Les maux de tête, ou « céphalées », concernent différents types de douleurs qui correspondent le plus souvent à des maladies bénignes. Le problème est de ne pas passer à côté des affections graves. C’est le contexte et le caractère « habituel » ou « inhabituel » qui guide la démarche diagnostique et le traitement qui peut être urgent dans certaines circonstances.
Les céphalées les plus fréquentes sont bien sûr les migraines et les céphalées de tension, ainsi que les douleurs secondaires à la prise d’un médicament, qui ne nécessitent pas d’exploration et qui peuvent bénéficier d’un traitement assez simple.
Mais, devant une douleur de la tête, surtout si elle est récente et intense, l’objectif prioritaire est d’éliminer une céphalée secondaire à une affection grave nécessitant des explorations et un traitement en urgence. Ceci repose essentiellement sur l’analyse de la douleur et surtout de son caractère habituel et inhabituel.
Si la douleur est intense, récente et inhabituelle, surtout si elle s’accompagne de signes comme une fièvre, un trouble de la conscience ou un déficit neurologique, il s’agit d’une urgence. Il en est de même si des signes inhabituels surviennent sur une céphalée ancienne.
La distinction entre douleur de la tête habituelle ou inhabituelle, brutale ou progressive, permet aux médecins de classer les céphalées. Cependant, toutes les causes de céphalées inhabituelles brutales peuvent se révéler aussi par une céphalée progressive. À l’inverse, de nombreuses causes de céphalées progressives peuvent parfois donner une céphalée en coup de tonnerre. Les explorations seront donc toujours poussées : en particulier, les médecins vont toujours réaliser une exploration des artères en cas de maux de tête isolé avec scanner et ponction lombaire normaux.
Les maux de tête les plus fréquents sont les récidives de céphalées anciennes comme les migraines, les céphalées de tension et les algies vasculaires. Il en est de même des douleurs de la tête liées à la prise de médicaments.
La migraine est responsable de maux de tête récidivants qui sont typiquement unilatéraux (mais parfois bilatéraux ou alternants), pulsatiles, aggravés par l’activité physique et qui durent quelques heures jusqu’à 72 heures. Pendant la crise, il existe des nausées, des vomissements, une mauvaise tolérance des sons (« phonophobie ») et de la lumière (« photophobie »).
En cas de « migraine avec aura », la douleur de la tête est précédée de troubles visuels (tâche noire scintillante ou tâches lumineuses en zigzag dans la « migraine ophtalmique) ou du langage (difficulté à parler), transitoires, d’installation progressive, durant au maximum 1 heure et précédant (ou accompagnant) les maux de tête caractéristiques de la migraine. Dans certains cas, le tableau de migraine avec aura peut apparaître beaucoup plus inquiétant avec une faiblesse d’origine neurologique ou un déficit du champ visuel transitoire. Le traitement des crises repose sur les antalgiques, les anti-inflammatoires non-stéroïdiens et, en cas d’échec, les triptans. Il existe des traitements de fond pour prévenir les crises quand elles sont trop fréquentes. La douleur de céphalée de tension est moins intense et elle est toujours bilatérale, en casque, à type de pression ou de tension. Elle est de durée très variable : une demi-heure à plusieurs jours. Il n’y a pas de nausées, ni de photophobie ou de phonophobie. Elle n’empêche pas les activités quotidiennes. Le traitement des crises repose sur les antalgiques simples et la relaxation.
Une arthrose cervicale est souvent incriminée à tort chez des personnes qui ont des céphalées type migraine ou céphalée de tension. Certaines maladies rhumatologiques peuvent néanmoins donner des céphalées secondaires d’origine cervicale : arthrose sévère haute (Névralgie d’Arnold) avec ou sans conflit disco-radiculaire associé, séquelles de fracture ou de luxation d’une vertèbre cervicale, luxation entre la 1ère et la 2ème cervicale (luxation atloïdo-axoïdienne) au cours d’une polyarthrite rhumatoïde évoluée. Les céphalées y sont généralement postérieures, survenant lors des mouvements du cou et avec des contractures associées des muscles para-vertébraux associées.
