L’hyperthyroïdie est une maladie de la glande thyroïde qui aboutit à un excès de sécrétion d’hormones thyroïdiennes dans le sang. Celles-ci ayant une influence sur le fonctionnement (ou « métabolisme ») de presque tous les organes du corps, l’hyperthyroïdie est donc un syndrome « d’hyper-métabolisme ».
Des mots pour les maux
L’hyperthyroïdie est la maladie causée par l’hyperfonctionnement de la glande thyroïde, ce qui aboutit à l’augmentation anormale des hormones sécrétées par la glande thyroïde : les hormones thyroïdiennes.
La thyroïde est une « glande endocrine », c’est-à-dire qu’elle produit des hormones qui sont déversées directement dans le sang pour diffuser à tout le corps : ce sont la L-thyroxine (ou T4) et la triiodotyronine (ou T3). Ces hormones ne peuvent être fabriquées que s’il existe un apport minimal en iode dans l’alimentation.
Située à l’avant du cou, en arrière de la « pomme d’Adam » et en avant de la « trachée artère » (qui permet la respiration), la thyroïde est une glande en forme de papillon. Normalement, elle n’est pas palpable mais elle le devient en cas de goitre ou de nodule.
La sécrétion d’hormones par la thyroïde est normalement régulée par une autre glande située à la base du cerveau, « l’hypophyse ». En cas de déficit en hormones thyroïdiennes dans le corps, l’hypophyse sécrète une hormone qui va stimuler la thyroïde : la « thyréostimuline » ou « TSH ». S’il y a trop d’hormone thyroïdienne, l’hypophyse arrête de sécréter la TSH. C’est ce que l’on appelle un rétrocontrôle.
Les hormones thyroïdiennes sont très importantes car elles ont une influence sur le fonctionnement (ou « métabolisme ») de presque toutes les cellules et tous les organes du corps : elle stimulent le métabolisme, la température du corps, l’énergie musculaire et l’utilisation des glucides, lipides et protides.
L’hyperthyroïdie est une maladie où la glande thyroïde produit trop d’hormones thyroïdiennes, et ce de façon totalement incontrôlée. L’excès d’hormones thyroïdiennes provoque donc une augmentation du fonctionnement de tous les organes habituellement sensibles à ces hormones, c’est-à-dire de presque tous les organes du corps. L’hyperthyroïdie est donc essentiellement un syndrome « d’hyper-métabolisme ».
Les hormones thyroïdiennes ont une large palette d’effets sur l’organisme, ce qui explique les signes de la maladie. Tous les processus métaboliques du corps sont en quelque sorte « accélérés » : la fréquence cardiaque est rapide (supérieure à 100), de façon permanente et devient parfois irrégulière (« fibrillation auriculaire »), la fonction des intestins est elle-aussi accélérée (diarrhée chronique), les glandes sudoripares produisent trop de sueur et le malade a tout le temps trop chaud et se découvre plus que les autres personnes autour de lui (« thermophobie »). Le système nerveux est lui aussi stimulé, de sorte que le malade devient « hyperactif », irritable et « nerveux », avec des tremblements des mains. Malgré une augmentation nette de son appétit, la personne perd du poids, tant de la graisse que du muscle, car l’alimentation normale est incapable de répondre aux besoins nécessaires pour combler l’hyper-métabolisme et la dégradation accélérée des protéines. Au final, dans les formes évoluées d’hyperthyroïdie, le malade est « mince, chaud, nerveux, avec un goitre ».
Les signes de la maladie sont provoqués par les effets sur l’ensemble du corps des hormones thyroïdiennes en excès. La présentation varie selon les personnes mais, plus la maladie est traitée tard, plus les signes sont marqués. Les signes les plus fréquents concernent :
• L’état général avec un amaigrissement rapide, malgré un appétit conservé ou accru (« polyphagie »), avec une diminution des graisses, une chaleur souvent ressentie comme insupportable (« thermophobie »), une élévation discrète de la température avec les mains qui sont chaudes et moites, une sudation excessive (« hypersudation »), une soif excessive (« polydipsie »).
