D’ici 25 ans, la NASA compte bien envoyer des astronautes sur Mars. Mais avant d’atteindre cet objectif ambitieux, il faudra d’abord régler les nombreux problèmes liés au long trajet nécessaire pour rejoindre la planète rouge, située à 9 mois de la Terre avec la technologie actuelle. En effet, les astronautes devront résister à des radiations mortelles, à de potentielles pertes de vision et à l’atrophie de leurs os, notamment en raison de l'attraction gravitationnelle qui représente 40% de celle exercée chez nous. Pour leur permettre d’effectuer des missions longues en toute sécurité, des stratégies vont donc devoir être mises en place.
Alors que de nombreux chercheurs travaillent sur le problème du déconditionnement musculaire, une équipe d’Harvard pourrait bien avoir trouvé une solution. D’après leur étude financée par la NASA, le resvératrol, un composé présent dans le vin rouge, le raisin et les myrtilles, préserverait substantiellement la masse et la force musculaire de rats exposés à une gravité martienne. Les résultats de leurs recherches ont été publiés ce mois-ci dans la revue Frontiers in Physiology.
Pour reproduire la gravité exercée sur Mars, les chercheurs ont équipés des rats d’un harnais complet, les suspendant au plafond de leur cage par une chaîne. Pendant 14 jours, 24 rongeurs ont été exposés à une charge normale (terrestre) ou à une charge diminuée à 40% pour reproduire celle exercée sur Mars. Chaque jour, ils donnaient à la moitié des rats 150 mg de resvératrol, connu pour ses propriétés anti-inflammatoires, antioxydantes et anti-diabétiques, tandis que les autres devaient se contenter d’eau. La nourriture était en revanche la même pour tous les animaux. Dans le même temps, les scientifiques ont mesuré une fois par semaine la circonférence du mollet des bêtes et la force de préhension de leurs pattes avant et arrière. Au 14ème jour, ils ont analysé les muscles.
Le resvétarol a complètement protégé la masse musculaire des rats martiens
"Après seulement trois semaines dans l’espace, le muscle soléaire du mollet diminue d’un tiers", explique le Docteur Marie Mortreux, auteure principale de l’étude. "Cela s’accompagne d’une perte de fibres musculaires à contraction lente, indispensable à l’endurance", précise-t-elle.
Ainsi, comme c’était attendu, l’état de Mars a affaibli l’adhérence des rats et réduit la circonférence de leur mollet ainsi que le poids de leur muscle et leur fibres musculaires à contraction lente. Toutefois, le resvétarol a complètement protégé la masse musculaire des rats martiens et diminué la perte des fibres musculaires à contraction lente. Ce supplément n'a malgré tout pas entièrement enrayé la réduction de circonférence du mollet.
Ainsi, "les stratégies alimentaires pourraient être essentielles (…) d’autant plus que les astronautes se rendant sur Mars n’auront pas accès aux types d’appareils de musculation déployés sur la Station spatiale internationale (ISS)", note Marie Mortreux. "Il a été démontré que le resvératol préservait la masse osseuse et musculaire chez les rats lors d’un déchargement complet, analogue à la microgravité d’un vol spatial. Nous avons donc émis l’hypothèse qu’une dose quotidienne modérée aiderait également à atténuer le déconditionnement musculaire dans une gravite similaire à celle exercée sur Mars", détaille-t-elle.
S’assurer de l’absence d’interactions dangereuses entre le resvératol et d’autres médicaments
Cet impact positif du resvératrol pourrait s’expliquer par la sensibilité à l’insuline. "Le traitement au resvératrol favorise la croissance musculaire chez les animaux diabétiques ou non chargés en augmentant la sensibilité à l’insuline et l’absorption de glucose dans les fibres musculaires. Ceci est pertinent pour les astronautes qui sont connus pour développer une sensibilité réduite à l’insuline pendant un vol spatial", explique Marie Mortreux. Par ailleurs, les effets anti-inflammatoires de ce composé pourraient également aider à conserver les muscles et les os.
"Des recherches complémentaires sont nécessaires afin d’explorer les mécanismes impliqués et les effets des différentes doses de resvératrol chez les hommes et les femmes. De plus, il faudra confirmer l’absence d’interactions dangereuses entre le resvératrol et d’autres médicaments administrés aux astronautes lors de missions spatiales".
En attendant de pouvoir envoyer des humains en toute sécurité sur Mars, la Nasa y envoie des sondes et des rovers. Il y a quelques jours, le vaisseau spatial Mars Reconnaissance Orbiteur (MRO), en orbite autour de la planète, a aperçu Curiosity escaladant la montagne Aeolis Mons, plus connue sous le nom de Mount Sharp. Ce dernier recèle de couches rocheuses qui en disent long sur l’histoire de la région ainsi que sur ses eaux. En 2020, la Nasa prévoit d’envoyer un autre rover sur la planète rouge afin de déterminer l'habitabilité de son environnement et de chercher des signes de vie ancienne.