Une céphalée d’origine médicamenteuse doit être évoquée de façon systématique, en recherchant une relation chronologique entre l’apparition des maux de tête et l’introduction d’un traitement tel qu’un dérivé nitré ou un vasodilatateur. Dans ce cas, l’évolution de la douleur est continue (classiquement plus de 15 jours par mois depuis plus de 3 mois). L’algie vasculaire de la face se manifeste, surtout chez les hommes jeunes, par des crises de douleurs atroces, d’un seul côté, siégeant surtout autour de l’œil, mais aussi frontales ou temporales. Les crises sont courtes (un quart d’heure à 3 heures) et se répètent jusqu’à 5 fois par jour (« cluster headache »). Elles s’accompagnent de congestion du nez et/ou d’un écoulement nasal (« rhinorrhée »), d’œdème de la paupière, avec rétrécissement de la pupille (« myosis ») ou chute de la paupière (« ptosis »), tous signes évocateurs d’un syndrome associé touchant le système nerveux autonome (« signes dysautonomiques »). Le traitement des crises repose sur le sumatriptan injectable et l’inhalation d’oxygène. Le traitement de fond de première intention est le vérapamil. L'hémicrânie paroxystique chronique ressemble beaucoup à l'algie vasculaire de la face. Les caractères qui la différencient sont des crises plus courtes, plus nombreuses dans la journée (le plus souvent plus de 5/jour). Les signes dysautonomiques sont identiques. En fait, le caractère discriminant essentiel est la réponse remarquable à l'indométacine et la résistance au sumatriptan.
La névralgie du Trijumeau est responsable d’une douleur paroxystique, brève, atroce, intolérable, à type « décharge électrique » ou de coup de poinçon qui survient le plus souvent chez la personne âgée avec une prédominance masculine. Cette douleur siège dans le territoire d’une ou plusieurs branches du nerf trijumeau, le nerf qui innerve avec 3 branches quasiment l’ensemble de la face. La branche la plus souvent touchée est la branche inférieure qui innerve la moitié inférieure de l’hémiface. La crise est brève (quelques secondes à moins d’une ou 2 minutes) mais il peut exister de multiples accès dans la journée et souvent dans la nuit (parfois jusqu’à 8), déclenchés par une zone gâchette, siégeant dans le territoire douloureux. La douleur peut ainsi être déclenchée par la mastication, un frôlement de la peau, un courant d’air. Elle est habituellement suivie d’une brève phase d’inhibition permettant au patient de s’alimenter.
Il faut envisager principalement un saignement intracrânien qui peut être extra-cérébral mais compressif (hématome extra-dural ou sous-dural) et plus rarement intracérébral (sauf en cas de traitement anticoagulant).
L’hématome extra-dural est un est hématome intracrânien constitué de sang artériel qui survient à la suite d’une rupture d’une petite artère lors d’une fracture du crâne. La douleur survient rapidement, 10 minutes à quelques heures après le traumatisme et elle est le plus souvent inaugurale. Le saignement se produit au contact de l’os et en dehors des méninges, mais en grossissant il va rapidement comprimer le cerveau. Un trouble de la conscience va s’installer assez vite après l’apparition de la douleur, avec des vomissements, et s’accompagner de signes neurologiques déficitaires, d’une asymétrie des pupilles, puis d’une mydriase avec des troubles de la tension artérielle et du rythme cardiaque. L’hospitalisation est nécessaire en urgence et le diagnostic sera confirmé par le scanner sans injection qui révèle un syndrome de masse extérieur au cerveau, sous l’os, repoussant le cerveau et comprimant les structures cérébrales en les déformant, en regard de la fracture du crâne. L’évacuation en urgence de l’hématome est indispensable en neurochirurgie.
L’hématome sous-dural est un saignement de sang veineux qui touche en général des personnes plus âgées. Il se présente sous deux formes. Il peut s’agir d’un hématome sous-dural aigu qui survient quelques jours après le traumatisme crânien. Les maux de tête sont inauguraux, avec des troubles des fonctions cognitives et si rien n’est fait, des signes identiques à ceux de l’hématome extradural. L’hématome sous-dural chronique survient plus tardivement, 2 semaines à 2 mois après le traumatisme crânien, qui n’est pas forcément une fracture et qui peut avoir été oublié par le malade. Les maux de tête s’accompagnent progressivement des mêmes signes. L’hospitalisation est également urgente, le diagnostic est posé sur le scanner non injecté et le traitement consiste également en l’évacuation de l’hématome en neurochirurgie.
En cas de fièvre ou de contexte infectieux, il faut évoquer en priorité une méningite aiguë (qui n’est pas toujours bactérienne) ou une méningite associée à une infection du cerveau (méningo-encéphalite aiguë), en particulier en cas d’infection à virus herpès.