• Le système cardiovasculaire avec une fréquence cardiaque élevée (« tachycardie ») et permanente, un pouls « vibrant », des palpitations, un essoufflement à l’effort (« dyspnée d'effort »), des bruits cardiaques rapides et éclatants avec parfois un souffle cardiaque qui est de type fonctionnel, une tension artérielle systolique souvent augmentée.
• Le système neuropsychique avec un tremblement fin, rapide et régulier des extrémités (mains), une nervosité, une agitation, une labilité émotionnelle et, dans les formes graves, des troubles du comportement pouvant ressembler à une psychose.
• Le système digestif avec une diarrhée chronique, parfois des nausées et des vomissements.
• Des signes cutanés avec une peau luisante, chaude et humide, des démangeaisons, un épaississement de l’avant de la jambe (« myxœdème pré-tibial ») et des troubles touchant les ongles et les cheveux.
• Le système de la reproduction avec des troubles des règles qui sont peu abondantes (« oligoménorrhée »), douloureuses (« dysménorrhée ») ou absentes (« aménorrhée »), une augmentation ou une diminution de la libido, une hypertrophie de la glande mammaire chez l’homme (« gynécomastie »), et une impuissance.
• Le système musculo-squelettique avec une diminution de la force musculaire (« myopathie endocrinienne ») et parfois une diminution de la taille des muscles (« amyotrophie »), une diminution de la densité des os (« ostéopénie », voire « ostéoporose ») pouvant conduire à des fractures de fragilité.
Il existe également une diminution des globules blancs dans le sang (« leuconeutropénie ») et des globules rouges (« anémie »).
Enfin, dans la maladie de Basedow, qui est la forme la plus fréquente d’hyperthyroïdie, il peut exister des signes au niveau des yeux : « l’exophtalmie basedowienne », qui se manifeste par une saillie anormale des yeux hors de leur orbite, avec une rougeur de l’œil, un larmoiement ainsi qu’un œdème des paupières. Le mouvement normal des yeux peut être perturbé car les muscles des yeux sont eux-aussi gonflés et ne peuvent réaliser de mouvements précis, ce qui peut faire que les malades voient double (« diplopie »).
• La « maladie de Basedow » est la cause la plus fréquente d’hyperthyroïdie, en particulier chez la femme jeune. Il s’agit d’une maladie « auto-immune » liée à un dysfonctionnement du système immunitaire et à la présence d’anticorps qui stimulent les récepteurs à la TSH sur les cellules thyroïdiennes.
Il y a souvent un terrain familial, même s’il ne s’agit pas d’une maladie héréditaire. La maladie est favorisée par le tabagisme et elle peut se déclencher après une intoxication à l’iode.
Elle associe les signes classiques d’hyperthyroïdie à un goitre (30-60 %) d'apparition récente, diffus, ferme, élastique, indolore, soufflant et « frémissant » (« thrill » à l’auscultation) et à une exophtalmie inflammatoire auto-immune (20-80 %).
Cette exophtalmie basedowienne est bilatérale, asymétrique ou unilatérale. Il s’agit d’une exophtalmie « vraie » (avec un élargissement de la fente palpébrale) et un œdème. Elle est responsable au minimum d’un regard fixe et de douleurs, mais aussi d’une vision double (« diplopie »), de gène par la lumière (« photophobie ») avec risque d’ulcères de la cornée.
La maladie de Basedow peut s’associer à d'autres maladies auto-immunes (diabète, insuffisance rénale, anémie hémolytique, polyarthrite rhumatoïde, maladie de Biermer, d’Addison ou de Horton, lupus, purpura thrombopénique, vitiligo…).
• Le « goitre multinodulaire toxique » est la deuxième cause d’hyperthyroïdie, mais la première chez l’adulte de plus de 50 ans.
Les signes classiques d’hyperthyroïdie sont souvent modérés et d'installation insidieuse (formes frustres et trompeuses) chez une personne âgée. Le goitre est diffus, souvent irrégulier et bosselé (« multinodulaire »), mais parfois non palpable (goitre plongeant dans le thorax…). Il survient souvent sur un goitre préexistant, parfois à l'occasion d'une surcharge iodée.
