Anti-cancer. Allié de la lutte contre l’acné. Utile pour lutter contre la dépression. Bon pour la digestion. Ennemi du mauvais cholestérol. La liste des bienfaits du curcuma est longue... Mais, pour ne pas vous endormir tout de suite, on vous la fait courte.
Quoi qu’il en soit, vous l’aurez compris, la petite épice a très, très bonne presse. A en croire sa réputation, elle permettrait presque de résoudre la quasi-totalité des problématiques de santé les plus communes. Grosse exagération ou vrai aliment miracle ? Anthony Berthou, nutritionniste, et Nadia Rasamoely, naturopathe, nous aident à y voir plus clair.
Un principe actif aux nombreux effets
Avant de rentrer dans davantage de détails, encore un peu de patience : un retour à la base s’impose. Le curcuma est une épice. Ok. C’est l’ingrédient principal du curry. Ok.
Mais qu’est-ce que c’est réellement ? Ou plutôt, quels sont ses composants ? Réponse : il a une forte teneur en curcuminoïdes, et plus particulièrement en curcumine. Curcu… quoi ? Curcumine, le pigment auquel il doit sa couleur jaune, mais pas seulement.
Et pour cause, souligne Anthony Berthou, c’est aussi à cette curcuminoïde que le curcuma doit ses “propriétés antioxydantes”. Ce à quoi Nadia Rasamoely ajoute que c’est aussi la curcumine qui lui confère “ses propriétés anti-inflammatoires”.
Tout s’explique, si le curcuma fait autant parler de lui, c’est parce qu'il a deux propriétés principales : un effet antioxydant et un effet anti-inflammatoire. Oui, mais….
Des propriétés intéressantes, certes, mais à prendre avec des pincettes
Le curcuma a des propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes, c’est vrai, mais il ne faut pas non plus en exagérer les effets. Techniquement, le curcuma a bien un puissant effet anti-inflammatoire. Un effet qui pousse même la naturopathe à dire que c’est là son principal intérêt : “Toute la sphère inflammatoire va être améliorée par le curcuma”.
Comprenez, c’est à cette activité anti-inflammatoire que le curcuma doit sa réputation de super-aliment. En d’autres termes, explique Nadia Rasamoely, “le curcuma permet de traiter une inflammation et en conséquence, on peut avoir moins d’acné, moins de douleurs articulaires, moins de dépression, moins d’anxiété…”.
Voilà, on y arrive, consommer du curcuma revient donc bien à lutter contre d’éventuelles douleurs articulaires, de probables problèmes intestinaux ou même une acné naissante.
Alors oui, on vous l’accorde, mais ces propriétés anti-inflammatoires ne font pas du curcuma un remède magique. Et pour cause, “les propriétés du curcuma ont été reconnues en laboratoire, in vitro, or, pour que l’efficacité anti-inflammatoire soit la même sur l’homme, il faudrait vraiment en manger beaucoup”, note Nadia Rasamoely.
Un avis que partage Anthony Berthou : “On fait ce raccourci en disant que, tout ce qui est antioxydant est anti-inflammatoire, mais oui et non. Cela dépend du mode d’action au niveau du stress oxydatif et du dosage”. Or, poursuit-il, “il y a peu d’activité anti-inflammatoire identifiée chez l’homme à des dosages accessibles, c’est donc avant tout un composé antioxydant”. Résultat, le nutritionniste est catégorique : “On a totalement exagéré les vertus du curcuma”.
Très bien. Que l’on loue ses propriétés anti-inflammatoires, comme Nadia Rasamoely, ou qu’on ne lui reconnaisse qu’un effet antioxydant, comme Anthony Berthou, le constat reste le même : aux doses consommables dans notre vie quotidienne, les effets du curcuma sur notre santé sont à minimiser.
Pour autant, une question demeure, peut-on obtenir les effets vantés par les études en prenant des compléments alimentaires ?
Là encore… la question divise
Bof, bof. Comprenez : les avis divergent. Ainsi, si Anthony Berthou juge que c’est une perte de temps, Nadia Rasamoely estime, quant à elle, que bien choisi, un complément alimentaire au curcuma peut avoir un effet positif sur l’organisme.
Qu’il s’agisse de l’effet anti-inflammatoire ou même de l’effet antioxydant, le spécialiste de l'alimentation n’en démord pas : “Si on en consomme au quotidien, dans une alimentation riche en antioxydants, c’est intéressant mais de là à en faire une extrapolation sous forme de gélules pour lutter contre la douleur articulaire, la dépression etc… Absolument pas”.
Un avis qui, vous l’avez compris, n’est pas celui de Nadia Rasamoely. Selon elle, trouver un bon complément alimentaire ayant un impact sur notre état de santé est indéniablement difficile, mais pas impossible.
Elle détaille son point de vue : “En plus, de devoir être consommée en dose très importante, la curcumine est liposoluble. On a donc besoin de matières grasses pour qu’elle soit bien assimilée par l’organisme. D’un point de vue digestif, il faut donc être bien outillé pour assimiler le curcuma, surtout qu’il faut en consommer beaucoup et ce, avec des matières grasses. Dès lors, ça fait beaucoup de facteurs limitant à l’effet anti-inflammatoire. La dose alimentaire ne suffira pas, il faut donc partir ensuite sur des compléments alimentaires mais c’est compliqué car il faut les prendre au bon moment -besoin de graisse pour qu’ils soient assimilés- ou il en faut en trouver avec des matières grasses ou avec d’autres principes actifs comme la pipérine (NDLR principe actif du poivre) ou le gingembre qui permettent d’augmenter la biodisponibilité du curcuma”.
En somme, résume la naturopathe, “trouver un bon complément alimentaire est compliqué, mais si on choisit une bonne composition, un produit scientifiquement efficace et qu’on le mange pendant les repas alors oui, ça peut avoir un effet puissant”.
Verdict : si le curcuma n’est pas sans intérêt, il est bien loin d’être une solution miracle à tous vos problèmes -petits et grands- de santé. Par ailleurs, note Nadia Rasamoely, “à très haute dose, il a un effet anticoagulant. Sur des petits dosages du quotidien, ça n’a pas d’impact, mais sur de gros dosages, il y a un effet sur la fluidification du sang. Il faut donc faire attention, surtout si vous êtes déjà sous un anticoagulant”.