Une méningite aiguë doit être évoquée devant des maux de tête apparaissant rapidement et progressivement intenses avec une fièvre et un syndrome méningé (raideur de la nuque qui déclenche un fléchissement des jambes quand on force pour la fléchir). Il peut s’y associer des vomissements et une mauvaise tolérance à la lumière (« photophobie »).
L’hospitalisation en urgence est nécessaire afin de réaliser une ponction lombaire qui fera le diagnostic de la cause. La cause la plus fréquente est une infection avec un virus banal qui ne nécessitera qu’un traitement antalgique et une réhydratation. Mais la grande crainte est une méningite de cause bactérienne, et en particulier une méningite à méningocoque, qui peut être responsable du décès ou de séquelles importantes en cas de délai lors de la mise en route d’un traitement antibiotique adapté. Dans le cas du méningocoque, le traitement est même si urgent qu’il peut être administré par voie intraveineuse, avant même la ponction lombaire, s’il existe des signes de dissémination générale de l’infection (méningococcémie), en particulier en cas d’apparition sur la peau d’un purpura fulminans méningococcique : quelques tâches rouge-violacées groupées en bouquet. La fièvre peut parfois manquer et la raideur de la nuque être absente d’où la règle de faire une ponction lombaire devant toute céphalée inhabituelle si le scanner est normal.
Des méningites aseptiques sont retrouvées au cours de certains cancers (cellularité atypique sur la ponction lombaire) et maladies inflammatoires (maladie de Behçet, sarcoïdose, lupus…).
Une méningo-encéphalite aiguë est une méningite associée à une infection du cerveau et elle s’associe donc à des signes neurologiques précoces. La plus typique est la méningo-encéphalite herpétique. La céphalée est au premier plan, avec une fièvre élevée (39 - 41° C) et des troubles du comportement, avant l’apparition de signes neurologiques déficitaires focalisés, troubles de la conscience ou crises comitiales). La ponction lombaire ramène un liquide céphalo-rachidien riche en lymphocytes et il sera mis en culture avec recherche d’interféron et réalisation d’une PCR à la recherche du virus HSV. Un traitement anti-herpétique par aciclovir (ou un autre dérivé de la même classe) doit être démarré au moindre doute, sans attendre la confirmation virologique.
Il existe d’autres méningoencéphalites virales (oreillons, rubéoles, rougeole, varicelle, mononucléose infectieuse, coxsackie et virus Echo) mais, devant ce type de tableau clinique et biologique, il ne faut pas oublier de rechercher une méningite bactérienne à une listéria devant un tableau compliqué, voire de traiter à la fois comme une infection à herpès et à listéria.
En cas de méningoencéphalites aiguë survenant au retour d’un voyage en pays exotique, il faut bien sûr penser à une arbovirose, une trypanosomiase… mais surtout il faut systématiquement évoquer un accès grave de paludisme à Plasmodium falciparum (la ponction lombaire est normale mais le diagnostic est fait par le frottis sanguin et la goutte épaisse).
Les sinusites aiguës provoquent des céphalées parfois intenses et fébrile, mais il s’agit plutôt de maux de tête antérieurs et touchant la face, modifiés par la position de la tête : augmentés par la modification de la position de la tête (se pencher en avant, décubitus) et/, parfois la pression des régions sinusiennes. Les douleurs sont parfois isolées, sans décharge nasale (« sinusite bloquée ») et la fièvre est inconstante. Le diagnostic repose sur l’examen ORL et le scanner des sinus.
Des maux de tête très brutaux (en coup de tonnerre) en l’absence de fièvre ou de contexte traumatique doivent faire évoquer en priorité un saignement méningé.
L’hémorragie méningée (ou « hémorragie sous-arachnoïdienne ») représente 10 à 30 % des douleurs de la tête brutales et inhabituelles. La douleur typique est d’apparition explosive, en coup de tonnerre, très intense, associée aux autres signes d’un syndrome méningé (douleur et raideur de la nuque…). Elle est très évocatrice d’une rupture d’anévrisme d’une artère cérébrale qui est retrouvé dans près de 60 % des cas. La douleur peut cependant être isolée, d’apparition plus progressive, et/ou disparaître en quelques heures, notamment en cas d’hémorragie méningée de faible abondance (céphalée dite « sentinelle ») d’une rupture limitée de l’anévrisme, mais qui ne doit pas non plus être négligée car elle précède en général une hémorragie massive. Le diagnostic repose sur le scanner cérébral en urgence (hyperdensité du sang), très sensible mais dont la sensibilité décroît rapidement avec le délai de réalisation. L’IRM cérébrale est aussi sensible que le scanner dans les premières heures et devient supérieure après 24 heures. Dans tous les cas de céphalée « explosive » avec une imagerie cérébrale normale, il sera réalisé une ponction lombaire : une coloration jaune (« xanthochromie ») du surnageant après centrifugation signe le diagnostic. L’imagerie vasculaire (angioscanner ou angio-IRM) trouve un anévrisme rompu dans 80 % des cas. La prise en charge neuroradiologique ou neurochirurgicale doit se faire en urgence.
