A l’époque, le premier confinement anti-coronavirus a fait fermer les coiffeurs, et leurs cheveux, qui ont déjà l’habitude de coupes plus ou moins excentriques, poussent. "Au début, on a juste fait ça pour rigoler, en répondant au défi qu’un pote nous avait lancé. On ignorait complètement que cela était de nouveau tendance", racontent les deux amis, qui vivent dans la commune d’Angoisse, entre Limoges et Périgueux. "Puis on s’est rendu compte que cette coupe interpellait les gens. On venait nous parler, ça créait des liens positifs, ça nous a plu", poursuivent-ils. "On aime aussi bien se démarquer, dans la vie privée comme dans la vie professionnelle. Avec cette coupe, nos clients potentiels nous identifient mieux, et cela montre que l’on est ouvert d’esprit", ajoutent-ils. Ils poursuivent : "c’est aussi notre côté un peu rebelle. En portant cette coupe que beaucoup jugent beauf et un peu arriérée, on va à l’encontre de ce que les gens attendent. On apprécie de casser les codes".
Une coupe inventée par des pêcheurs
A l’origine, la coupe de ces deux beaux garçons extrêmement sympathiques était portée par des pêcheurs d’un poisson nommé "mulet". Dans les années 80, elle est popularisée par des chanteurs et des sportifs célèbres, comme David Bowie et Andre Agassi. Et contre toute attente, son côté un peu macho a été remis au goût du jour par des femmes connues comme Rihanna, Christine and the Queens ou encore Miley Cyrus, qui, depuis 2020, se sont mises à porter des versions plus sophistiquées.
Assez complexe techniquement, la coupe mulet consiste à porter ses cheveux courts sur les côtés et longs au niveau de la nuque. Une longueur intermédiaire doit être laissée sur le sommet du crâne, et l’ensemble est assez désordonné. Ainsi, Julian et Olivier entretiennent avec soin leurs coupes de cheveux respectives, avec un petit rafraîchissement toutes les six à huit semaines. Celle d’Olivier, brune, boucle joliment sur l’arrière, et est assortie d’une belle moustache. Même esprit du côté de Julian, qui a rehaussé le tout avec des mèches blondes.
La coupe mulet d'Olivier.
Naissance d'une communauté
Les deux copains travaillent ensemble sur la même base de loisirs pendant l’été. Olivier y est professeur de ski nautique, et Julian gère l’accueil. Le reste de l’année, Julian est graphiste, et Olivier coach sportif (ce dont témoigne son impressionnante musculature). Et si leur style dénote dans leur environnement, ils ont peu à peu découvert qu’ils appartenaient à une vraie communauté, d’abord sur les réseaux sociaux, où les clichés de coupes mulet fleurissent, puis en participant au festival européen de la coupe mulet, remporté cette année par le Belge Nicolas Vanderkelen. "On avait un groupe Facebook pour préparer cet événement, sur lequel les participants se motivaient. Et quand on s’est rendu sur place, c’était génial, on avait l’impression de rencontrer une famille. Un peu comme lorsqu’on découvre l’existence d’un cousin éloigné", racontent avec enthousiasme les deux compères, qui se connaissent depuis neuf ans. Malgré un énorme orage qui éclatera sur Chéniers (dans la Creuse), et perturbera l’applaudimètre destiné à élire la plus belle coupe mulet, Julian terminera premier de la catégorie "mulet moderne". Une place dont les deux amis ne sont pas peu fiers, car "une coupe mulet, c’est long à obtenir. La porter, c’est une preuve de persévérance", expliquent-ils.
Le festival de la coupe mulet à Chéniers, dans la Creuse.
Terminons par une question essentielle : la coupe mulet plaît-elle aux filles ? "C’est une question qu’on nous pose souvent. En tout cas, ce n’est pas un obstacle", répondent en riant les deux célibataires, aujourd’hui sans enfant. "Par contre, si je dois me poser avec une fille, c’est très important pour moi qu’elle m’accepte tel quel, avec ma coupe mulet, et pas qu’elle commence par vouloir me changer", explique Olivier. "Car je me sens beaucoup mieux comme je suis aujourd’hui qu’il y a quelques années", termine-t-il.
Pour le moment, ni Olivier ni Julian n’envisagent de changer de coupe de cheveux. Plus motivés que jamais, ils visent au contraire à participer à leur second festival de la coupe mulet, qui se tiendra l’année prochaine en Belgique. Avec des cheveux, espèrent-ils, encore plus longs.
