- Le vaccin BCG augmente l'immunité de l'organisme en stimulant la réponse cellulaire contre les bactéries pathogènes.
Provoquée par une bactérie très résistante, Mycobacterium tuberculosis ou bacille de Koch, la tuberculose est une maladie infectieuse souvent mortelle qui peut toucher de nombreux organes, même si sa forme pulmonaire reste la plus répandue.
Si la maladie continue d’être à l’origine de 1,5 million de morts chaque année dans le monde, dont environ 700 en France, la mise au point d’un vaccin — utilisé pour la première fois sur l’humain en 1921 — a permis après la Seconde Guerre mondiale d’enrayer sa propagation parmi les populations les plus fragiles, notamment les enfants.
Un vaccin vivant atténué
Connu sous le nom de BCG (pour bacille de Calmette et Guérin, du nom des deux chercheurs qui l’ont découvert), le vaccin contre la tuberculose a la particularité d’être un vaccin vivant bactérien atténué. Tandis que les autres vaccins entraînent la production d’anticorps dirigés contre l’agent pathogène responsable de la maladie, le BCG entraîne une réponse cellulaire: l’organisme produit alors des lymphocytes T, qui jouent un rôle primordial dans la défense immunitaire, et qui se dirigent alors vers les cellules où se trouvent les bacilles de la tuberculose.
Un des effets inattendus du BCG a été observé depuis longtemps : il rend les personnes vaccinées moins sensibles à d’autres infections. Les experts parlent d'“immunité formée” : la capacité de la réponse immunitaire innée à devenir plus efficace indépendamment du type de réinfection. Toutefois, on ignorait jusqu’alors encore pourquoi cet effet d'entraînement pouvait persister pendant des années, même longtemps après la mort des cellules immunitaires qui circulaient dans le sang au moment de la vaccination.
Dans un article publié dans la revue Cell Host & Microbe, des chercheurs du centre médical universitaire Radboud des universités de Nijmegen et de Bonn, aidés par des équipes australienne et danoise, ont présenté une réponse possible à cette question. Leurs résultats sont particulièrement intéressants dans le contexte de la pandémie de Covid-19.
Une réponse immunitaire renforcée
“Nous avons vacciné 15 volontaires avec le vaccin BCG et administré un placebo à cinq autres personnes à titre de comparaison, explique le professeur docteur Mihai Netea du centre médical universitaire Radboud de Nimègue (Pays-Bas). Trois mois plus tard, nous avons prélevé des échantillons de sang et de moelle osseuse chez ces personnes.”
Des différences notables ont été constatées entre les deux groupes. Dans le sang des personnes vaccinées, une réponse immunitaire plus importante a été remarquée. Les cytokines, dont le rôle est de renforcer l’efficacité immunitaire en faisant appel à d’autres cellules, ont libéré davantage de messages inflammatoires. Par ailleurs, les cellules immunitaires des personnes vaccinées ont montré l'activité de gènes complètement différents de ceux du groupe placebo, en particulier ceux nécessaires à la production de cytokines.
Un possible effet positif sur la pandémie de Covid-19
Les chercheurs ont aussi constaté que le vaccin BCG entraînait des modifications à long terme des cellules souches dites hématopoïétiques, produites dans la moelle osseuse et qui sont les "mères" de toutes les cellules immunitaires. “Nous avons constaté qu'après la vaccination, certains matériels génétiques deviennent plus accessibles, ce qui signifie qu'ils peuvent être lus par les cellules plus fréquemment”, explique le professeur Andreas Schlitzer, de l'Institut LIMES de l'université de Bonn (Suisse). “Cela explique pourquoi la vaccination entraîne une réponse immunitaire accrue à long terme, poursuit le docteur Netea. Cela pourrait bien être la base de l'impact durable de l'effet d'entraînement.”
Pour les chercheurs, ces résultats sont aussi intéressants dans le contexte de la pandémie actuelle de la Covid-19. Ils espèrent en effet que le vaccin BCG pourrait avoir un effet positif sur la maladie, en réduisant le risque d’une évolution grave. Selon eux, cet effet pourrait être notamment bénéfique au personnel médical, en première ligne et donc particulièrement vulnérables.
Dans l’attente de résultats de nouvelles études, encore en cours, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ne recommande cependant pas la vaccination de masse avec le vaccin BCG, également pour ne pas compromettre l'approvisionnement dans les régions touchées par la tuberculose.