Une hémorragie intracrânienne peut se présenter sous la forme d’une céphalée brutale ou progressive, mais il existe des signes neurologiques en faveur d’une origine localisée (« signes neurologiques focaux »), parfois plus difficiles à déceler si l’hémorragie survient dans le cervelet. Le diagnostic est posé lors du scanner (hyperdensité du sang) ou lors de l’IRM.
Un accident vasculaire ischémique peut théoriquement donner une céphalée brutale ou progressive. Mais là encore, il existe des signes focalisés. C’est le scanner (hypodensité s’il est réalisé après moins de 3 heures) et surtout l’IRM qui vont permettre de poser le diagnostic.
Le syndrome de vasoconstriction cérébrale réversible (SVCR) est une autre cause de céphalée en « coup de tonnerre ». Parfois appelé « angiopathie cérébrale aiguë réversible », ce syndrome se manifeste par des maux de tête aigus isolés, le plus souvent en coup de tonnerre, durant 5 minutes à plusieurs heures, volontiers provoquées par l’effort, une manœuvre de Valsalva ou un coït, et répétées sur 1 à 3 semaines. Dans un quart des cas, ces douleurs peuvent s’associer à des crises d’épilepsie et des déficits neurologiques focalisés. L’imagerie du cerveau (scanner ou IRM) est le plus souvent normale, mais peut montrer des atteintes ischémiques ou hémorragiques. L’angiographie cérébrale (angioscanner ou angio-IRM) peut montrer des rétrécissements de la lumière des artères, segmentaires et diffus, réversibles en 3 mois. La moitié des syndromes de vasoconstriction cérébrale réversible surviennent après un accouchement ou après exposition à des substances vaso-actives. Ils peuvent se compliquer d’hémorragie ou d’infarctus cérébraux. Le traitement repose sur le repos, l’arrêt des substances vaso-actives et un vasodilatateur artériel type inhibiteur calcique.
La dissection d’une artère cervicale (carotide interne ou vertébrale postérieure) se caractérise d’abord par une douleur du cou associée à une céphalée récente, inhabituelle, à début volontiers brutal, mais parfois plus progressif. Une dissection carotidienne entraîne typiquement une douleur du cou (« cervicalgie ») unilatérale avec une céphalée du même côté et un « syndrome de Claude Bernard-Horner » (chute ou « ptosis » de la paupière, rétrécissement de la pupille = « myosis », rétrécissement de la fente palpébrale) par compression du système sympathique qui est autour de la carotide. Des bourdonnements d’oreille (« acouphènes ») pulsatiles et une paralysie des derniers nerfs crâniens (XII) sont également évocateurs. En cas de dissection vertébrale, les douleurs du cou sont à type de torticolis et sont associées à une céphalée postérieure. Le diagnostic repose sur l’angioscanner cervical et l’IRM (avec coupes axiales cervicales et angio-IRM) qui montrent un rétrécissement artériel avec un hématome de la paroi. L’écho-doppler cervical peut être également utile. Un diagnostic en urgence au stade de la douleur du cou et des maux de tête permet de débuter un traitement anti-thrombotique pour prévenir les complications ischémiques (AVC).
La thrombose veineuse cérébrale est plutôt responsable de maux de tête progressifs. S’y associent une hypertension intracrânienne (vomissements en jet), des signes neurologiques focaux, des crises d’épilepsie. Le scanner sans injection est normal le plus souvent, ainsi que la ponction lombaire (possibilité d’augmentation des globules rouges et blancs). Le diagnostic est posé sur l’IRM ou l’angioscanner qui révèle l’obstruction veineuse du sinus.
