapter, selon Stéphane Janssoone. « Cela maintient dans un état haut d’activation et dans un état bas de récupération. Quand je bloque ma respiration après une inspiration, mon corps doit tenir son volume d’air et va donc être en alerte. Contraint de s’adapter à cet arrêt de la ventilation, il va en quelque sorte apprendre à vivre avec moins d’oxygène, "au cas où". Résultat, lorsqu’il peut respirer normalement, le corps va donc mieux fonctionner, mieux résister au stress, aux pics d’états émotionnels. L’apnée poumons vides, elle, va procurer une sorte d’apaisement qui vient contrebalancer l’apnée poumons pleins. Avec la respiration carrée, on retrouve une forme d’équilibre. »

Réagir versus agir

Comment intégrer la respiration dans la vie de tous les jours, alors qu’on a déjà du mal à penser à respirer ? « Il faut ritualiser les choses, selon Nathalie Saulnier, en accolant les exercices de respiration à des activités que l’on fait déjà plusieurs fois par jour, comme lorsqu’on se brosse les dents chez soi ou que l’on attend à la machine à café au bureau. Et pour ne pas se décourager, il faut prendre son temps, ne pas vouloir trop en faire au début. Même trois respirations abdominales pleines, une seule fois par jour, suffisent à avoir des bienfaits sur l’organisme et le mental. » Prendre son temps, c’est également faire selon son propre rythme de respiration, rappelle Stéphane Janssoone. « Prenons la cohérence cardiaque (à laquelle Mieux Vivre Santé avait consacré tout un papier), qui propose de faire des cycles de 5 secondes d’inspiration et 5 d’expiration, soit 6 respirations par minute, pendant au moins 5 minutes. La fréquence n'est pas forcément idéale pour tout le monde, certaines personnes respirent 20 fois par minute et devraient donc réduire leur rythme par trois ! Il faut donc adapter l’exercice à sa façon de respirer : inspirer et expirer 3 secondes, cela fonctionne aussi bien. »

Si la respiration a des bienfaits quasi immédiats, elle présente aussi des avantages à plus long terme, selon le coach. D’une part au niveau physiologique (capacités pulmonaires, oxygénation des tissus, meilleure adaptation du corps à l'effort...), d’autre part à un niveau plus mental. « La respiration permet un recentrage sur soi-même, sur son cerveau dit conscient. Nous sommes constitués d’un cerveau reptilien qui permet de faire des choses de manière automatique, quasi-inconsciente, comme lorsqu’on conduit. Or le fait de conscientiser sa respiration, ne serait-ce qu’une seconde, permet de rétablir le lien, d’observer avec recul la réponse automatique qui est en train de se jouer, et laisser ma conscience proposer un schéma un peu différent. C’est la différence entre réagir et agir. »