Les alicaments sont des aliments naturels ou transformés industriellement qui, incorporés dans notre alimentation régulière, nous permettraient d’améliorer notre santé ou carrément de nous soigner. Une sorte de remède miracle donc qui fait, on n’en doute pas, la joie des industriels et donne bonne conscience aux consommateurs qui, se sentent moins coupables de consommer des gâteaux lorsqu’ils sont enrichis en vitamines..
Pourtant, la réalité est toute autre. Et les promesses portées par tous ces aliments laissent Anthony Berthou, nutritionniste spécialisé en micronutrition, bien dubitatif. Il en décrypte, pour nous, le pour et le contre.
Manger des alicaments permet de se soigner ?
“Non, on n’est pas du tout dans le médicament”, tranche l’expert. Ainsi, ajoute-t-il, “on parle d’alicaments parce qu’ils ont une propriété fonctionnelle. C’est-à-dire qu’ils sont, par exemple, très riches en vitamine D ou en magnésium”.
Sur le marché, on trouve deux catégories d’alicaments : “Des produits qui ont naturellement une vraie valeur ajoutée au niveau nutritionnel et des produits transformés qui ont été formulés pour tenter de pallier un déficit en particulier”, précise le médecin. Mais, insiste-t-il, “en aucun cas on parle de médicaments ou de soigner une pathologie. C’est un élément qui vient en prévention pour une santé optimale ou en accompagnement du traitement d’une pathologie. Ces aliments n’ont pas de but thérapeutique”.
Nombreux sont les aliments bruts au statut d’alicaments ?
C’est plutôt vrai. “Certains fruits, certaines épices ou encore certains légumes peuvent être considérés comme étant des alicaments. On pense notamment au gingembre, au curcuma, à la cannelle ou encore à l’ail et à l'oignon. Certaines baies comme la myrtille, la framboise ou la mûre possèdent également une vraie densité micronutritionnelle”, relève Anthony Berthou.
En outre, d’après lui, “ces aliments représentent une bonne alternative car ils permettent d’entrer dans une logique naturelle sans chercher à consommer des compléments alimentaires ou des produits transformés”.
Les alicaments vendus dans le commerce sont tous mauvais ?
Pas forcément, tempère l’expert en micronutrition : “Pour moi, c’est un piège marketing, mais pour autant cela ne veut pas dire que tous ces produits sont délétères. Ils peuvent parfois apporter certains bénéfices, mais ceux-ci peuvent être mineurs ou mal adaptés aux besoins de la personne qui les achète”.
De plus, poursuit Anthony Berthou, “le problème des aliments transformés industriellement c’est que sur l’emballage, le fabricant va alléguer le fait d’avoir mis plus de vitamines B1, de magnésium ou encore de vitamines D. Ceci a pour effet de laisser penser au consommateur que le produit est de bonne qualité alors, qu’à côté de ça, il peut être ultra transformé ou très riche en sucre, très gras... Ça peut être un vrai piège en termes de pertinence nutritionnelle parce que vous pouvez prendre n'importe quel produit et l’enrichir en micronutriments et ce n’est pas ça qui le rendra bon pour la santé”.
En revanche, concède le nutritionniste, ce qui est intéressant “ce sont les produits, comme le jambon par exemple, dans lesquels on n’a pas artificiellement ajouté un micronutriment mais on a plutôt sélectionné un type particulier de nourriture pour l’animal. Par exemple, on aura donné du lin à manger aux cochons ce qui donnera à la viande une contenance plus importante en Oméga 3”.
Si on choisit des alicaments bio, cela change tout ?
Non… grosse erreur. En effet, argumente Anthony Berthou, “le bio c’est un piège dans la tête des consommateurs qui s’imaginent que c’est forcément meilleur mais tout dépend de quoi on parle. Si on parle des contaminants, des pesticides par exemple, alors oui le bio est de meilleure qualité ; mais si on s’intéresse à l’aspect nutritionnel, alors non pas forcément. Un paquet de gâteaux bio peut être aussi mauvais qu’un paquet de gâteaux conventionnels".
A trop consommer d’alicaments, on peut risquer un surdosage ?
Si l’on mange des produits bruts, alors non, bien sûr que non. En revanche, s’il s’agit de produits industriels c’est possible. Le spécialiste sport-santé s’explique : “Du point de vue industriel, c'est très encadré. L’industriel ne peut pas aller au-delà des recommandations de base, au-delà des doses journalières maximales”.
Par contre, continue le médecin “ce que l’on ne maîtrise pas du tout pas c’est la consommation personnelle de l’acheteur. Prenons l’exemple du zinc par exemple, la dose nécessaire est de 15mg et la dose maximale à ne pas dépasser est de 40mg : si vous mangez plusieurs produits enrichis en zinc, vous pouvez donc l’atteindre. De manière générale, le surdosage est rare, mais ça peut arriver”.
Finalement, ça ne sert pas à grand d’acheter des alicaments ?
Pas vraiment… Vous l’aurez compris, Anthony Berthou n’en est pas un grand fan. “Il ne s’agit pas vraiment d’une démarche santé, si on veut prendre soin de soi rien ne vaut une alimentation variée, avec des produits bruts de saison. Et si on a un déficit en vitamines ou minéraux, il est mieux d’identifier réellement quel est le problème et de le traiter avec des compléments alimentaires tout en étant suivi par un professionnel de santé plutôt que de se donner bonne conscience en mangeant des produits transformés, pas forcément de bonne qualité”, conclut le nutritionniste.