Une encéphalopathie hypertensive peut être évoquée dans le contexte d’une hypertension ou d’une grossesse (« pré-éclampsie ») devant des maux de tête précédant des troubles de conscience, des déficits neurologiques focaux, une épilepsie (encéphalopathie) et une pression artérielle mesurée à 240/120 mmHg (moins élevée si éclampsie). Le fond d’œil montre un œdème papillaire et l’IRM fait le diagnostic devant des hypersignaux symétriques dans certaines séquences (FLAIR et T2). Une nécrose de la tige de l’hypophyse (« nécrose pituitaire ») peut se traduire par une céphalée brutale, ou progressive, mais associée à des troubles visuels et c’est l’IRM qui fait le diagnostic.
Quel que soit l’âge, une céphalée progressive et longtemps isolée doit faire évoquer une hypertension intracrânienne en premier lieu.
Les maux de tête peuvent être le seul symptôme d’un syndrome d’hypertension intracrânienne, en particulier à la phase précoce. La douleur a le plus souvent un début progressif, mais peut démarrer brutalement. La douleur de la tête est diffuse, permanente, augmentée par le moindre effort physique et surtout la position allongée, s’aggravant inéluctablement au fil des jours. L'hypertension intracrânienne symptomatique est une urgence, en raison du risque d’engagement du cerveau et du tronc cérébral dans le trou occipital. L’IRM ou le scanner (avec injection de produit de contraste) sont essentiels au diagnostic étiologique. Ils recherchent un tumeur du cerveau ou une thrombose veineuse cérébrale.
La suspicion d’un processus expansif intracrânien augmente lorsque la céphalée s’associe à des signes focaux progressifs (déficit sensitif et/ou moteur hémi-corporel, aphasie, hémi-négligence, hémianopsie…). L’imagerie permet le diagnostic : hydrocéphalie, abcès, tumeur primitive ou secondaire, hématome sous-dural. Un avis neurochirurgical doit alors être demandé en urgence.
Dans la thrombose veineuse cérébrale, la céphalée est quasi constante, le plus souvent progressive mais parfois brutale (2 à 16 % des cas). Elle est associée aux autres signes d’hypertension intracrânienne ou isolée. Des signes focaux bilatéraux et à bascule sont évocateurs, de même que le contexte (femme jeune, post-partum…). La thrombose veineuse cérébrale peut se compliquer d’infarctus veineux avec lésions œdémateuses souvent hémorragiques. Le diagnostic repose sur l’imagerie cérébrale et du système veineux par IRM ou un angioscanner veineux. Un traitement anticoagulant doit être instauré en urgence même en cas de forme hémorragique. Une ponction lombaire évacuatrice peut être effectuée avant la mise sous anticoagulant en cas d’hypertension intracrânienne (diminue la pression et soulage la céphalée).
Si ces étiologies sont éliminées, la ponction lombaire avec prise de pression en décubitus confirme l’hypertension intracrânienne et impose la recherche d’une cause vasculaire non vue sur l’imagerie cérébrale initiale (une fistule durale ou une tumeur médullaire).
L’hypertension intracrânienne idiopathique touche avec prédilection les jeunes femmes obèses et, plus rarement, en cas de prise de certains médicaments (vitamine A) ou de maladies métaboliques (endocrinopathies surrénaliennes). Il s’agit d’un diagnostic d’élimination. La céphalée est celle d’une hypertension intracrânienne avec éclipses visuelles et œdèmes papillaires bilatéraux. La principale complication est l’atrophie optique avec cécité. Le diagnostic est basé sur la normalité de l’imagerie cérébrale (exclusion d’un processus expansif, d’une thrombose veineuse et d’une fistule durale par IRM, angio-IRM et parfois artériographie conventionnelle), sur la mesure de pression du liquide céphalo-rachidien par ponction lombaire en décubitus (pression supérieure à 25 cm d’eau chez l’adulte et 28 cm d’eau chez l’enfant) et sur la normalité de la composition du liquide céphalo-rachidien. Le traitement repose sur la ponction lombaire soustractive, l’acétazolamide et la perte de poids.
A l’inverse, la céphalée du syndrome post-ponction lombaire est provoquée par une baisse de pression du liquide céphalo-rachidien après une brèche durale iatrogène : ponction lombaire exploratrice, anesthésie péridurale, rachianesthésie, infiltration épidurale, neurochirurgie. Elle apparaît quelques heures après le geste (« syndrome post-PL »). Elle est progressive ou soudaine. Le risque de céphalée post-ponction lombaire dépend des caractéristiques de l’aiguille utilisée (diamètre, biseau). Le diagnostic est clinique, basé sur la mise en évidence d’une « céphalée posturale orthostatique » qui apparaît en position debout ou assise, et disparaît en moins de 15 minutes en décubitus dorsal (à plat sans coussin). L’IRM montre les mêmes anomalies que dans une hypotension intracrânienne idiopathique. Le traitement, très efficace, repose sur le repos au lit avec boissons abondantes et, en cas de persistance au-delà de quelques jours, sur l’injection péridurale de sang autologue pour obstruer la brèche (« Blood-patch »).
