Le scénario est digne d’un roman de science-fiction. Et pourtant, l’homme augmenté devient une réalité. A Grenoble (Isère), l’équipe du Pr Alim-Louis Benabid a opéré un premier patient tétraplégique en vue de lui poser un exosquelette. Nos confrères de Sciences et Avenir le révèlent à l’occasion du Congrès de neurochirurgie WSSFN, qui se tient à Berlin (Allemagne) du 26 au 29 juin.
L’objectif est clair : offrir aux patients tétraplégiques une solution qui leur permette de regagner une mobilité. C’est la première fois qu’un tel dispositif est testé chez l’homme. Car le CHU de Grenoble ne s’appuie pas seulement sur un exosquelette. Il travaille aussi sur une interface qui fait le lien entre les ordres donnés par le cerveau et la machine qui effectue le mouvement.
18 à 40 ans
Pour parvenir à cet échange d’information, deux implants sont posés dans le cerveau, entre les méninges et la boîte crânienne. Ils sont équipés de 64 électrodes, précise le magazine. Ceux-ci enregistrent l’activité cérébrale et la transmettent à une machine dont l’algorithme assure la traduction pour faire bouger l’exosquelette. « Nous avons l’autorisation d’opérer cinq malades », explique le Pr Benabid.
Hommes et femmes sont appelés à se manifester auprès du CHU de Grenoble. Les volontaires doivent être âgés de 18 à 40 ans, précise la fiche de l’essai clinique. Mais plusieurs contre-indications sont listées, notamment un antécédent de dépression ou de dépendance à l’alcool, mais aussi la prescription d’anticoagulants ou encore une chirurgie cérébrale passée.
Un accomplissement
Si l’objectif final est de faire remarcher les tétraplégiques, les chercheurs grenoblois devront d’abord montrer patte blanche. Après avoir convaincu divers comités éthiques, l’équipe doit maintenant démontrer que cette technique est sans risque pour les volontaires.
Pendant quatre ans, les cinq premiers participants seront donc scrutés à la loupe. Les effets secondaires liés à l’implantation d’électrodes dans le cerveau seront étroitement surveillés. Les pionniers de la neurochirurgie examineront aussi l’impact de cette approche sur la maîtrise de l’exosquelette et s’intéresseront à la qualité de vie des patients.
Ce feu vert marque une avancée majeure pour les spécialistes de Grenoble. Voilà plus de trente ans que le Pr Benabid s’intéresse à la manipulation du cerveau. Avec succès, puisque le neurochirurgien est à l’origine de l’utilisation de la stimulation cérébrale profonde dans la maladie de Parkinson, lui valant le prix Lasker. Cet essai clinique sur l’exosquelette représente aussi un aboutissement. En 2012 déjà, le chercheur en parlait comme « l’un des projets maître de Clinatec ».