- Mieux Vivre Santé : Les bienfaits de la méditation sont aujourd'hui très largement reconnus. Pourtant son utilisation thérapeutique en France semble récente, pourquoi ?
Marine Colombel : Si l'utilisation thérapeutique de la méditation, en France, est assez récente, c'est parce que l'on n'en connaît plus très bien les différents bienfaits. Je dis "plus" et non "pas", parce qu'au 19ème siècle, avec le courant orientaliste, elle était très populaire dans l'hexagone. Mais, par la suite, elle a été quelque peu oubliée avant de revenir, un demi-siècle plus tard, par les États-Unis.
Ce n'est donc, à mes yeux, dû à un désintérêt mais plutôt à une méconnaissance. Ou, une fois que l'on en a compris et observé les bienfaits, ses applications en médecine se sont diversifiées.
- Pour autant, peut-on parler véritablement de la méditation comme d'une thérapie à part entière ?
Oui, tout à fait et c'est d'ailleurs un des thèmes centraux de mes consultations. Les applications thérapeutiques de la méditation sont très diverses. Elle peut être utilisée par les gens souffrant de dépression afin de réguler leurs émotions, par les gens anxieux afin de gérer leur stress, par les gens souffrant de douleurs chroniques pour changer leur rapport à la douleur ou encore, plus globalement, pour la gestion des pensées et des envies.
Elle est aussi très souvent employée en addictologie pour les personnes qui sont en sevrage du tabac ou de l'alcool afin de les aider à sortir des envies envahissantes de consommation.
On peut également l'utiliser pour traiter des troubles du comportement alimentaires. Dans ce contexte précis, elle permet de réapprendre à manger en étant dans son assiette, dans la sensorialité et de redécouvrir les saveurs.
Elle est ainsi très efficace dans le traitement de l'anorexie puisqu'elle permet de travailler le rapport au corps et le rapport à la nourriture. On ne force pas les repas, on redécouvre une certaine sensorialité et on combat les pensées envahissantes autour du contrôle. Plus largement, la méditation peut aussi être une grande aide dans les régimes et rééquilibrages alimentaires.
En d'autres termes, la méditation est un outil universel qui s'adapte à beaucoup de pathologies.
- Vous avez mis en place des groupes de méditation dans l'hôpital où vous travaillez, dans l'Essonne. Quelles pathologies soignez-vous, en partie, par la méditation ?
J'ai créé des groupes de méditation pour les personnes souffrant de dépressions récurrentes et de troubles bipolaires. Dans ces deux cas, on ne peut pas dire que la méditation guérisse les « épisodes » mais elle permet d'espacer ou d'éviter le retour .
Lorsqu'il s'agit de dépressions récurrentes, on ne travaille pas avec les patients lorsqu'ils sont en plein épisode dépressif mais plutôt entre ces différentes phases afin d'apprendre à gérer leurs émotions, à gérer leur stress. En outre, la méditation s'inscrit dans le travail préventif et donne des outils concrets pour éviter le retour de la maladie.
Dans le cadre de troubles bipolaires, les personnes pratiquent la méditation pour aider à recevoir les indices que leur corps leur transmet. Elle vient compléter l'arsenal thérapeutique contre la maladie et permet d'éviter une réponse dès que les premiers signes apparaissent.
De plus, dans ces deux cas de figure, la méditation est très bien vue par les patients : c'est une approche très intégrative. Et les résultats sont très parlants , on observe une baisse significative des rechutes. Les épisodes dépressifs, par exemple, sont donc moins nombreux et les patients moins en souffrance.
- A quelle fréquence conseillez-vous de méditer et estimez-vous qu'il est important d'être accompagné par un professionnel ?
Pour apprendre à son cerveau à aller dans un état méditatif, il faut être régulier. Il n'est pas forcément nécessaire de méditer des heures, mais il faut le faire tous les jours. Mieux vaut donc commencer en méditant, par exemple, cinq minutes par jour tous les jours. Ensuite, on aura tendance à allonger son temps de méditation sans même s'en rendre, et les cinq minutes deviendront dix ou quinze minutes.
Par ailleurs, dans la grande majorité des cas il n'y a pas de contre-indications particulières à trop méditer. Seules les personnes souffrant de troubles psychotiques graves doivent avoir méfier car, trop pratiquée, elle risque d'augmenter les troubles dissociatifs.
Enfin, même si on apprend plus rapidement avec quelqu'un et que le support d'un groupe est souvent plus motivant, on peut tout à faire apprendre à méditer seul. En revanche, si on médite dans un cadre thérapeutique, je conseille de le faire avec un professionnel.