L’hypotension intracrânienne idiopathique est due à une fuite de liquide céphalo-rachidien par une brèche durale spontanée ou apparue après un traumatisme rachidien mineur. La céphalée débute le plus souvent progressivement mais peut être brutale (15%). Elle est typiquement posturale, avec douleurs cervicales, bourdonnements d’oreille (« acouphènes »), hypoacousie, nausées, et parfois vue double (« diplopie ») horizontale par paralysie du VI. La suspicion clinique est confirmée par l’IRM cérébrale qui montre un rehaussement intense des méninges après injection de gadolinium, un déplacement cranio-caudal des structures encéphaliques, et parfois un aspect écrasé des ventricules. Elle peut se compliquer d’un hématome sous-dural ou d’une thrombose veineuse cérébrale aggravant les céphalées et leur faisant perdre leur caractère postural.
Chez la personne de plus de 50-60 ans, il est indispensable d’évoquer une maladie de Horton devant une céphalée temporale unilatérale, parfois brutale, mais qui est le plus souvent progressive. Il existe une altération de l’état général associée avec un syndrome inflammatoire (VS et CRP élevées). La palpation des pouls temporaux ne les retrouve pas et la région peut être inflammatoire et douloureuse (avec un cordon inflammatoire et douloureux sous la peau). Il peut exister des signes associés (claudication de la mâchoire, douleurs des épaules et des hanches en cas de pseudo-polyarthrite rhizomélique). L’échographie des artères temporale peut objectiver l’inflammation et l’obstruction de l’artère. La biopsie de l’artère temporale fait le diagnostic. La corticothérapie à forte dose et un traitement antiagrégant sont instaurés en urgence, en particulier en cas troubles visuels (épisodes de cécité monoculaire transitoire) en raison du risque de thrombose de l’artère centrale de la rétine).
En cas de contexte d’incendie ou de chauffage au bois en hiver, il faut évoquer une intoxication au monoxyde de carbone (CO). Le CO est un gaz inodore et incolore qui est émis par un système de chauffage à combustion défectueux. L’intoxication au monoxyde de carbone se manifeste dans 90 % des cas par une céphalée inhabituelle progressive qui précède des signes d’intoxication plus grave (vertiges, troubles visuels, asthénie, sensation ébrieuse). Devant des céphalées inhabituelles depuis des semaines ou mois, il faut savoir penser à une intoxication au CO si la céphalée est nocturne (disparaissant en matinée) ou survient à l’intérieur d’une pièce spécifique. Le diagnostic est assuré par le dosage taux de carboxyhémoglobine (HbCO) qui détermine la gravité du tableau clinique (si > 30 % céphalée sévère avec confusion puis coma) et complété d’un bilan cardiaque (ECG, enzymes cardiaques) à la recherche d’une myocardiopathie. Le traitement repose sur l’oxygénothérapie hyperbare et l’éradication de la source de contamination. En cas de localisation périorbitaire d’une douleur sévère, d’un seul côté (unilatérale), avec un œil rouge, un glaucome aigu à angle fermé doit être évoqué. Ces signes s’associent à un trouble visuel unilatéral (baisse d’acuité, halos lumineux) et parfois une mydriase modérée réactive. Le diagnostic repose sur la mesure de la pression intraoculaire en ophtalmologie. C’est une urgence (douleur et risque de cécité).
Les névralgies se manifestent par des douleurs intenses, brèves de quelques secondes, à type de décharges électriques ou de brûlures localisées au territoire sensitif d’un nerf innervant la face ou les muqueuses (V, VII bis, IX) ou le crâne (nerf d’Arnold ou grand nerf occipital). Une névralgie peut être secondaire ou idiopathique. Les névralgies secondaires entraînent généralement une hypoesthésie permanente et des accès douloureux. Elles peuvent révéler une lésion du nerf sur tout son trajet, du noyau dans le tronc cérébral jusqu’aux branches de division (SEP, méningoradiculite, zona, tumeur, traumatisme). Les explorations comportent une IRM avec et sans gadolinium avec coupes fines sur le trajet du nerf atteint et si besoin une ponction lombaire.