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Mal au ventre aigu chez l’enfant : il faut éliminer une urgence chirurgicale

Mal au ventre aigu chez l’enfant : il faut éliminer une urgence chirurgicale

Les douleurs abdominales chez l’enfant sont plus souvent en rapport avec une affection médicale bénigne qu’avec la souffrance particulière d’un des organes du ventre. Mais de nombreux pièges existent et ces douleurs doivent faire évoquer par principe une urgence chirurgicale.

 

Mal au ventre aigu chez l’enfant : il faut éliminer une urgence chirurgicale
©123RF-Juan Aunion
Publié le 30.08.2022

Mal au ventre chez l’enfant : CAUSES

A quoi sont dues les douleurs du ventre ?

Les douleurs abdominales aiguës chez l’enfant sont une des premières causes de consultation aux urgences.
Les causes en sont très variées, englobant des maladies bénignes, généralement d’origine médicale (infections), qui sont majoritaires, comme de véritables urgences chirurgicales.
Les causes les plus fréquentes chez l’enfant sont en effet des douleurs fonctionnelles ou virales (gastro-entérite). Chez le petit enfant, les infections des oreilles (« otites »), les rhinopharyngites et les infections urinaires sont des causes très fréquentes de douleurs abdominales aiguë.
Les troubles fonctionnels sont à évoquer en l'absence de signes qui doivent orienter vers une pathologie organique (dégradation de l'état général, douleurs nocturnes, difficulté à avaler (« dysphagie »), hémorragie, anémie, fièvre, douleur typiquement biliaire ou pancréatique, signes péritonéaux tels que contracture ou défense.... Les troubles fonctionnels sont donc un diagnostic d’élimination.
Certaines causes sont en rapport avec des lésions graves de différents organes (perforations, infections…) et elles imposent l’appel du SAMU et la prise en charge en urgence. Ces lésions concernent des organes à l’intérieur du ventre (la « cavité abdominale »), mais aussi en dehors de l’abdomen.
Une maltraitance, à l’école ou ailleurs, doit être suspectée devant toute histoire peu claire ou incohérente.

Quelles sont les douleurs qui ont une origine gastrique ou intestinale ?

• L’appendicite est fréquente chez le sujet jeune et se traduit généralement par des douleurs de fosse iliaque droite (mais parfois l’appendice est en position « ectopique » et peut se manifester par des douleurs dans l’hypochondre droit, dans la région péri-ombilicale ou hypogastrique).
L'adénite mésentérique consiste en une inflammation, généralement bénigne, des ganglions mésentériques, c’est-à-dire des ganglions qui sont au niveau du pédicule vasculaire des anses intestinales. Généralement d’origine virale et typiquement retrouvée chez l'enfant et l’adulte jeune, elle mime généralement une gastro-entérite mais peut parfois faire évoquer une appendicite ou une sigmoïdite.
• Les occlusions intestinales sur bride sont une cause assez fréquente de douleurs abdominales diffuses après antécédents de chirurgie, souvent intenses. Elles s’associent à des signes d’irritation du péritoine (contracture, défense) en cas de perforation d’un segment de l’intestin qui est distendu au-delà de sa résistance.
• Parmi les causes d’obstruction intestinale, il faut individualiser le volvulus d’une anse intestinale qui correspond à une rotation d’une boucle de l’intestin sur elle-même. Dans ce cas, l’obstruction intestinale, avec le syndrome d’occlusion, s’associe à un blocage de la circulation sanguine, ou « ischémie d’origine vasculaire », qui va conduire à un infarctus de l’anse intestinale qui a tourné. Les douleurs sont généralement brutales, autour de l’ombilic (« péri-ombilicale ») quand c’est l’intestin grêle qui est touché.
• Les hernies des anses intestinales à travers les orifices de la paroi abdominales (ombilic, anneau inguinal ou crural) peuvent donner des douleurs abdominales très variables, mais majorées à l’effort ou la toux si elles sont non compliquées et réductibles. Les douleurs deviennent très intenses et très localisées en cas de hernie étranglée.
• Un reflux gastro-œsophagien (RGO) ou une œsophagite peuvent se traduire par des douleurs épigastriques (« épigastralgies ») modérées à type de brûlures ascendante vers la gorge (« pyrosis »).
• Les gastro-entérites sont très fréquentes mais la douleur abdominale est généralement au second plan car la diarrhée aiguë prédomine.
• Une douleur abdominale aiguë peut être une douleur qui récidive et il faudra alors évoquer une colite inflammatoire ou des causes plus rares (tuberculose intestinale), surtout en cas d’anomalies biologiques et d’amaigrissement associé.
• Une maladie de Hirschsprung : c’est est un trouble congénital de la motilité intestinale qui se manifeste peu de temps après la naissance avec des symptômes d'occlusion basse de l'intestin, tels qu'une impossibilité d'expulser le méconium durant les premières 48 heures, une douleur abdominale, une constipation, une distension abdominale progressive, des vomissements et occasionnellement une diarrhée.
• Un abcès infectieux peut compliquer de nombreuses maladies, dans de multiples localisations.
• Un ulcère gastroduodénal ou une gastrite se manifestent par des douleurs très variables et peu corrélées à la sévérité des lésions. Les douleurs sont soulagées par les antiacides et il faut absolument éliminer une hémorragie ou une perforation.
• Les perforations intestinales sont des causes de douleur aiguë du ventre qui exposent à risque vital immédiat car elles font courir un risque infectieux généralisé à l’ensemble du péritoine (« péritonite ») avec un risque de choc infectieux.