Le diagnostic est fait grâce à la scintigraphie à l’iode 123 qui montre des nodules chauds au sein d'un parenchyme « froid ». L’écho-doppler est indispensable pour préciser le volume et caractériser les nodules. Une ponction à l'aiguille fine peut être nécessaire si certains nodules sont suspects de cancer.
• Le « nodule toxique isolé » est la troisième cause d’hyperthyroïdie en fréquence et la deuxième chez la personne de plus de 50 ans.
Il se révèle par un tableau d’hyperthyroïdie modéré avec un nodule thyroïdien unique, isolé et indolore. La scintigraphie révèlera un nodule chaud.
• Toute hyperthyroïdie peut être révélée par une surcharge en iode. Il existe cependant d'authentiques hyperthyroïdies par surcharge iodée : elle est alors secondaire à un traitement par un antiarythmique, l’amiodarone, ou par antitussifs, anti-diarrhéiques, produits de contraste iodés, antiseptiques iodés, préparations alimentaires riches en iode, collyres et, plus rarement, par le lithium.
• Les « thyroïdites » représenteraient 10 % des hyperthyroïdies : une hyperthyroïdie transitoire peut se voir en raison du « relargage » d’hormones thyroïdiennes lors de la destruction (« lyse ») des cellules de la thyroïde.
Il y a différents type de thyroïdite : la « thyroïdite de De Quervain » est parfois appelée « thyroïdite infectieuse » car elle survient généralement dans les suites d’une infection ORL. Elle s’accompagne de douleurs cervicales, de fièvre et d’un syndrome inflammatoire. Le goitre est douloureux avec une scintigraphie blanche. L'hypothyroïdie définitive est exceptionnelle.
La « thyroïdite de Hashimoto » est une autre forme de thyroïdite auto-immune qui se voit en association aux autres maladies auto-immunes et donne un tableau modéré, mais plus souvent des hypothyroïdies à long terme.
Certaines thyroïdites surviennent dans les suites d’un accouchement : les « thyroïdites du post-partum » sont généralement régressives spontanément.
• Certaines hyperthyroïdies sont liées à une sécrétion augmentée de TSH par l’hypophyse en raison d’un « adénome hypophysaire » à TSH ou « adénome thyréotrope » (< 1 % des adénomes hypophysaires).
Des complications peuvent apparaître si l’hyperthyroïdie n’est pas traitée avec des taux d’hormones thyroïdiennes dans le sang très élevés, ainsi que dans certaines maladies.
• La complication la plus redoutée est la « crise thyrotoxique » qui représente la décompensation d'une hyperthyroïdie négligée, soit spontanément, soit à la suite d’un stress, soit après intervention chirurgicale ou après injection d'iode lors d’un examen radiologique (CT injecté, coronographie,…).
La crise thyrotoxique est caractérisée par une fièvre constante supérieure à 38°C, des signes cardiaques (palpitations importantes, tachycardie et arythmie, hypertension artérielle ou, au contraire, hypotension, décompensation cardiaque), des signes neurologiques (agitation, confusion, délire, voire coma), des signes digestifs (nausées, vomissements, diarrhées, douleur abdominales), des sueurs profuses et une déshydratation.
Le malade doit être hospitalisé en urgence en raison de la possible évolution du trouble vers un choc.
• On eut aussi observer des « pseudo-paralysies périodiques thyrotoxiques » qui débutent entre 20 et 40 ans et sont plus fréquentes chez les asiatiques et les hommes.
Elles se manifestent par des accès de faiblesse extrême qui prédominent aux membres inférieurs, avec des réflexes conservés sans autre anomalie neurologique. Une hypokaliémie, parfois sévère, peut y être associée. Des complications cardiaques peuvent être au premier plan, ainsi que des troubles du rythme ou une insuffisance cardiaque.
• Une ostéoporose, qui est une diminution de la densité des os du squelette, est possible si l’hyperthyroïdie se prolonge avec un risque de fractures de fragilité, c’est-à-dire de fractures survenant pour un traumatisme minime ou même sans traumatisme.
• Dans la maladie de Basedow, l’exophtalmie peut prendre des proportions telles qu’elles menacent la santé de l’œil.