Médicament contre la douleur et la fièvre parmi les plus consommés en France, le paracétamol est présent dans toutes les armoires à pharmacie familiales. Malgré cette apparente banalité, le paracétamol n’est pas dépourvu d’effets indésirables, notamment sur le foie. En Angleterre, cet anti-douleur en vente libre est d’ailleurs très utilisé dans les tentatives de suicide car une overdose massive peut provoquer la mort par hépatite fulminante. Mais sans aller jusqu’au suicide, les surdosages accidentels de paracétamol, c’est à dire les prises répétées de plus de 4g par jour, font également des ravages. En France, comme dans la plupart des pays développés, ils sont la 1e cause d’hépatite aigüe grave nécessitant une greffe de foie.
Les cellules du foie noyées sous l’afflux de calcium
On savait jusqu’ici que cette toxicité hépatique du paracétamol était liée à la présence dans les cellules du foie de quantité toxiques de calcium. Une équipe de l’Université australienne d’Adélaïde publie aujourd’hui dans la revue spécialisée PNAS l’explication de cet afflux de calcium dans les cellules hépatiques. Les responsables s’appellent TRPM2, il s’agit de petits canaux situés dans la membrane des cellules hépatiques. En présence d’acétaminophène, la substance active du paracétamol, ces canaux s’ouvrent et laissent de plus en plus de calcium pénétrer dans les cellules du foie jusqu’à ce que mort s’en suive.
Pour confirmer cette hypothèse, les auteurs de l’étude ont conçu des souris dépourvues de ces canaux TRPM2. 24h après injection de paracétamol, les dommages sur le foie de ces souris et la quantité de cellules nécrosées étaient très significativement réduite par rapport à ceux des souris classiques. « Avec ces canaux TRPM2, nous avons maintenant une cible pour de potentiels médicaments contre l’overdose de paracétamol et d’autres empoisonnements endommageant le foie », affirme le Dr Grigori Rychkov, l’un des auteurs de cette étude.
Une cible pour de futurs médicaments
Actuellement, les méfaits d’un surdosage de paracétamol ne peuvent être traités que si ils sont arrêtés à temps, c’est à dire dans les 18 heures, avant que les cellules du foie ne soient endommagées. Agir sur les canaux TRPM2 pourrait permettre d’élargir cette fenêtre d’action. « Si nous pouvons stopper l’afflux de calcium et empêcher les morts cellulaires, nous donnerons au foie de meilleures chances de récupération et nous pourrons, je l’espère, prévenir les insuffisances hépatiques complètes », pronostique le Dr Rychkov.
La compréhension de ce mécanisme d’entrée du calcium dans les cellules hépatiques pourrait également être utile dans les maladies hépatiques non alcooliques et certains cancers du foie.