Quelles sont les douleurs qui ont une origine hépatique, biliaire ou pancréatique ?

• Une lithiase des voies biliaires est révélée par une douleur de épigastre ou de l’hypochondre droit, irradiant vers l’omoplate droite. La douleur s’accompagne d’une inhibition à l’inspiration profonde et le malade bouge le moins possible pour ne pas déclencher sa douleur (« colique apathique »).
• La pancréatite aiguë est une douleur intense, transfixiante, principalement épigastrique et d’apparition rapide avec irradiation à l'épaule droite. Elle est augmentée par les repas et soulagée par l’antéflexion (« position de prière mahométane »). Il peut aussi s’agir d’un pseudo-kyste.
• Certaines affections du foie peuvent se manifester par des douleurs de l’hypochondre droit. Il en est ainsi d’une hépatite aiguë qui est à suspecter en cas de douleur modérée de l'hypochondre droit et de jaunisse (« ictère »). En cas d’association à une altération de l’état général, il faut évoquer une étiologie toxique, herpétique ou auto-immune.
• Après un traumatisme, il est possible d’évoquer un hématome sous-capsulaire hépatique ou splénique (du foie ou de la rate) qui peut se révéler par des douleurs aiguës de l’hypochondre droit (foie) ou gauche (rate), augmentées à la palpation. La même présentation clinique peut révéler une infection (abcès du foie sur amibiase hépatique = gros foie (« hépatomégalie »), fébrile et douloureux après séjour en zone d’endémie amibienne ou une rupture de rate sur infection à CMV).

Quelles sont les douleurs dont l’origine est dans la paroi postérieur de l’abdomen (origine rétro-péritonéale) ?

• Une infection urinaire basse (cystite) peut se manifester par des douleurs de l’hypogastre associées à des brûlures en allant uriner (« miction »).
• Une infection du rein ou « pyélonéphrite » peut se révéler par des signes d'infection urinaire basse associés à une fièvre, des frissons et une dégradation de l'état général (« syndrome septique »). La douleur prédomine dans les flancs ou dans les fosses lombaires.
• Les calculs rénaux (« lithiases urinaires ») se manifestent généralement par une douleur lombaire intense à irradiation descendante vers l’avant et les organes génitaux externes. Le malade est typiquement très agité du fait de l’absence de position antalgique (« colique frénétique »).
• Une torsion testiculaire peut aussi se manifester initialement par des douleurs abdominales mais le diagnostic est redressé par l’examen de la bourse correspondante. Chez la petite fille, une torsion des annexes peut se voir.
• La rupture de vessie est très rare et survient en contexte particulier (après radiothérapie) : il s’agit d’une douleur abdominale intense dans la région hypogastrique avec épanchement intra-abdominal (« ascite ») et évolution vers un choc.
• Une rétention aiguë d’urine sur une malformation uro-génitale avec dilatation de la vessie (« globe vésical ») se manifeste par une douleur hypogastrique avec masse douloureuse à la palpation associée à la notion d’absence ou de faible émission des urines (« anurie/oligurie »).
• Une contracture du muscle psoas peut se manifester par des douleurs abdominales irradiant à l’aine lors de la contraction du psoas. Ces douleurs peuvent se rencontrer en cas d’hématome du psoas chez un enfant souffrant d’un trouble de l’hémostase. Un abcès du psoas peut se rencontrer lors d’un syndrome infectieux.

Quelles sont les douleurs qui témoignent d’une origine extra-abdominale ?

