Tout a commencé par une plainte déposée au pénal à la mi-décembre par une jeune femme de 25 ans. Handicapée à 65% à cause d'un AVC, Marion Larat met en cause sa pilule de 3 ème génération. Elle attaque le laboratoire et l'Agence nationale de sécurité du médicament (Ansm) qui n'aurait pas appliqué le principe de précaution. Depuis, son avocat affirme que trente autres femmes, qui vivent des situations comparables, s'apprêtent à demander réparation en justice.
Les agences sanitaires, la Haute autorité de santé et l'Ansm, n'ont pas attendu cette affaire pour rappeler que ces pilules de 3 ème génération et 4 ème génération comportaient un risque de thrombose veineuse deux fois plus élevé mais faible et les que les professionels devaient les prescrire en deuxième intention. Dans un pays où une femme sur deux de 15-49 ans choisit les contraceptifs oraux, les pilules de nouvelles générations représentent la moitié des prescriptions.
Face à l'emballement médiatique, le ministre de la Santé et l'Ansm n'ont pas voulu être pris en défaut. A l'agitation, ils ont répondu dans la précipitation. Marisol Touraine a décidé d'avancer du 30 septembre 2013 au 31 mars la date de déremboursement de ces pilules. Comme si une pénalisation financière pouvait répondre à un risque médical. Estimant que ces pilules étaient trop prescrites, le directeur de l'Ansm a évoqué l'hypothèse de restreindre aux spécialistes la possibilité de délivrer ce type de contraceptif. Comme si les généralistes étaient fautifs et incompétents. Or aujourd'hui, les généralistes prescrivent majoritairement des pilules de 2 ème génération (68%) et les gynécologues, les pilules de 3 ème génération (54%).
Alors que l'on attend de la sérénité de la part de la puissance publique dans un débat devenu irrationnel, ces deux annonces ont contribué à alimenter un climat de panique. Les témoignages de femmes sur les réseaux sociaux qui envisgent d'abandonner leur pilule, ceux des médecins qui se disent atterrés et désemparés, sont l'expression d'une cacophonie entretenue par l'exécutif. Et les propos du ministre - « Il faut éviter de donner le sentiment que la pilule serait un danger » - n'ont rien changé.
C'est dans ce climat que l'Ansm a ouvert hier sa série de concertations avec les professionnels. Aucune décision n'a été prise mais d'autres réunions devront suivre la semaine prochaine. Plusieurs participants ont néanmoins souligné que ce vent de panique pouvait conduire à une vague d'IVG. Le Collège des gynécologues rappelle l'épisode de la panique à la pilule survenu en Angleterre en 1995.
Cette année, pour une polémique de même nature, la "pill scare"avait conduit en un an à une augmentation de 11% des IVG des jeunes femmes.