Dans le monde, environ une naissance sur cent est touchée par le trouble du spectre de l’autisme (TSA). Il s’agit d’un trouble du développement caractérisé par des perturbations dans les domaines des interactions sociales réciproques, de la communication et par des comportements, intérêts et activités au caractère restreint et répétitif. Comme toujours, plus la maladie est dépistée tôt, plus une prise en charge adaptée pourra aider le patient à se développer le plus "normalement possible".
Si les premiers symptômes apparaissent dès la petite enfance, il est très difficile d’être certain du diagnostic chez les tout petits. La tâche des médecins pourrait toutefois être bientôt facilitée grâce à un nouveau marqueur neurologique de la maladie, identifié par des chercheurs de Dartmouth. D’après une étude parue jeudi 15 août dans la revue Current Biology, ce marqueur non verbal et objectif montre que des individus souffrant d’autisme sont plus lents à passer d’une image à une autre.
Cela fait déjà quelques temps que les scientifiques pensent que les patients atteints d’autisme inhibent les signaux neurologiques du cerveau de façon différente, notamment en ce qui concerne les informations visuelles.
Un diagnostic exact dans 87% des cas
Quand le cerveau humain reçoit deux images en même temps, les images vont et viennent dans la conscience, basculant de gauche à droite. Dans le passé, des recherches menées par Caroline Robertson, directrice de l’Initiative sur la recherche sur l’autisme à Dartmouth aux Etats-Unis, ont montré que le cerveau d’une personne autiste met plus de temps à passer d’une image à l’autre en raison de différences dans la transmission neuronale inhibitrice dans le cerveau. On parle alors de rivalité binoculaire ralentie : chez les autistes, le neurotransmetteur a des difficultés à filtrer et réguler les signaux sensoriels.
Partant de ces résultats, Robertson et ses collègues ont utilisé pour leur nouvelle étude des IRM pour mesurer la rivalité binoculaire chez les individus souffrant d’autisme. Dans le détail, les chercheurs ont examiné les signaux cérébraux des volontaires en plaçant une électrode d'électroencéphalographie (EEG) sur leur tête, au-dessus de la région visuelle du cerveau.
Lors des tests, les scientifiques ont présenté aux volontaires des damiers rouges du côté de l'œil gauche et des damiers verts du côté droit, clignotant d'avant en arrière à des rythmes différents. Ils ont alors réussi à déterminer avec 87% d’exactitude si les participants étaient atteints d’autisme ou non. Les personnes les plus atteintes avaient des taux plus bas de rivalité binoculaire : leur cerveau était plus lent à passer d'une image à l'autre.
"Nous avons besoin d’outils de diagnostic objectifs et non invasifs"
"Il est difficile de diagnostiquer l’autisme chez les enfants quand les premiers signes sont présents. Un clinicien entraîné pourrait être capable de détecter l’autisme à 18 mois ou même plus jeune mais l’âge moyen du diagnostic aux Etats-Unis est aux alentours de quatre ans", explique Robertson.
"Nous avons besoin d’outils de diagnostic objectifs et non invasifs qui ne se contentent pas d’examiner le comportement d’un enfant. L’un des plus grands objectifs dans notre domaine est de développer des marqueurs neurologiques objectifs de l’autisme qui peuvent marcher avec les individus qui ne parlent pas", poursuit-elle.
Ainsi, ces résultats offrent un nouvel espoir pour mieux diagnostiquer la maladie. "Ce test visuel pourrait être un marqueur non verbal d’autisme pour les adultes. Notre prochaine étape est de voir si ce test pourrait être potentiellement utilisé pour détecter l’autisme chez les enfants qui ne parlent pas encore et les adultes muets et le développer pour en faire un outil de diagnostic pour la maladie. En attendant, ces résultats nous donnent de nouveaux éclairages sur la façon dont un cerveau autiste fonctionne, montrant les régions visuelles cérébrales affectées", conclut Robertson.
En France, selon l’Inserm, environ 700 000 personnes sont atteintes de TSA, dont 100 000 âgées de moins de 20 ans. Chez nous, l’âge moyen du diagnostic se situerait autour de deux ans. "Il repose sur un faisceau d’arguments cliniques recueillis dans des situations variées par différents professionnels. Il est associé à une évaluation des troubles et des capacités ainsi qu’à la recherche de maladies associées. Il se fait en collaboration avec la famille", note le ministère de la Santé.