• Une inflammation des enveloppes du cœur (« péricardite ») peut se révéler par des douleurs épigastriques.
• Une pneumonie de la base des poumons peut rarement se révéler par des douleurs abdominales hautes, au niveau des hypochondres, ou basse, au niveau des fosses iliaques. Pour étayer le diagnostic, il faut rechercher la notion d’une gêne respiratoire (« dyspnée »), d’une fièvre, d’une toux, d’un crachat sanglant (« hémoptysie »).
• Le botulisme est une maladie qui est devenue exceptionnelle, mais qui peut être évoquée devant un tableau typique chez des personnes qui consomment des conserves artisanales.
La présentation clinique associe à la phase aiguë (12-48 heures après l'ingestion du contaminant) des douleurs abdominales (tableau de gastro-entérite non fébrile), des signes ophtalmologiques (presbytie aiguë) et neurologiques (dysphonie, dysphagie). Il n'y a jamais de fièvre, ni de syndrome inflammatoire.
• Une « douleur projetée » au ventre peut survenir en cas de fracture vertébrale après un traumatisme. Chez le sujet âgé, des fractures vertébrales ostéoporotiques peuvent survenir sans traumatisme apparent.
• La migraine abdominale est un diagnostic d’exclusion : fréquente et souvent méconnue, cette forme d'équivalent migraineux est exclusive aux enfants. Caractérisées par des épisodes paroxystiques de douleurs abdominales modérées à intenses durant 1 à 72 heures généralement diffuses ou mal localisées avec anorexie, nausées, vomissements, pâleur.

Quelles sont les causes générales à l’origine d’une douleur aiguë dans la région du ventre ?

Ces causes sont rares, mais certaines constituent également des urgences. Il faut les évoquer en fonction du contexte (antécédents personnels et familiaux) et devant des douleurs diffuses et intenses, avec éventuellement des signes de gravité, surtout si les examens d’imagerie sont normaux :
• Une décompensation d’un diabète peut mimer un tableau d’abdomen douloureux aigu avec d'éventuels troubles de la conscience.
Un diabète connu traité par la metformine évoquera facilement une acidose lactique.
• Une porphyrie aiguë intermittente peut se manifester par des douleurs abdominales (90 %), diffuses, continues ou à type de crampes, persistant pendant des heures, associées à des vomissements (60 %), une constipation (60 %) ou une diarrhée 8 %).
• Les intoxications au plomb sont des causes autrefois très fréquentes de douleurs abdominales aiguës associée à une constipation. La découverte d’une anémie peut faire évoquer le diagnostic.
• Une insuffisance surrénalienne aiguë dans le cadre d’une maladie d’Addison (« crise addisonienne ») peut se manifester par des douleurs abdominales d’intensité variable pouvant mimer un abdomen chirurgical, avec hypotension artérielle, déshydratation, nausées, vomissements, diarrhées, fièvre, troubles neuropsychiques.
Il faut également l’évoquer chez les personnes qui ont reçu des corticoïdes très longtemps et qui les ont arrêté ou chez qui survient un événement intercurrent.
• Une crise hémolytique aiguë au cours d’une drépanocytose peut se révéler par des douleurs abdominales aiguës (en cas d’infection ou d’hypoxie).
• Un syndrome hémolytique et urémique est lié à une infection par des bactéries productrices de « shigatoxines » (Escherichia coli) chez l’enfant de moins de 3 ans. Précédées d’une diarrhée généralement sanglante, les douleurs abdominales s’accompagnent d’une anémie hémolytique avec baisse des plaquettes (« thrombopénie ») et atteinte rénale ou insuffisance rénale.
• Un purpura de Schönlein-Henoch qui peut être responsable d’une éruption sur les fesses et les jambes des douleurs articulaires et abdominales avec une atteinte rénale est une vascularite à IgA
• La « maladie périodique » ou « fièvre méditerranéenne » est une maladie héréditaire qui se retrouve plus fréquemment dans les familles de juifs sépharades originaires du Moyen-Orient. La présentation peut tellement bien mimer un abdomen aigu et fébrile que les enfants sont souvent opérés plusieurs fois pour une appendicite puis un volvulus sur bride, en l’absence de diagnostic.
• Au retour d’un voyage en pays tropical et en association à une fièvre, il ne faut pas hésiter à évoquer et rechercher un paludisme (frottis sanguins et goutte épaisse).
• D’autres infections généralisées sont responsables de douleurs aiguës : endocardite d’Osler, choléra, shigellose, salmonellose.
D’autres maladies peuvent s’associer à des douleurs abdominales : hypercalcémie, thyrotoxicose, hypertension intracrânienne, leucémie aiguë, hémophilie, … et les autres causes d’acidocétose.

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